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Covid-19 : L’intérêt prouvé de la vitamine D

Une forte dose de vitamine D dès le diagnostic de Covid-19 limite les décès, selon une étude COVIT-TRIAL promue par le CHU Angers et labellisée priorité nationale de recherche par l’État. Explications.

Vitamine D (UnlimPhotos)
Vitamine D (UnlimPhotos)

La vitamine D enfin reconnue efficace pour lutter contre la Covid-19 ! C’est une étude COVIT-TRIAL (COvid-19 and high-dose VITamin D supplementation TRIAL in high-risk older patients) qui l’affirme. Menée par 73 experts et six sociétés savantes réunies autour du Pr Cédric Annweiler, chef du service de gériatrie au CHU d’Angers, et du Pr Jean-Claude Souberbielle du service d’explorations fonctionnelles à l’hôpital Necker-Enfants malades à Paris, cette étude démontre l’intérêt de la vitamine D dans la lutte contre la Covid-19 et ses auteurs appellent à supplémenter l’ensemble de la population française.

Depuis deux ans déjà…

C’est ce que révèle dès mars-avril 2020 une publication scientifique signée, notamment, par Emmanuelle Faucon et Jean-Marc Sabatier. Dès décembre 2020, le Dr Jean-Michel Wendling, conseiller scientifique pour infodujour publiait un papier intitulé « Covid : Les incroyables découvertes françaises« . En janvier 2021, ce titre : « La vitamine D : Un plan massif contre la Covid-19 » dans lequel, déjà, nous évoquions les bénéfices de la vitamine D en ces termes : « Désormais, plusieurs études scientifiques confirment le rôle bénéfique de la vitamine D dans la prévention de la Covid-19 » en évoquant les travaux des Pr Cédric Annweiler et Jean-Claude Souberbielle.
Des infos complétées et argumentées par Jean-Marc Sabatier dans notre article vilipendé par l’AFP-Factuel dans un fact-checking bidon auquel nous avons répondu peu après, point par point.

« Un très haut niveau de preuves »

Aujourd’hui, le CHU d’Angers fait une annonce spectaculaire. « Si la dernière vague de l’épidémie de Covid-19 s’essouffle, les hospitalisations de patients atteints de Covid-19, notamment les plus âgés, n’ont jamais cessé. C’est à ce titre que les résultats de l’étude COVIT-TRIAL, promue par le CHU Angers et labellisée priorité nationale de recherche par l’État, représentent un levier pour les soins des patients âgés à risque élevé de décès. COVIT-TRIAL, dont les conclusions sont publiées dans la revue scientifique Plos Medicine ce mardi 31 mai 2022, montre avec un très haut niveau de preuves l’intérêt d’une forte dose de vitamine D, administrée dans les 72 h du diagnostic de Covid-19, aux personnes âgées fragiles qui ont contracté l’infection. Les résultats rapportent une réduction significative du taux de décès chez les patients ayant reçu une forte dose de vitamine D par rapport à ceux ayant reçu une dose standard de vitamine D. Neuf hôpitaux français et leurs EHPAD ont participé à cette étude initiée par le Pr Cédric Annweiler, chef du service de gériatrie du CHU d’Angers. »

Des propriétés anti-inflammatoires

La vitamine D, hormone naturelle, est connue pour ses effets sur le métabolisme du calcium et le risque de fracture, mais aussi pour ses propriétés anti-inflammatoires dans les maladies infectieuses et cancéreuses. Elle permet par exemple de prévenir les infections respiratoires hivernales, ce qui avait été observé bien avant l’ère Covid-19.
« Nous avons appris assez rapidement pendant la première vague de la pandémie de Covid-19 que le SARS-CoV2 (coronavirus 2) entraîne une dérégulation du système rénine-angiotensine via le récepteur ACE2, porte d’entrée du virus dans l’organisme, provoquant un risque de réactions inflammatoires en chaîne (« orage cytokinique ») et un risque de syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) souvent fatal. Or, la vitamine D a des effets anti-inflammatoires reconnus et participe à la régulation du système rénine-angiotensine. C’est pourquoi nous avons rapidement imaginé, dès mars 2020, que la vitamine D pourrait aider à lutter contre les formes graves de Covid-19 », rappelle le Pr Cédric Annweiler.

Examiner l’efficacité de la supplémentation en vitamine D, la tolérance et la mortalité

L’étude COVIT-TRIAL est donc lancée en avril 2020, durant la première vague Covid-19, avec l’appui de la Direction de la Recherche et de l’Innovation du CHU d’Angers.
Cet essai multicentrique, randomisé, contrôlé, en intention de traiter avait comme objectifs principaux :

  • d’examiner l’effet sur la mortalité à 14 jours de la supplémentation en vitamine D à forte dose par rapport à une dose standard chez des patients âgés atteints de COVID-19 et à risque d’évolution grave.
  • de préciser la tolérance et la sécurité de la supplémentation en vitamine D à forte dose par rapport à la supplémentation en vitamine D à dose standard.

260 patients inclus en France

260 patients sont alors inclus entre avril et décembre 2020 (avant l’arrivée des vaccins en France) par les 9 centres français participants (les CHU d’Angers, Bordeaux, Limoges, Nantes, Nice, Saint-Etienne, Tours, et les CH du Mans et de Saumur) et dans les EHPAD dépendants de ces établissements.
Leur profil ? « Soit des patients âgés de 65 ans et plus atteints de Covid-19 avec des critères d’évolution défavorable (notamment une oxygéno-dépendance), soit des patients âgés de 75 ans et plus atteints de Covid-19 sans autre facteur de risque », précise le Pr Cédric Annweiler.
Ces patients étaient alors répartis au hasard en 2 groupes :

  • le groupe appelé « Intervention » recevait une dose unique de 400 000 UI de vitamine D (= forte dose de vitamine D) dans les 72 h suivant leur diagnostic de Covid-19
  • le groupe appelé « Contrôle » recevait une dose unique de 50 000 UI dans les 72 h suivant leur diagnostic de Covid-19

Investigateurs et patients savaient quel traitement était administré. En parallèle de l’étude, tous les patients ont bien sûr continué à recevoir, dans les deux groupes, les meilleurs soins connus de la Covid-19 (corticoïdes, oxygène, etc.).

