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ONU-Russie : la guerre des communiqués

En juillet 2022, l’Ukraine et la Russie ont signé à Istanbul un accord sur l’exportation des céréales pour éviter les pénuries alimentaires. Mais le dernier communiqué de l’ONU est contesté par la Russie. Explications.

668 navires chargés de céréales ont quitté les ports de la mer Noire, comme ici à Odessa (UnlimPhotos)
668 navires chargés de céréales ont quitté les ports de la mer Noire, comme ici à Odessa (UnlimPhotos)

Dans un communiqué du 19 janvier 2023, l’ONU rappelle que l’accord entre les belligérants, intitulé « Initiative céréalière de la mer Noire » a permis d’alimenter les marchés mondiaux de 17,8 millions de tonnes de céréales et autres denrées alimentaires. Elles proviennent essentiellement d’Ukraine et ont « atteint 43 pays depuis le mois d’août, dont plus de 40% sont des pays à faibles revenus (…). La Chine est le premier destinataire des exportations, l’Espagne est le deuxième et la Turquie, le troisième. »
L’ONU ajoute que 100 navires dans les eaux turques dont 32 attendent d’être inspectés, les autres demandent à être connectés à « l’initiative ». Selon l’ONU, « L’Initiative appelle également à la facilitation d’une navigation sûre pour les exportations d’engrais, y compris l’ammoniac. Des négociations sur la manière d’acheminer l’ammoniac par le pipeline Togliatti/Yuznhy sont en cours. »

« Manipulation des faits »

Le 31 janvier 2023, le ministère russe des Affaires étrangères a cru bon de publier à son tour un communiqué de presse avec des chiffres d’une grande précision évoquant « une manipulation des faits » par l’ONU et dont voici les grandes lignes.

  • « Au 20 janvier 2023, dans le cadre de la mise en œuvre de l’initiative céréalière de la mer Noire, 668 navires avec 18 224 860 tonnes d’alimentation à bord ont quitté les ports d’Odessa, de Tchernomorsk et de Yuzhniy. Dans la nomenclature des cargaisons, 46,1% est du maïs fourrager, 5,9% – du schrot de tournesol, 5,5% – du colza et d’autres cultures fourragères utilisées pour la nutrition du bétail.
    Le blé ne représente que 27,57% de ces livraisons tandis que ce produit est placé au cœur du rapport de l’ONU. L’objectif est clair – présenter des chiffres humanitaires «corrects» sur l’aide accordée aux «économies émergentes» (prétendument 64%), parmi lesquels figurent, pour une raison inconnue, des pays tels qu’Israël, la Corée du Sud et les monarchies du Golfe, qui n’ont manifestement pas de problèmes de développement économique ou d’approvisionnement alimentaire. »
  • « Seules 551 527 tonnes (3%) ont été envoyées aux pays les plus pauvres (Somalie, Éthiopie, Yémen, Soudan, Afghanistan, Djibouti), dont 396 169 tonnes transportées sur les navires affrétés par le Programme alimentaire mondial de l’ONU (2%). Il convient de noter que la part de ces pays dans les statistiques globales est en baisse – dans les 120 premiers jours de l’initiative céréalière, elle était de près de 4%, elle n’est maintenant que de 3%. Il est important de souligner que c’est pour cette raison que l’ONU a hâtivement reclassifié l’initiative de la mer Noire, basculée de l’« humanitaire » à la « commerciale » et a refusé de rendre public des informations sur les destinataires des cargaisons sous prétexte du secret commercial. »

100 navires dans les eaux turques

Le communiqué russe ne confirme pas non plus les données de l’ONU concernant « la présence présumée de plus de 100 navires dans les eaux territoriales turques liés à l’initiative et le temps d’attente moyen de 21 jours. En réalité, il y a actuellement 64 navires amarrés dans les ports ukrainiens et dans les zones d’inspection. La liste qui fixe l’ordre de leur contrôle et de leur passage est établie par la partie ukrainienne, tandis que les représentants russes n’ont aucune influence là-dessus.
Quant au pipeline d’ammoniac Togliatti-Odessa, « Les capacités techniques pour réanimer le pipeline sont en place, et les sociétés qui l’exploitent sont prêtes, assurent les Russes. Il ne manque que le consentement de Kiev, qui bloque les livraisons de matières premières pour les engrais (suffisantes pour nourrir 200 millions de personnes), les subordonnant à toute une série de conditions politiques préalables, allant de la libération de prisonniers de guerre jusqu’à l’aide à la vente de biens volés. Les Nations unies, tout en appelant activement à une augmentation des exportations ukrainiennes de céréales, sont inactives sur cette question particulière, en faisant référence à une certaine négociation en cours. On ne sait pas, cependant, entre qui et à quel sujet, car les représentants russes ne prennent pas part à ces contacts. »

« Les intérêts économiques des Occidentaux »

Conclusion du communiqué russe : « Sous couvert des discours sur les menaces de famine et à la sécurité alimentaire mondiale, ce processus ne sert en fait qu’aux intérêts commerciaux des Ukrainiens et aux intérêts économiques des bénéficiaires occidentaux, notamment par le biais de manipulations et déformations de la situation réelle relative à la réponse aux besoins aigus de l’Afrique, de l’Asie et de l’Amérique latine. »

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