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Augmenter les salaires, mais sans sacrifier la protection sociale !

Point-de-vue. L’ancien secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert, appelle les candidats à la présidentielle à ne pas promettre tout et n’importe quoi. Même la candidate socialiste, Anne Hidalgo, ne promet plus un doublement du salaire des enseignants, mais une augmentation du SMIC de 15%.

Christian Eckert, ancien secrétaire d'Etat au Budget (DR)
Christian Eckert, ancien secrétaire d’Etat au Budget (DR)

Par Christian Eckert

En écoutant les candidats à l’élection présidentielle, je suis frappé par l’irresponsabilité de certains d’entre eux : comme le pouvoir d’achat semble (et qui s’en étonne face à l’inflation qui ne fait que commencer…) être la première préoccupation des Français, beaucoup recommandent d’augmenter les salaires nets. La méthode est pourtant souvent radicalement divergente et révèle la nature profonde et parfois irresponsable et dangereuse des postulants.

La baisse des charges, comme ils aiment à les appeler, est pour Pécresse et Zemmour l’alpha et l’oméga de la politique salariale. Ne pas toucher au salaire brut (c’est-à-dire le net plus les cotisations sociales), c’est rassurer les dirigeants d’entreprises qui constituent un électorat largement acquis à la droite.

Les carences honteuses

L’ennui, c’est que les mêmes préconisent d’augmenter les crédits consacrés à la Sécurité Sociale, essentiellement vers la santé, la médecine, l’hôpital, et même vers la prise en charge de la dépendance dont l’actualité nous montre les carences honteuses.

Madame Pécresse fut ministre du Budget. Elle n’ignore pas que les charges (que je persiste à appeler les cotisations sociales) financent les dépenses qu’elle prétend augmenter. Le triste Zemmour veut même diviser par deux la CSG qui est une ressource incontournable de la Sécurité Sociale.

Beaucoup de gouvernements ont baissé les cotisations sociales, pour redonner de la compétitivité ou pour redistribuer du pouvoir d’achat. Ceux auxquels j’ai appartenu aussi. Ils avaient tous respecté une loi majeure datant de 1994 portée par Madame Veil (alors ministre de la Santé) qui oblige l’État à compenser à la Sécurité Sociale les chutes de recettes liées à ces baisses de cotisations.

Candidat putatif

Emmanuel Macron, toujours candidat putatif, n’a pas encore affiché de position. Il a pourtant fait pire durant son mandat : la crise des Gilets Jaunes l’a obligé à réduire des cotisations salariales. Son affidé Darmanin a alors, pour la première fois, fait voter par sa majorité une dérogation pour l’État à ne pas compenser les pertes financières à la Sécurité Sociale, engendrant un manque de recettes de l’ordre de 4 milliards !

Tous les électeurs peuvent comprendre que baisser les cotisations affaiblit la protection sociale sauf à reboucher les trous avec d’autres recettes comme les impôts ou la TVA… La crise sanitaire a démontré que le financement des soins était « à l’os ».

Pour le pouvoir d’achat, Anne Hidalgo (et d’autres…) propose d’augmenter le SMIC de 15%. Quelques aménagements de cotisations ciblés et compensées pourraient amortir l’impact sur les prix pour éviter trop d’inflation. C’est évidemment plus responsable et laisse aussi la place à la négociation de l’ensemble des conditions salariales par les partenaires sociaux.

Attention donc à ce que les promesses électorales restent sérieuses et cohérentes. Baisser les cotisations sociales est dangereux si l’équilibre (quasiment atteint avant la crise sanitaire…) des comptes sociaux est compromis. Certains n’attendent que cela pour livrer entièrement le secteur de la santé aux assurances privées.

L’enjeu est aussi de ce côté et doit nous inciter à la vigilance.

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