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Covid-19 : l’infection virale moins fréquente en haute altitude, pourquoi ?

Un article publié dans Frontiers in Physiology tend à démontrer que les populations vivant au-delà de 2500 mètres sont moins sujettes à la Covid-19. L’adaptation au manque d’oxygène permettrait de diminuer l’infection au SARS-CoV-2 par un mécanisme complexe impliquant le système rénine-angiotensine que Jean-Marc Sabatier a souvent décrit ici même.

Nomades_Tibétains (Wikimedia Commons)
Nomades_Tibétains (Wikimedia Commons)

C’est un article très technique de Christian Devaux et Didier Raoult publié ce 25 août 2022 dans la revue scientifique Frontiers in Physiology. Les deux célèbres professeurs constatent qu’un rapport épidémiologique effectué auprès de populations vivant sur l’Altiplano andin en Amérique du Sud (Pérou et Bolivie), sur les plateaux tibétains en Asie et sur les hauts plateaux éthiopiens en Afrique, donc au-delà de 2500 mètres d’altitude, étaient moins concernés par l’infection au SARS-CoV-2. L’hypothèse avancée serait une adaptation à l’hypoxie, ce manque d’apport en oxygène au niveau des tissus de l’organisme. Restait à en comprendre les mécanismes.

Le système hormonal SRA

Les deux auteurs de l’article établissent le lien direct entre l’hypoxie et la sur-activation du récepteur AT1R du système rénine-angiotensine (SRA). Ce système hormonal ubiquitaire dans l’organisme contrôle l’ensemble des organes et tissus de notre corps.
Dans cet article, l’hypoxie réduirait la capacité du SARS-CoV-2 à se fixer et à pénétrer dans les cellules cibles, à l’inverse l’activation de HIF-1α (le facteur induit par l’hypoxie) pourrait réduire les défenses immunitaires antivirales et exacerber les réponses pro-inflammatoires et la thrombose qui sont préjudiciables aux personnes infectées par le SARS-CoV-2.
Or, la Covid-19 provoquée par le SARS-CoV-2 apparue en Chine en novembre 2019, se caractérise essentiellement par une détresse respiratoire aiguë, un orage de cytokines pro-inflammatoires et des événements thrombotiques entraînant de nombreux et multiples dysfonctionnements des organes vitaux pouvant conduire au décès.
« À 4 000 m d’altitude, chaque bouffée d’air ne contient que 60 % des molécules d’oxygène présentes dans la même bouffée au niveau de la mer. L’adaptation à l’hypoxie se fait par la ventilation qui contrôle le volume d’air et d’oxygène délivré dans les alvéoles pulmonaires et conduit à une concentration plus élevée d’hémoglobine des érythrocytes (globules rouges) dans la circulation sanguine qui capte l’oxygène échangé par le système alvéolo-capillaire. »
Ainsi la voie du système rénine-angiotensine (SRA) chez les populations vivant en haute altitude et son déséquilibre en cas de maladies à coronavirus semble une fois de plus confirmée.

La cible du virus

Jean-Marc Sabatier (DR)
Jean-Marc Sabatier (DR)

Depuis deux ans et demi déjà, Jean-Marc Sabatier* affirme que les maladies Covid-19 sont dues à une sur-activation du récepteur AT1R du SRA. Cette sur-activation est due à un excès d’angiotensine 2, insuffisamment dégradée par le récepteur ECA2 qui est la cible du virus.

Selon Jean-Marc Sabatier, en désaccord avec ce qui est décrit dans l’article de Frontiers in Physiology, c’est le récepteur AT1R sur-activé qui est directement responsable de l’hypoxie (stress hypoxique), parallèlement à ses autres activités délétères. L’activation du facteur induit par l’hypoxie n’est qu’une réponse de l’organisme au stress hypoxique, sans lien direct avec une quelconque réduction des défenses immunitaires anti-virales et exacerbation des réponses pro-inflammatoires et pro-thrombotiques.
Rappelons que le récepteur AT1R possède des activités pro-hypertensives, pro-inflammatoires, pro-oxydantes, pro-angiogéniques, pro-fibrosantes, pro-thrombotiques et pro-hypertrophiantes. Tout en inhibant la production de monoxyde d’azote (NO) impliquée dans les phénomènes inflammatoires, immunitaires et mnésiques.

*Jean-Marc Sabatier est directeur de recherches au CNRS et docteur en Biologie Cellulaire et Microbiologie, HDR en Biochimie. Éditeur-en-Chef des revues scientifiques internationales : « Coronaviruses » et « Infectious Disorders – Drug Targets ». Il s’exprime ici en son nom propre.

 

Et si le « SRA » expliquait la Covid-19 ?

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