L’Association des maires ruraux de France constate avec regret la position du Comité des Finances Locales (CFL) de se faire une nouvelle fois le vecteur de l’accentuation de la fracture financière territoriale en décidant de concentrer prioritairement la Dotation de Solidarité Rurale (DSR) sur les bourgs-centres. Explications.
La décision, prise lors de la séance du 14 février 2023 par le Comité des Finances Locales, reconduit des mesures qui fragilisent le développement d’une majeure partie des communes rurales, en décidant, sur l’enveloppe de la Dotation de Solidarité Rurale, hors fraction « péréquation », d’abonder à 75% la fraction « bourgs-centres » contre seulement 25% pour la fraction « cible ».
Une injustice territoriale
De nombre de communes rurales ont dû être aidées pour se sauver d’une situation périlleuse liée à l’explosion des factures d’énergie. Ainsi de nombreux projets ne pourront voir le jour du fait d’une capacité d’autofinancement insuffisante, cette décision est incompréhensible pour beaucoup de communes rurales.
Alors que les charges de ruralité augmentent, de nombreuses charges de centralité sont aujourd’hui à la charge des intercommunalités et donc financées par l’ensemble des communes qui la compose. C’est donc la double peine et un facteur aggravant de cette injustice territoriale.
Le CFL préfère concentrer l’abondement sur les seuls bourgs-centres alors que la DSR devrait cibler les communes rurales les moins aisées. Cette décision est d’autant plus incompréhensible que pour la dotation de solidarité urbaine (DSU), l’effort est mis sur la part permettant le plus de péréquation.
Une occasion manquée
Les élus ruraux dénoncent cette répartition à revers de la volonté de soutenir les communes rurales les plus pauvres et une logique contraire à la nécessité de répondre à la précarité de nombre de populations rurales. Sans des communes rurales dynamiques, aucun centre-bourg ou petite ville ne peut jouer durablement sa mission de centralité.
À l’heure où la Cour des comptes, dans son rapport « Décentralisation, 40 ans après » apporte des éléments de nature à stresser et insécuriser encore davantage l’action des maires avec la prétendue nécessité de réduire encore l’action publique par un « redressement des finances publiques», les maires ruraux soulignent une nouvelle occasion manquée d’œuvrer au rééquilibrage urgent quand le déséquilibre de l’écart de dotation forfaitaire poursuit son œuvre de clivage entre communes au détriment du monde rural dans son ensemble.
Une population en hausse
L’AMRF appelle le Gouvernement à l’heure de son annonce pour un Plan France Ruralités d’améliorer le contexte financier des communes rurales pour leur permettre de répondre aux besoins croissants d’une population en hausse par des outils d’investissements et des moyens de fonctionnement pérennes et dynamiques :
- en accroissant l’effort sur le dispositif de ZRR ;
- en priorisant les communes rurales pour les cofinancements à hauteur de 80 % des investissements dans le cadre de la DETR, de la DSIL et du Fonds Vert.
- en demandant au Parlement de veiller à la traduction de ces ambitions pour le développement du monde rural dans les prochains textes législatifs en poursuivant la réduction des écarts dans les moyens alloués à la DSR et la DSU (encore 600 M€ au détriment de la première).
Elle appelle à une forte mobilisation de ses adhérents et plus largement des communes rurales pour sensibiliser la population et interpeller les parlementaires à prendre le monde rural en considération.