Finalement, c’est la vie de plusieurs milliers de frontaliers qui a été négligée, mais aussi le développement harmonieux de l’espace entre la métropole luxembourgeoise et ses voisins français.

Par Roger Cayzelle
président de l’Institut de la Grande Région
« Chacun fait ce qu’il veut et fait sa conférence de presse. Moi, j’ai la mienne. » Cette phrase, prononcée par Xavier Bettel, ministre luxembourgeois des Affaires étrangères, avec le franc-parler et la désinvolture qui le caractérisent parfois, en dit long sur le déroulé de la conférence intergouvernementale (CIG) France-Luxembourg du 11 septembre dernier.
Une conférence intergouvernementale aux résultats décevants
Cette CIG ne figurera pas, en effet, au palmarès des rencontres diplomatiques les plus abouties. Ses conclusions apparaissent confuses et souvent inabouties. Certes, quelques avancées concrètes ont pu être annoncées. Mais, dans l’ensemble, l’impression qui domine est celle d’une nouvelle occasion manquée, voire, pour certains, d’un véritable fiasco. La délégation française a d’ailleurs annulé sa participation à la conférence de presse qui devait se tenir autour de Xavier Bettel et de Benjamin Haddad, ministre délégué chargé des Affaires européennes.
Comment expliquer ces dysfonctionnements ? Même s’il n’est pas facile de décrypter ce qui s’est passé en coulisses, on peut avancer plusieurs hypothèses. Certaines relèvent de l’anecdotique, d’autres touchent davantage à des questions de fond.
Des objectifs mal définis et une stratégie absente
Un constat saute aux yeux : quel était réellement l’objectif de cette commission intergouvernementale France-Luxembourg ? S’agissait-il, comme l’a affirmé Benjamin Haddad, de « faciliter la vie des frontaliers » ou, comme le souhaitaient notamment la présidente du Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle et d’autres acteurs territoriaux, d’examiner plus en profondeur les voies et moyens de construire un développement plus équilibré et plus intégré des territoires réunissant la métropole luxembourgeoise et ses voisins français ?
La préparation, une fois de plus très opaque et sans doute trop rapide côté français, ne semble pas avoir permis de clarifier cette question essentielle ni de préciser véritablement les objectifs poursuivis.
En tout état de cause, et quoi que l’on puisse penser des propositions élaborées par le Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle, ce sont bien ces enjeux qu’il faudra clarifier dans les mois qui viennent. Les Lorrains ne peuvent plus se permettre le luxe d’avancer au coup par coup, en formulant des propositions parfois intéressantes, mais insuffisamment adossées à une stratégie plus affirmée.
Une véritable occasion à saisir
Certains ont pu négliger, voire ironiser, sur la mise en place d’un groupe de travail chargé d’élaborer un véritable schéma de développement entre les différentes composantes de l’espace reliant la métropole luxembourgeoise, les communes du sud du Luxembourg et celles du nord de la Lorraine.
Défendue par Claude Meisch, ministre de l’Aménagement du territoire du Grand-Duché, cette proposition représente pourtant une véritable opportunité pour avancer vers un développement transfrontalier plus harmonieux et plus ambitieux.
C’est un défi que la Lorraine doit évidemment relever. Cela suppose que les acteurs français et lorrains sachent travailler dans la durée, définir une stratégie lisible, portée par une personnalité clairement identifiée, reconnue comme interlocuteur crédible et écouté. Vaste programme, certes, mais qu’il convient d’aborder sereinement, en évitant un certain nombre d’erreurs trop souvent commises. L’avenir d’une grande partie de la Lorraine dépend, en tout état de cause, de notre capacité collective à mieux nous organiser.
Roger Cayzelle (IGR)
