En annulant, ce 24 juillet 2025, le Plan local d’urbanisme intercommunal (PLUi) de Metz métropole, le tribunal administratif de Strasbourg inflige un véritable camouflet aux élus métropolitains, au premier rang desquels son président, François Grosdidier. Un message à dix mois des municipales.

« Par un jugement rendu ce 24 juillet 2025, le tribunal administratif de Strasbourg, saisi par des associations de protection de l’environnement et des riverains, a annulé le plan local d’urbanisme intercommunal de Metz Métropole qui avait été approuvé par une délibération du 3 juin 2024 du conseil métropolitain. » Voilà ce qu’écrit le TA de Strasbourg dans un communiqué publié ce matin.
Rarement, un PLUi aura fait l’objet de contestations aussi vives que celui voté le 3 juin 2024 par les élus de Metz métropole (45 communes, 228.000 habitants). Deux associations « Sauvons les Terres du Pays Messin » et « Air Vigilance » ainsi que des habitants de Jury (57245) ont déposé un recours devant le T.A. de Strasbourg sur le fond et un référé-suspensif pour bloquer les projets les plus impactants pour l’environnement. Le 8 novembre 2024, les juges des référés de Strasbourg avaient partiellement annulé le PLUi. On attendait donc le jugement sur le fond : il vient de tomber.
Des irrégularités flagrantes
Delphine Spitz, CGT Moselle (terres.paysmessin57@gmail.com), Céline Moguen, Sauvons les Terres du Pays Messin « (terres.paysmessin57@gmail.com) ainsi que Patrick Klein pour Air Vigilance expliquent dans un communiqué commun les raisons pour lesquelles ils ont saisi le tribunal administratif.
« En contestant ce PLUi, notre objectif était clair : obtenir un document conforme aux règles urbanistiques et environnementales, et réellement à l’écoute des besoins des habitants. Par ce recours, nous avons défendu un quotidien plus juste : avec des logements accessibles à toutes et tous, des services publics de proximité et une nature préservée.
Le PLUi annulé aujourd’hui cumulait des irrégularités, tant flagrantes que plus insidieuses, au point d’en faire un véritable cas d’école des dérives en matière d’urbanisme !
Les habitants de la métropole et le tribunal, ne s’y sont pas trompés.
Nous nous réjouissons que les espaces naturels et la forêt de Mercy soient sauvés.
Cette décision est l’aboutissement d’une mobilisation citoyenne d’ampleur – habitants, associations, syndicats, et forces politiques d’opposition – qui n’a cessé de dénoncer un document tournant résolument le dos à l’intérêt général. En conjuguant expertises juridiques, techniques et citoyennes, ce mouvement a révélé les limites d’un PLUi inapte à répondre à l’urgence climatique et déconnecté des réalités sociales du territoire.
En croyant pouvoir s’affranchir des règles et imposer ses choix de manière unilatérale, la Métropole a sous-estimé la vigilance démocratique. À l’instar d’autres mobilisations en France – contre l’A69, la loi Duplomb, etc. – cette décision de justice constitue un signal fort : aucun pouvoir local ne saurait se placer au-dessus des lois.
Un document illégal, fruit d’un choix politique délibéré
Le tribunal fonde sa décision d’annulation sur les points suivants :
- Des insuffisances graves dans l’intégralité du document et l’ensemble de ces insuffisances ont nui à l’information du public,
- Une incompatibilité avec le SCOTAM notamment sur le projet photovoltaïque de Mercy au vu de la richesse environnementale du site,
- Une incohérence globale dans toutes les pièces du PLUi,
- Une insuffisance de la prise en compte des risques naturels
Les responsables métropolitains ont systématiquement refusé de prendre en compte les très nombreuses alertes émises sur les points retenus par le tribunal, depuis plus de quatre ans, par les services de l’État, le Préfet, la Mission Régionale d’Autorité Environnementale (MRAe), la commission d’enquête ou encore les citoyens.
Les conséquences de l’irresponsabilité des élus métropolitains sont importantes, car beaucoup des PLU sont trop anciens et ne répondent plus à la réglementation en vigueur. Les permis de construire à venir seront ainsi grevés d’une forte insécurité juridique.
Les élus métropolitains vont sans nul doute tenter de faire porter la responsabilité de cette annulation sur les associations et autres opposants, oubliant de dire que c’est bien leur choix politique qui a conduit à la rédaction d’un document illégal, volontairement éloigné des exigences réglementaires. L’irrégularité du PLUi n’est pas un accident : c’est la conséquence d’un contournement assumé des règles, au bénéfice d’intérêts privés.
Près de 5 millions d’euros d’argent public jetés par les fenêtres
Le PLUi a coûté près de 5 millions d’euros aux contribuables. Aujourd’hui, ce document est annulé pour des motifs prévisibles et évitables.
Le tribunal a largement insisté sur le fait que les études et les justifications étaient très insuffisantes. On peut donc se demander à quoi ont servi les millions d’euros qu’ont couté ce PLUi.
Ce gaspillage traduit une gestion déficiente, une absence d’écoute des signaux d’alerte, et une déconnexion de la métropole avec les réalités du territoire. À l’heure où chaque euro public compte, un tel échec est inadmissible.
On peut construire sans détruire la nature : arrêtons les excuses
Le président de Metz métropole va sans nul doute à nouveau se poser en victime, arguant que par la faute des associations et de ses opposants, l’annulation du PLUi va aggraver la crise du logement.
Ces messages sont trompeurs et ne reflètent pas la réalité. Pourquoi ?
- Les règles environnementales s’appliquent à tous et doivent plus que jamais être respectées
- Il existe des solutions pour lutter contre le manque de logements en faisant preuve de sobriété foncière : mobiliser les logements vacants et construire sur friches
- Contrairement aux messages alarmistes martelés par la métropole, l’annulation du PLUi ne signifie en aucun cas un gel des constructions. Ce scénario-catastrophe est infondé.
La balle est aujourd’hui dans le camp de la Métropole, fini le greenwashing. Afin de protéger les zones naturelles agricoles ou forestières, la métropole devra, sans délai, prendre une délibération pour élaborer un nouveau PLUi. Elle pourra ainsi autoriser les projets vertueux (sobres en foncier, écologiquement responsables, répondant aux besoins des habitants) et refuser les projets destructeurs, notamment ceux contribuant à l’étalement urbain ou à l’artificialisation de zones naturelles sensibles. La métropole garde la main pour encadrer l’urbanisation intelligemment et nous y veillerons.
Loin d’être une paralysie, l’annulation du PLUi permet de revenir à un cadre plus raisonnable, mieux maîtrisé, et plus respectueux du territoire et de ses habitants.
Une opportunité de repartir sur de bonnes bases
Cette décision marque un tournant et fera jurisprudence à l’échelle nationale. Le tribunal consacre le rôle central des documents d’urbanisme dans la préservation de l’environnement.
Aujourd’hui, la Métropole a tout à gagner à tourner la page d’un urbanisme à courte vue. Il est temps d’ouvrir un nouveau chapitre, au service de l’intérêt général qui réponde aux objectifs sociaux et environnementaux.
Dès l’automne, nous organiserons des assises pour la reconstruction d’un PLUi qui réponde aux enjeux sociétaux et environnementaux. »