Eric Dupond-Moretti est renvoyé devant la Cour de Justice de la République (CJR) pour prise illégale d’intérêts dans deux dossiers dont il a eu à connaître lorsqu’il était avocat.
Comme il fallait s’y attendre, le garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti a été renvoyé, ce 3 octobre, devant la Cour de Justice de la République par la commission de l’instruction. Concrètement, il est accusé d’avoir profité de sa fonction de ministre de la Justice pour régler des comptes avec des magistrats avec lesquels il était en conflit lorsqu’il était avocat. Notamment dans deux dossiers : celui des fadettes de l’affaire Sarkozy et celui du juge Levrault à Monaco. Ce que l’ancien ténor du barreau a toujours contesté. Ses conseils ont immédiatement introduit un pourvoi en cassation.
Une affaire politiquement embarrassante
Rappel des faits. Une plainte a été déposée par deux syndicats de magistrats et par Anticor, le 16 décembre 2020. Ils reprochaient au ministre de la Justice, à peine installé place Vendôme, d’avoir diligenté des poursuites administratives contre trois magistrats du Parquet National Financier (PNF) qui, à l’époque, recherchaient l’informateur de Nicolas Sarkozy dans la troublante affaire des écoutes. Or, Dupond-Moretti avait déposé plainte contre ces magistrats lorsqu’il était avocat.
Une autre affaire intéresse la CJR : celle du magistrat Edouard Levrault, juge français détaché à Monaco. En effet, à peine nommé ministre de la Justice, le 20 juillet 2020, Dupond-Moretti a lancé une procédure administrative contre le juge. Motif ? Il avait été choqué par les méthodes du magistrat à l’encontre de l’un de ses clients, un policier poursuivi pour corruption. Le juge Levrault avait eu le mauvais goût d’auditionner des ministres, des hauts-fonctionnaires et de lancer des perquisitions jusque dans les sphères proches du pouvoir monégasque. On comprend que cela puisse choquer.
Depuis sa nomination comme ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti est en bagarre avec les magistrats. Une longue histoire. Les magistrats, eux, n’ont jamais accepté la tutelle de cet avocat grande gueule, au point qu’ils ont voté à l’unanimité, le 7 octobre 2020, une motion de défiance à l’égard de leur ministre.
Reste que la mise en examen annoncée du ministre de la Justice, garde des Sceaux, c’est du jamais vu dans notre belle République qui a pourtant connu de beaux scandales. On n’imagine pas Dupond-Moretti rester à place Vendôme. Soit, il démissionne de son propre chef. Soit, il est débarqué par Emmanuel Macron. Quoi qu’il en soit, l’affaire est particulièrement embarrassante.
Perquise et mise en examen
Après les plaintes, les choses n’ont pas traîné. Une perquisition a été effectuée le 1er juillet 2021 par trois magistrats de la Cour de Justice de la République (CJR) accompagnés des gendarmes de la section des recherches de Paris dans le bureau même du ministre.
Quelques jours plus tard, le 16 juillet, Eric Dupond-Moretti était mis en examen pour prise illégale d’intérêts.
Les relations entre le ministre et les magistrats ne vont pas s’arranger…
Le ministre de la Justice convoqué le 16 juillet pour une mise en examen