Une grève de 48 heures a été votée au Républicain Lorrain (Metz), un débrayage de 24 heures à l’Est Républicain (Nancy, Besançon) et à Vosges Matin (Epinal) appartenant tous trois au groupe EBRA (Crédit Mutuel).
« Ce matin, nous avons voté la grève pour 48 heures. On n’en peut plus, les services sont exsangues, les gens sont fatigués, stressés, la pression est incessante. On ne peut pas continuer comme ça. » Catherine Belin, déléguée syndicale SNJ à la rédaction du Républicain Lorrain exprime le sentiment de l’ensemble du personnel du quotidien de Metz, réuni ce mardi matin en intersyndicale (CFDT, SNJ, CFE-CGC, FO et Filpag-CGT). Elle poursuit : « Cela fait des années que nous alertons la direction. En vain. Nous voulons simplement faire notre travail sereinement, sans être stressés, sans tomber malade, sans subir la pression permanente qui pèse sur les salariés, journalistes et non journalistes. »
Les limites de la restructuration
Journal du groupe EBRA (10 titres dans 23 départements de l’Est, la Bourgogne et Rhône-Alpes), propriété de la Banque Fédérative du Crédit Mutuel, le Républicain Lorrain emploie 246 salariés dont 114 journalistes (titulaires et CDD), pour une diffusion globale d’environ 84.000 exemplaires/jour.
Le malaise, notamment au sein de la rédaction, n’est pas nouveau. Déjà, en octobre 2019, le personnel du quotidien de Metz s’inquiétait du « démembrement » de leur journal. Ils l’avaient fait savoir bruyamment en distribuant des tracts dans les rues de la ville, mais aussi dans les agences locales du Crédit Mutuel très implanté en Moselle.
La restructuration du pôle presse de la Banque Fédérative du Crédit Mutuel, et spécialement des journaux lorrains et franc-comtois (Le Républicain Lorrain, l’Est Républicain et Vosges Matin) engagée dès 2019 trouve aujourd’hui ses limites. Elle avait pour objectif « d’alléger les titres des charges fixes », d’atteindre de « meilleures productivités et compétitivité » pour « permettre au pôle presse de rester pérenne » déclarait alors à la presse Valérie Noël, DRH du groupe.
« La boule au ventre »
Ce tour de vis s’est traduit dans les faits par une pression sans précédent sur le personnel. Parfois, jusqu’à la rupture : dépressions, burn-out, arrêts maladies, conflits entre salariés sont devenus monnaie courante. La crise sanitaire n’a rien arrangé. « On vient au travail la boule au ventre » avoue discrètement une salariée.
La hiérarchie est évidemment au courant. Mais elle est, elle-même, tenue de rendre des comptes. Chiffrés notamment. Et les chiffres ne sont pas très bons : baisse de la diffusion, baisse de la publicité… La presse ‘’print’’ est dans une mauvaise passe.
À L’Est Républicain aussi
La situation n’est guère plus joyeuse à l’Est Républicain. « On nous demande de faire toujours plus avec toujours moins, explique Julien Bénéteau, délégué syndical CFDT de la rédaction (200 journalistes). Ce n’est plus possible. On est géré à flux tendus en permanence. Aujourd’hui, il y a une grosse mobilisation des journalistes, j’espère que nous serons entendus ! »
Même son de cloche du côté de Besançon. « Le ras-le-bol est général » reconnaît Eric Barbier, délégué SNJ de l’Est Républicain. Nous dénonçons les conditions de travail qui se dégradent et les tensions que cela engendre. La santé des salariés est affectée par la politique austère et le mépris de la direction. Elle fait semblant de ne pas voir, trop enfermée dans son dogme financier. Or, la qualité de vie au travail, le ‘’vivre ensemble’’ au sein des entreprises, documents que nous avons signés en décembre avec la direction, c’était de la poudre aux yeux. Nous voulons sortir de cette spirale négative. »
Le journal de Nancy qui tire environ 100.000 exemplaires/jour est, lui aussi, en perte de vitesse.
L’appel à la grève concerne aussi le personnel de Vosges Matin, à Épinal, où la mobilisation est moins importante qu’à Nancy, Metz et Besançon.
Il faudra attendre ce mercredi matin, 30 mars 2022, pour savoir si les lecteurs retrouveront leur quotidien préféré dans les boites aux lettres.