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Reculer l’âge de la retraite est la pire mesure d’une réforme des retraites

Point-de-vue. pour l’ancien secrétaire d’État au Budget, Christian Eckert, « le recul de l’âge légal frappera essentiellement les catégories modestes, et épargnera les autres. »

Christian Eckert, ancien secrétaire d'Etat au Budget
Christian Eckert, ancien secrétaire d’État au Budget

Par Christian Eckert

Mon analyse, souvent partagée au-delà de mes amis politiques, m’a conduit dans un article précédent à affirmer que la réforme n’était pas urgente, pouvait être utile si son objectif était clairement de corriger certaines injustices notoires.
Le Gouvernement tergiverse : tantôt, il prétend que sa réforme a pour but de sauver le régime par répartition, tantôt, il évoque le besoin de faire des économies pour financer d’autres actions…
Mais toujours, pour trouver entre 12 et 20 Milliards d’économies, il avance l’outil du recul du report de l’âge légal aujourd’hui de 62 ans à 64 ou 65 ans.
Passons sur la prétendue concession qui privilégie 64 au lieu de 65, c’est dans tous les cas d’un recul d’au moins deux ans dont on parle. Se replier sur moins pire tente de masquer la dureté de la proposition.
Car sans rentrer dans trop de détails, il est clair que cette mesure impactera presque exclusivement les salariés les plus modestes.

Dans le modèle actuel

Un salarié A né en 1961 doit justifier de 42 années de cotisations pour partir avec une retraite complète à 62 ans. Si M a suivi une formation courte et a commencé à travailler jeune (par exemple à 20 ans) il aura cotisé 42 ans en 2023 et pourra partir en retraite à taux plein à ses 62 ans.
Un autre salarié B né lui aussi en 1961 a fait des études plus longues. Il a commencé à travailler plus tard (par exemple à 22 ans). Pour partir avec une retraite à taux plein, il devra cotiser 42 ans et devra attendre 2025 pour toucher sa retraite à taux plein à ses 64 ans.

Si l’âge de départ est reculé à 64 ans

Le salarié A devra travailler 2 ans de plus.
Pour le salarié B, rien ne change !
Il est clair que dans la grande majorité des cas, les salariés comme A sont des ouvriers, avec des salaires (et donc des retraites) modestes.
Les personnes entrant plus tard dans la vie active (de type B), ont en général des métiers mieux rémunérés et moins pénibles, sont plutôt des cadres et ont une durée de vie plus longue. Ils ont d’ailleurs moins cotisé proportionnellement à leurs revenus compte tenu du plafonnement des cotisations retraites !
Le recul de l’âge légal frappera essentiellement les catégories modestes, et épargnera les autres.
Si l’objectif d’économies (artificiellement mis en avant) est atteint par cette mesure d’âge, l’injustice est criante. Bien d’autres situations démontrent que la mesure d’âge est la pire des solutions. Elle ne corrige aucune injustice et pénalise au contraire celles et ceux qu’une réforme aurait dû avantager.

Les organisations syndicales unies contre la réforme des retraites (Photo credit: manuel | MC on Visualhunt.com / CC BY-SA)
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