L’Association anti-corruption AC !! vient de saisir la Juridiction Interrégionale Spécialisée (JIRS) de Nancy pour des faits de corruption et de prise illégale d’intérêts présumés visant des élus de Thionville et des promoteurs immobiliers.
Ça n’a pas traîné. Quelques jours seulement après la diffusion du 5ᵉ épisode des ThionviLeaks intitulé « Le Pacte de corruption » réalisé par le lanceur d’alerte Yan Rutili, l’association Anti-corruption AC !! que préside Marcel Claude a déposé une plainte contre X à la JIRS de Nancy. Les infractions visées : « faux en écriture publique et usage, corruption active et passive, atteinte à la liberté d’accès ou à l’égalité des candidats dans les marchés publics, prise illégale d’intérêts ». Rien que ça.
Une plainte en trois parties
On sait que, dans ces vidéos largement diffusées sur les réseaux sociaux, Yan Rutili dénonce, preuves à l’appui, les relations malsaines entre des élus et des promoteurs immobiliers. C’est sur la base de ces révélations, mais aussi d’investigations plus personnelles, que l’association anticorruption fonde sa plainte. Laquelle s’articule autour de trois chapitres.
Le premier est consacré à la recherche d’éléments de preuves pouvant mettre en cause des élus dans les ThionviLeaks. Le second s’appuie sur une enquête judiciaire effectuée sur commission rogatoire de la juge d’instruction de Thionville dont une copie est mystérieusement tombée dans la boite aux lettres du président de l’association AC !! Le troisième chapitre, le plus développé, concerne une kyrielle de fraudes présumées constatées par AC !!
L’enquête du SRPJ de Nancy
La plainte revient sur la cession litigieuse de deux biens immobiliers près de la gare de Thionville, la Maison des associations et l’Auberge de jeunesse à vils prix, à deux promoteurs mosellans, Stéphane Noël et olivier Vetsch. Les actes de vente ont été reçus par Me Yvon Gérard, lui-même en affaires avec les deux promoteurs. On sait aussi que ce notaire a disparu mystérieusement le 17 août 2022.
La partie concernant l’enquête du SRPJ de Nancy fait suite à une plainte, déjà ancienne, d’un autre promoteur de la ville, René Hombourger. Dans ce chapitre, il est encore question de copinage et de relations malsaines, de faveurs consenties à certains promoteurs, de sociétés écran et même de faux en écriture publique. On croise au détour d’un voyage à Marrakech de nombreux élus de Thionville, mais aussi de Metz, comme Richard Lioger, alors adjoint au maire de Metz en charge de l’urbanisme et député socialiste.
Au final, l’association AC!! se demande si les réponses faites par la ville de Thionville aux questions posées par l’enquêteur du SRPJ, n’avaient pas pour but de l’induire en erreur, volontairement.
Des trésors nationaux
L’auteur de la plainte s’interroge aussi sur la règlementation encadrant la vente de biens immobilier communaux. La vente « à vil prix » n’est pas admise, dit-il. On sait par ailleurs qu’il s’agit d’une vente de gré à gré. Mais ces procédures sont compliquées. Ont-elles été respectées? La question se pose, d’autant qu’il s’agit ici d’anciens bâtiments militaires pouvant être considérés comme des trésors nationaux au regard du Code du patrimoine, estime AC !!
Voilà donc du pain sur la planche pour la justice. Restera quand même à éclaircir un autre point. La vente des deux immeubles de la gare de Thionville ayant été reçue par un notaire en la forme authentique, l’acte de vente a désormais force de loi en dernier ressort. Autrement dit aucune juridiction ne peut le défaire. Sauf une inscription en faux. La procédure d’inscription de faux permet de qualifier un acte authentique de faux : selon l’art 441-1 du Code pénal, « constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité ».
Est-ce le cas?