Cafetiers et restaurateurs de la capitale peuvent étendre leurs terrasses sur la voie publique pour compenser les pertes d’exploitation liées au Covid. Mais parfois les choses dérapent.
Plus que d’autres professions sans doute, les cafetiers-restaurateurs sont les victimes collatérales du Covid-19. Après plus de deux mois de confinement, et pour pallier l’absence de touristes dans la capitale, la mairie de Paris a décidé de mettre en œuvre ‘’un plan de soutien aux acteurs économiques’’. Ainsi, dès le déconfinement à la mi-juin 2020, cafetiers et restaurateurs ont pu « étendre l’occupation du domaine public au-delà des autorisations, de manière provisoire et gratuite ». Ils bénéficient également de mesures financières à savoir la réduction de 50% des droits de voirie pour l’année 2020 et des loyers commerciaux ».
Provisoire et déclaratif
Le système est provisoire et purement déclaratif. Il suffit de créer un compte sur « myparis.fr » et de remplir une déclaration. Le cafetier-restaurateur reçoit alors un récépissé.
En contrepartie, l’exploitant doit afficher et respecter une charte par laquelle il s’engage, notamment, à respecter le protocole de déconfinement, à limiter les nuisances sonores et à exploiter les terrasses ‘’éphémères’’ de 8 heures à 22 heures. Pas au-delà. Il s’engage aussi à libérer les espaces après le 30 septembre.
Plusieurs milliers de terrasses ‘’éphémères’’ se sont vite étalées sur les trottoirs parisiens. Parfois un peu plus largement que déclaré. Parfois un peu plus longtemps. Parfois de façon un peu bruyante, au grand dam des riverains. Mais la mairie a fermé les yeux : des dizaines de milliers d’emplois sont en jeu.
Des P.V. à la pelle
A une exception notable. Rue Montenotte, dans le 17ème, la brasserie La Placette voit arriver chaque jour ou presque des policiers de la Ville de Paris. Ils dressent des contraventions pour « terrasse ouverte non autorisée » ou « installation de tables et chaises constituant des terrasses » etc.
La brasserie est exploitée depuis 2016 par les époux Mangel. A leur arrivée, ils ont transformé leur terrasse ouverte en terrasse fermée agrémentée de différents accessoires : barnum géant fixé au sol, musique … Sans attendre les autorisations municipales.
Trois ans plus tard (en 2019) la régularisation de la terrasse fermée est refusée. Début janvier 2020 : nouvelles demandes de régularisation de la terrasse fermée et de la contre-terrasse. Refusées en mars et juillet 2020. D’où les recours devant les juridictions administratives.
C’est dans ce contexte un peu électrique que les époux Mangel ont installé, il y a une semaine, une terrasse ‘’éphémère’’ après avoir effectué la déclaration d’installation provisoire. Mais la Ville de Paris s’y oppose. Et envoie ses policiers verbaliser jusqu’à deux ou trois fois par jour !
Un paysagiste
Fini ? Pas tout à fait. Ce mardi 28 juillet 2020, le patron de la brasserie a vu arriver, non pas des policiers, comme d’habitude, mais un paysagiste et des engins de travaux publics. Mission : planter un arbre au milieu de la contre-terrasse.
Un coup de force inadmissible et juridiquement contestable puisque les époux Mangel n’ont pas épuisé les recours contentieux, et, surtout qu’ils ont bel et bien déclaré avec le concours de leur expert-comptable qui a réalisé un plan coté comme d’usage l’installation de leur terrasse et contre-terrasse conformément à la délibération (N°2020 SG 17) du Conseil de Paris du 18 mai 2020 relative au ‘’plan de soutien aux acteurs économiques’’ de la capitale.
Leur avocat Maître Philippe Meilhac précise : « en dépit d’une période très difficile sur le plan financier, mes clients ont fait beaucoup d’efforts pour se mettre aux normes en retirant notamment le store qui protégeait la contre-terrasse, et tout le dispositif qui l’accompagnait. Ils respectent les engagements pris dans le cadre du dispositif provisoire prévu par la Ville de Paris, ce qui n’est pas le cas de tout le monde. Un espace suffisant est laissé pour la circulation des piétons, la contre-terrasse est retirée tous les soirs à 22 heures, il n’y a pas de nuisance sonore. Il est invraisemblable qu’ils soient l’objet d’un tel acharnement, et engageront les procédures judiciaires appropriées si cette situation se poursuit ».
NDLR– Nous attendons la réaction de la Ville de Paris que nous avons sollicitée.