L’efficacité de la vitamine D sur la mortalité démontrée dès le 6e jour du traitement

Par rapport au groupe « Contrôle », l’administration de la forte dose de vitamine D dans le groupe « Intervention » a été à l’origine d’une réduction importante et statistiquement significative du risque de décès, et ce dès le 6e jour après le début du traitement c’est-à-dire au moment où l’orage cytokinique est susceptible d’aggraver la maladie.
« Ce résultat est important et cohérent avec ce que nous savions des effets anti-inflammatoires de la vitamine D, en réduisant très significativement le risque de décès à 14 jours, et en évitant manifestement l’emballement inflammatoire et l’orage cytokinique observés dans les formes graves de Covid-19 », observe le Pr Cédric Annweiler.
Cette supériorité d’efficacité de la forte dose de vitamine D perdure effectivement sur la mortalité, toutes causes survenues, dans les 14 jours (critère de jugement principal) sans entraîner plus d’effets indésirables que la dose standard.
À noter que des analyses secondaires montrent une diminution de l’efficacité à 28 jours, ce qui pouvait être attendu compte tenu de la durée de vie de la vitamine D prise en une dose unique en tout début d’évolution de la maladie. L’efficacité d’un traitement d’entretien continu (supplémentation en vitamine D quotidienne ou hebdomadaire) suivant la première prise fera l’objet d’une nouvelle étude.

Les recommandations des auteurs

En tant qu’adjuvant aux traitements standards de la Covid-19, l’administration précoce (dans les 72 h qui suivent le diagnostic) de vitamine D à forte dose constitue un traitement simple et sécure qui démontre son intérêt pour éviter les formes graves de Covid-19 chez les personnes âgées confrontées à l’émergence de nouveaux variants et au risque d’échappement immunitaire.
À l’issue de l’étude COVIT-TRIAL, les auteurs recommandent vivement d’atteindre le plus rapidement possible un statut satisfaisant en vitamine D chez les personnes âgées atteintes de Covid-19, en recourant à une supplémentation en vitamine D à forte dose dès le diagnostic de Covid-19 posé.

Comment la vitamine D peut-elle avoir un effet sur la Covid-19 ?

La vitamine D est une hormone séco-stéroïde. Elle est capable d’activer ou de réprimer plusieurs centaines de gènes, et peut ainsi théoriquement prévenir et/ou améliorer les formes graves de Covid-19 en :

  • modulant l’activité du système rénine-angiotensine et notamment l’expression de l’ACE2 (utilisé par le SARS-CoV-2 pour infecter les cellules hôtes) et en réprimant la synthèse de la rénine. L’ACE2 a des effets protecteurs contre l’inflammation dans plusieurs organes, dont les poumons. Au cours de la Covid-19, la régulation négative de l’ACE2 par le SARS-CoV-2 entraîne une réaction inflammatoire en chaîne, appelée orage cytokinique, qui peut se compliquer d’un syndrome de détresse respiratoire aigu avec un risque élevé de décès.
  • régulant l’immunité cellulaire innée et adaptative : synthèse de peptides antimicrobiens exerçant une activité antivirale directe et action anti-inflammatoire.
  • enfin, l’hypovitaminose D semble constituer un facteur de risque indépendant de forme grave de Covid-19. Ce point est potentiellement très intéressant, car, contrairement aux autres facteurs de risque de forme grave de Covid-19 (âge avancé, obésité, comorbidités multiples) sur lesquels il n’existe que peu (ou pas) de possibilités d’agir, l’hypovitaminose D est un facteur de risque très facilement modifiable par une simple supplémentation médicamenteuse.

La vitamine D, une expertise angevine

Il y a plus d’un an déjà, le 8 janvier 2021, 73 experts réunis autour du Pr Annweiler et du Pr Souberbielle co-signaient un article de consensus dans La Revue du Praticien soutenu par 6 sociétés savantes nationales françaises (*). Ils appelaient à s’assurer que toute la population française ait un taux satisfaisant de vitamine D dans le double contexte de la pandémie de Covid-19 et de la période hivernale au cours de laquelle les taux de vitamine D diminuent naturellement.
Un nombre croissant d’études scientifiques montraient déjà à l’époque que la supplémentation en vitamine D (sans remplacer la vaccination) contribuait à prévenir le risque de formes graves de Covid-19 et de passages en réanimation liés à ce virus.
Les résultats publiés de l’étude COVIT-TRIAL confirment désormais, avec un niveau de preuve élevé, l’efficacité de la supplémentation en vitamine D à forte dose sur la réduction du risque de décès chez les personnes âgées ayant contracté l’infection.

(*) L’Association française de lutte anti-rhumatismale (AFLAR), la Société française d’endocrinologie (SFE), la Société française de gériatrie et gérontologie (SFGG), la Société française de pédiatrie (SFP), la Société française d’endocrinologie et diabétologie pédiatrique (SFEDP), la Société francophone de néphrologie dialyse et transplantation (SFNDT).

Voir aussi la vidéo de Jean-Marc Sabatier

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