Moselle
Partager
S'abonner
Ajoutez IDJ à vos Favoris Google News

Glatigny (57) : Zizanie dans le village maudit

Une série de plaintes visant la mairie anime la vie de cette commune de 256 habitants entre Metz et Boulay. Mais c’est son cimetière trois étoiles, flambant neuf, qui restera éternellement dans les mémoires.

Un cimetière flambant sans occupant pour l'instant (dr)
Un cimetière flambant sans occupant pour l’instant (dr)

À 12 km de Metz, le petit village de Glatigny, en Moselle, est un village sans église, sans café, sans école et sans commerce. Mais pas sans histoires. Des histoires comme il en existe parfois dans les communes de notre beau pays : des problèmes de voirie, de surfacturations, de faveurs accordées aux amis et autres gabegies que deux lanceurs d’alerte du cru, Pascal Aubert et Jean-Pierre Diedrich ont décidé de rendre publics. Ils ont d’abord alerté les autorités, préfet et procureur. Sans succès. Ils ont ensuite transmis plusieurs dossiers à l’association anti-corruption A-C !! Son avocat, Me Vincent Poudampa, a déposé plainte en septembre dernier contre X, mais visant clairement la mairie et son maire, Victor Stallone, pour « escroquerie, abus de confiance, prise illégale d’intérêts et détournement de biens publics ». Rien que ça.

Destruction d’une haie sur un terrain privé

La plainte concerne des travaux exécutés par la mairie « sur une propriété privée, en l’espèce la coupe d’une haie par l’entreprise d’un conseiller municipal, pour un montant de 16.500 euros, en date du 8 mars 2021 ».
Or, précise la plainte, cette haie, située rue des Vignottes, se trouvait sur des parcelles privées, « sans lien avec le patrimoine communal, et sans qu’aucune raison de police administrative ne puisse justifier. » Curieusement, la délibération du conseil municipal a été pris à huis-clos, observent les lanceurs d’alerte. Pour l’association anti-corruption A-C !! et son avocat, « il s’agissait de faire travailler la société d’un conseiller municipal ».
Au-delà de cette plainte dont on ne sait si elle prospèrera, la situation reste tendue dans le village où un collectif de citoyens s’est constitué pour dénoncer la dilapidation de l’argent public, et plus précisément la surfacturation de près de 50.000 € du remplacement de bordures de trottoirs en béton profilées. En outre, deux conseillers municipaux, Jean-Pierre Diedrich et son épouse, ont démissionné, estimant ne pas pouvoir remplir correctement leur rôle d’élus.
Bref, y a de l’ambiance au village. D’autres plaintes devraient suivre.

Pierres de taille et grilles en fer forgé

Mais c’est incontestablement le cimetière communal qui attire les regards et fait beaucoup jaser. Jusqu’ici, les habitants qui décédaient, étaient enterrés dans les paroisses voisines.
De fait, le cimetière est grandiose. Une nécropole trois étoiles voulue par le maire qui y a d’ores et déjà installé sa dernière demeure.
En 2015, une délibération est votée en faveur de la création d’un cimetière communal. Il en coûtera environ 300.000 euros. A quoi il faut ajouter l’éclairage public, l’eau et un parking…
En 2018, pour financer le projet, la mairie vend trois terrains sur un ancien dépotoir pour y construire trois maisons. La mairie fait appel au bénévolat pour exécuter certains travaux du cimetière. Puis une entreprise spécialisée réalisera 32 caveaux de deux places, 115 cavurnes et un jardin des souvenirs. « Le maire a souhaité donner à ce musée à ciel ouvert une architecture classique du 17è siècle incluant dans sa façade avant des éléments en pierre taillée et sculptée ainsi que des grilles et un portail en fer forgé » précise le journal municipal de décembre 2016.

Exécution d’un Juif innocent

Plaque en hommage à Raphaël Lévy, accusé à tort du meurtre d'un enfant en 1669 (DR)
Plaque en hommage à Raphaël Lévy, accusé à tort du meurtre d’un enfant en 1669 (DR)

Le cimetière de Glatigny a été inauguré le 25 septembre 2019, date anniversaire de l’exécution, en 1670, de Raphaël Lévy, un marchand de bestiaux juif de Boulay, condamné à tort pour le meurtre d’un enfant de 3 ou 4 ans, Didier Le Moyne. Depuis cette injuste condamnation à mort, la communauté juive de France avait fait de Glatigny un village maudit (Geässert) interdisant à tous les juifs de s’y rendre.
L’anathème fut levé 344 ans plus tard, le 19 janvier 2019, lors d’une cérémonie à laquelle ont participé des membres du Consistoire israélite de Moselle, le président du Consistoire central de Paris, Joël Mergui, le maire Victor Stallone, le préfet de Moselle et tous les habitants du village. Une plaque rappelant l’événement a été dévoilée sur la place du village. « Un grand moment de réconciliation républicaine » selon Henry Schumann, chargé du patrimoine au sein du Consistoire de Moselle.

Le cimetière attend ses morts

Dans le cimetière, la statue d’un enfant et une épitaphe rappellent aussi l’affaire de 1670. Mais le cimetière paraît bien vide. Quatre ans après son inauguration, aucun habitant décédé n’a été inhumé dans la nécropole de Glatigny, la tendance étant à la crémation. Et aux cimetières écologiques pour un repos éternel bio.
Les élus de Glatigny seraient-ils à contre-courant de l’histoire?

Nous avons tenté de joindre le maire Victor Stallone et lui avons laissé un message. Nous publierons avec plaisir son point de vue dès qu’il le souhaitera.

France Grand Est Lorraine Moselle