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Ca chauffe entre les magistrats et le garde des Sceaux

La réforme de la Justice divise les magistrats (Photo credit: HBarrison on Visualhunt / CC BY-NC-SA)
La réforme de la Justice divise les magistrats (Photo credit: HBarrison on Visualhunt / CC BY-NC-SA)

Les magistrats du siège et du parquet de la cour d’appel de Paris ont voté à l’unanimité, le 7 octobre 2020, une motion de défiance à l’égard du ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, lui reprochant notamment un « conflit d’intérêts majeur » et une déstabilisation du parquet national financier (PNF). L’USM demande en outre au ministre de la Justice de remettre ses pouvoirs au Premier ministre.

Du jamais vu! Depuis sa nomination place Vendôme, le 6 juillet 2020, Eric Dupond-Moretti soulève des vagues de protestation du monde judiciaire. Le dernier acte de rébellion des magistrats de la cour d’appel de Paris date du 7 octobre 2020. Le premier président, Jean-Michel Hayat, son procureur général, Catherine Champrenault et tous les chefs de cour sans exception ont voté à l’unanimité lors d’une assemblée générale extraordinaire, une motion par laquelle ils « dénoncent le conflit d’intérêts majeur dans lequel se place le garde des Sceaux qui a mis en cause le parquet national financier contre lequel il avait, dans la même affaire, déposé plainte il y a moins de six mois ».

L’affaire Sarkozy

Eric Dupond-Moretti, garde des Sceaux (site du gouvernement)
Eric Dupond-Moretti, garde des Sceaux (site du gouvernement)

Cette  »affaire » est liée à l’enquête menée par le PNF dans le dossier sur les écoutes de Nicolas Sarkozy qui avait conduit les magistrats à chercher une taupe possible parmi les avocats, notamment les proches de Me Thierry Herzog, grand ami de Dupond-Moretti. Ce dernier avait déposé plainte contre le PNF. A peine nommé garde des Sceaux, le célèbre avocat pénaliste a retiré sa plainte mais il a demandé l’ouverture d’une enquête administrative contre trois magistrats du parquet national financier (PNF) nommément désignés. Un véritable affront pour la magistrature.

« Intérêts privés »

Les magistrats de la cour d’appel voient dans l’attitude de Dupond-Moretti « une déstabilisation de l’institution judiciaire. » Il lui reprochent en outre de piétiner « le principe démocratique de la séparation des pouvoirs au profit d’intérêts strictement privés ».
La motion largement diffusée sur les réseaux sociaux ajoute que Chantal Arens et François Molins, respectivement Première présidente et avocat général de la Cour de cassation, la plus haute juridiction française, ont de leur côté regretté « l’atteinte à portée au principe de présomption d’innocence des magistrats concernés, cités nommément avant le début des investigations ».
pour toutes ces raisons, ils en appellent au Président de la République lui demandant « d’agir en tant que garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire ».

La guerre est déclarée

Les deux syndicats de magistrats, l’Union Syndicale des Magistrats (USM et le Syndicat de la Magistrature (SM) sont vent debout contre le ministre de la Justice. Dans un communiqué, l’USM explique que  «Le 5 octobre, le cabinet du garde des Sceaux a contacté le bureau national de l’USM pour fixer une réunion de travail avec le ministre». Mais considère que le ministre ne répond pas au problème du conflit d’intérêts. Dans ces conditions, l’USM lui demande  « de mettre en œuvre l’article 2-1 du décret n°59-178 du 22 janvier 1959 modifié relatif aux attributions des ministres « . Et précise : « Le ministre, qui estime se trouver en situation de conflit d’intérêts en informe par écrit le premier ministre, en précisant la teneur des questions pour lesquelles il estime ne pas devoir exercer ses attributions. Un décret détermine, en conséquence, les attributions que le Premier ministre exerce à la place du ministre intéressé. Ce dernier s’abstient de donner des instructions aux administrations placées sous son autorité ou dont il dispose, lesquelles reçoivent leurs instructions directement du Premier ministre ».
La guerre est bel et bien déclarée.

 

 

 

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