Le 27 septembre 2022, les deux pipelines transportant le gaz russe vers l’Europe ont été détruits en mer Baltique. Difficile pour l’instant d’en mesurer les conséquences écologiques, économiques et géopolitiques.
La polémique agite les stratèges internationaux. Qui avait intérêt à saboter les deux tubes géants transportant du gaz russe vers l’Europe ?
Avant la guerre russo-ukrainienne, les États européens consommaient environ 400 milliards de mètres cubes de gaz naturel, dont 45% provenaient de Russie, c’est-à-dire 155 milliards de m3. Les principaux clients étant l’Allemagne et l’Italie. Ce gaz naturel était transporté via le gazoduc Nord Stream 1 (NS1) en service depuis 2012 (1.000 km sur terre et 1224 km sous la Baltique). Un autre pipeline, Nord Stream 2, (1200 km sous l’eau) visant à doubler les volumes de gaz transportés vers l’Europe, a été achevé en 2021. Chargé en gaz, il n’a jamais vraiment effectué de livraisons. En outre, NS2 avait pour but de se défaire des taxes commerciales de passage en Pologne et en Ukraine. Ajoutons que le financement des infrastructures était soutenu pour une moitié par Gazprom, le reste par 5 sociétés européennes dont Engie.
Le 1er mars 2022, Nord Stream 2 SA dépose son bilan, à la suite des sanctions décidées par l’Allemagne, l’Union européenne et les États-Unis en réaction à l’invasion de l’Ukraine.
L’hostilité américaine
L’École de guerre économique rappelle que les importations de gaz se répartissaient ainsi : 74 % est acheminé par gazoduc, 31% depuis la Russie, 28% depuis la Norvège. 26 % est acheminé sous forme de GNL en provenance du Qatar, 20%, 16% des États-Unis, 12% du Nigeria et 5% de l’Algérie (acheminé en Espagne par le gazoduc Maghreb-Europe ou Pedro Durand Farrell). Elle rappelle aussi « l’ingérence américaine dans un débat européen : Washington fut toujours opposé au projet NS2 au nom de l’indépendance énergétique de l’Europe ».
Le moins que l’on puisse dire, c’est que, depuis le début de la construction de Nord Stream 2, les États-Unis se sont montrés hostiles à cette réalisation. Dans un article du 11 avril 2022 intitulé « De l’eau dans le gaz entre Washington et Moscou » Bruno Husquinet expliquait les nombreuses raisons qu’avait Joe Biden à saboter le gazoduc russo-européen.
L’Europe, les États-Unis et la Russie ayant dans cette affaire des intérêts divergents. En effet, depuis l’invasion de l’Ukraine, « les exportations de gaz naturel liquéfié (GNL) des États-Unis vers l’Union européenne ont presque triplé », déclarait Ursula von der Leyen en juillet 2022. En juin, les États-Unis avaient exporté environ 57 milliards de mètres cubes de GNL, dont 39 milliards vers l’Europe.
« Une attaque terroriste »
Alors qui a saboté NS1 et NS2 le 27 septembre ? Tous les regards se sont aussitôt tournés vers Moscou. À Kiev, le conseiller de la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak, a dénoncé « une attaque terroriste planifiée » par Moscou. Sans preuves. Le Premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, a accusé les Russes. « Nous voyons clairement que c’est un acte de sabotage qui marque probablement la prochaine étape de l’escalade de la situation en Ukraine. »
Il apparaît évident que l’explosion est due à un acte délibéré nécessitant la mise en œuvre de moyens d’État. Aucune organisation terroriste n’étant capable d’un pareil sabotage.
Le Kremlin, de son côté, rétorque qu’il serait « stupide et absurde » pour elle de détruire l’une de ses sources principales de revenus, au moins pour l’avenir.
D’ailleurs, Moscou demande une réunion du conseil de sécurité de l’ONU pour savoir si les États-Unis ont mis leurs menaces à exécution.
Les propos imprudents de Biden
En effet, le 7 février 2022, Joe Bident affirmait qu’il ferait le nécessaire pour mettre fin à Nord Stream 2 si les Russes envahissaient l’Ukraine. De fait, les États-Unis semblent être les premiers bénéficiaires de l’opération de sabotage. En déconnectant l’Europe du gaz russe, ils peuvent vendre à l’UE leur GNL à des prix prohibitifs tout en assujettissant encore plus les économies européennes.
Cette volonté destructrice de NS 1 et 2 n’est pas nouvelle : elle a été révélée en 2008 par wikileaks dans un câble déclassifié
Mais il y a plus surprenant. Selon le Portail de l’I.E. des « sources » évoquent la présence de l’US Government Vessel 3, un navire de guerre américain, à proximité de l’explosion à partir de la carte interactive des flux maritimes mondiaux.
Vrai ? Faux ? Difficile de confirmer même si cette présence soulève en effet des questions.
— Blastnymous (@whynot11177) September 27, 2022