L’un refuse l’investiture socialiste, c’est Mathieu Klein. L’autre se flatte du soutien des Marcheurs, c’est Laurent Hénart. L’un et l’autre font une connerie. Voici pourquoi.
Deux barons de la politique locale vont s’affronter aux municipales des 15 et 22 mars 2020 à Nancy : Laurent Hénart, 51 ans, maire de Nancy depuis 2014, président du mouvement Radical. Et son challenger Mathieu Klein, 43 ans, président du Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle depuis 2014, membre du parti socialiste depuis 1992. Ce dernier s’est officiellement déclaré candidat samedi 23 novembre 2019.
Les deux hommes se connaissent bien. Ils se sont affrontés une première fois en 2007. C’était aux législatives, dans la première circonscription de Meurthe-et-Moselle. Hénart portait les couleurs de l’UMP, Klein celles du parti socialiste. Le score fut serré au second tour : 50,8 % pour Hénart ; 49,2 % pour Klein.
Municipales de 2014
Deuxième confrontation en 2014, pour les municipales. Laurent Hénart tire la liste Aimer Nancy qui se veut une union de la droite. Mathieu Klein a pris la tête de la liste Une Ville Meilleure qui regroupe l’union de la gauche.
Mathieu Klein souffre alors d’un léger déficit de notoriété. Et l’étiquette socialiste, à cette époque, n’a rien de flatteur. Avec Hollande à l’Elysée et Valls à Matignon, les socialistes ont mauvaise presse.
Le résultat est sans surprise. Klein est distancé au premier tour : 40,47% pour Hénart contre 35,75% pour Klein. Au second tour Hénart l’emporte avec 52,01% contre 47,08%.
Rappelons, ironie du sort, qu’un sondage avait pronostiqué exactement l’inverse.
Les européennes de 2019
Mais c’était en 2014. Depuis, le monde a changé. Les Marcheurs ont pris le pouvoir à l’Elysée avec Emmanuel Macron, en 2017. La droite et la gauche, telles que nous les connaissions alors, ont volé en éclats. Les Gilets jaunes sont entrés dans la danse et entendent peser sur le scrutin. Il y a en France 9 millions de pauvres (Insee) et chacun d’eux dispose d’un bulletin de vote.
Cette nouvelle donne politique s’est exprimée dans les urnes aux élections européennes de 2019. Les résultats sur Nancy furent les suivants : La République en Marche et le Modem : 28,27%, Europe Ecologie Les Verts : 17,88%, le Rassemblement National : 11,85%, le Parti socialiste : 9,11%, les Républicains : 8,95%, la France Insoumise : 8,95%.
En d’autres termes, l’onction macroniste apparaît, à la lumière de ces résultats électoraux, comme un excellent tremplin, alors que l’étiquette socialiste semble être devenue un repoussoir électoral.
Équation à plusieurs inconnues
Est-ce en raison de la mauvaise image du parti socialiste dans l’opinion que Mathieu Klein a décliné l’investiture PS ? Est-ce en raison des résultats de LREM aux européennes que Laurent Hénart espère l’emporter ?
Probablement. Mais l’équation est plus compliquée. D’abord, parce que les Marcheurs n’ont plus le vent en poupe comme il y a quelques mois. L’investiture LREM n’est plus la garantie du succès électoral, loin de là. Pire : elle pourrait bien devenir, au fil des mois, un fardeau pour le président du Mouvement Radical.
Ensuite, parce que Mathieu Klein est, lui aussi, macron-compatible. A preuve, il fut approché en 2018, pour rejoindre le gouvernement d’Edouard Philippe.
Mathieu Klein aura du mal à faire oublier qu’il est socialiste depuis 1992 et qu’il fut membre du bureau national du PS en 2008. Renier sa famille politique est souvent contre-productif.
Reste d’autres inconnues. Les autres formations politiques ne souhaitent sans doute pas jouer sur la touche. Quant à André Rossinot, poids lourd de la politique, donnera-t-il un coup de main ou… un coup d’épaule à son ancien protégé ? Enfin, quelle sera l’attitude des écologistes ? Frédéric Maguin s’est déclaré très tôt candidat à la mairie de Nancy. Frédéric Maguin est conseiller départemental EELV au sein de la majorité de Mathieu Klein. Peut-il créer la surprise d’un scrutin couru d’avance ? On l’a vu, les écolos forment désormais la deuxième force politique derrière les Marcheurs.
Voilà pourquoi tout le monde se dit écolo.
Tram, vélo, dodo
A Nancy comme ailleurs, la campagne des municipales se jouera moins sur les étiquettes politiques qui ne veulent plus dire grand-chose que sur les dossiers locaux et concrets, qui prennent en compte la vie et le bien être des habitants. Retour à la proximité.
Le futur tram sera-t-il un infâme bastringue identique à celui de 2002 ? Les entrées de la ville seront-elles toujours thrombosées aux heures de pointe ? Quelle place fera-t-on aux vélos ? Aux piétons ? Comment prendre en compte la quiétude des Nancéiens, le soir venu, quand fleurissent les terrasses extérieures ? Quand les bolides foncent dans les petites rues ? Quand les belles de nuit tapinent autour de la gare et jettent les préservatifs dans les jardins ? Quand il devient difficile de dormir dans ce bordel ambiant ?
Le prochain maire sera celui qui apportera des réponses à ces questions très locales. Et à quelques autres. Un sondage Ifop donne Mathieu Klein gagnant au second tour avec EELV à 53% des suffrages. Mais ce n’est qu’un sondage.
A quatre mois du scrutin, le jeu reste ouvert.