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Un déluge de milliards, le Parlement ignoré : drôle de façon de gouverner…

Point-de-vue. Depuis quelques jours, les annonces du Président ou de ses affidés ressemblent à une pluie de Milliards qui semble s’inscrire dans la durée. L’analyse de Christian Eckert, ancien secrétaire d’État au Budget.

Christian Eckert, ancien secrétaire d'Etat au Budget
Christian Eckert, ancien secrétaire d’État au Budget

Par Christian Eckert

Ce déluge de promesses financières est organisé par les « Grands Communicants » d’une façon originale que je connais bien et que je confesse avoir parfois pratiquée : annoncer des sommes « énormes » en les étalant sur un nombre d’années important. Par exemple, un plan de 100 Milliards pour la SNCF, ça impressionne ! Sauf que c’est d’ici à 2040, soit sur 17 ans, ce qui ramène à d’autant plus de modestie, sachant que beaucoup d’acteurs publics seront sortis du paysage d’ici là… De même qu’en 17 ans, il peut arriver de nombreux aléas que les années récentes ont parfois illustré : pandémie, guerre, inflation, séisme bancaire, crise climatique… Autant de nécessités potentielles d’adapter les politiques publiques face à des urgences…

Qui finance? Comment?

Cette question de forme ne doit pas occulter le fond : le financement de ces engagements est-il assuré, comment et par qui ?

La Macronie s’assoit sur notre constitution et oublie que notre République est censée (il y aurait beaucoup à dire…) être parlementaire. Ainsi, l’article 34 de la constitution est clair : « La loi fixe les règles concernant : l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures. Les lois de finances déterminent les ressources et les charges de L’État … ». La kyrielle de mesures annoncées pour éteindre l’incendie provoqué par le passage en force sur les retraites n’a donc, à ce stade, pas été validée par un Parlement où le Président mesure tous les jours un peu plus la fragilité de sa majorité.

Les débats budgétaires s’annoncent complexes

Bien que les agences de notation ne soient pas l’alpha et l’oméga de la gestion publique (souvenons nous de leur cécité sur la Grèce ou d’autres crises financière…), la dégradation de la cotation de la France rappelle que nous avons explosé toutes les règles prudentielles. Le Covid et d’autres événements internationaux ont servi de paravent à l’abandon de nombreuses ressources, dont les bénéficiaires principaux ne sont certainement pas les foyers modestes (ISF, fiscalité des dividendes, abandon des cotisations sociales, des impôts de productions des entreprises…).
Le document « programme de stabilité » envoyé par la France à Bruxelles intègre-t-il tous les engagements qui inondent la presse de ces derniers jours ? Ce que l’on en sait et qui programme une réduction du déficit public me parait incompatible avec les annonces du moment. Mais seuls quelques spécialistes peuvent en juger, dans l’indifférence générale. La gauche au pouvoir était harcelée par la droite et la presse économique donneurs de leçon d’économies budgétaires… Aujourd’hui, les mêmes sont devenus mutiques…

Drôle d’équité fiscale

Plus encore, le Gouvernement – tant qu’il y est – teste dans la presse l’idée de doubler la demie-part fiscale attribuée pour le premier enfant. Seuls les Français payant des impôts sur le revenu en bénéficieraient ! Cette mesure laisserait donc de côté environ 60 % des foyers, les plus modestes bien entendu. Les autres auront donc un abattement d’impôt d’autant plus élevé qu’ils ont des revenus importants. En matière d’équité fiscale, on a connu mieux.

Sans en abuser, en gardant la vision sociale qui doit être prépondérante, les éléments budgétaires et fiscaux ne doivent pas être avancés que pour demander des régressions sociales comme le Président le fait pour les retraites. Une vision discutée, démocratiquement établie, portant une vision globale et la plus équitable possible peut émerger si les acteurs publics (élus, syndicats, administrations…) s’y attellent. Les annonces verticales et péremptoires, par ailleurs individuellement difficiles à contester, seront confrontées tôt au tard aux réalités des déséquilibres à corriger.
Mieux vaut le savoir avant de décider…

Une pluie de milliards (Pikist)
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