Avec la chute de Benjamin Griveaux, candidat à la mairie de Paris et son remplacement au pied levé par Agnès Buzin, ministre de la Santé, La République en Marche poursuit son jeu de chaises musicales.
Allez, hop ! L’un s’en va, l’autre arrive, la musique continue sur l’air des flonflons. C’est amusant dans une cour de récréation. Mais ce n’est pas un signe de bonne santé politique. Les ministres et autres hiérarques de la Macronie se succèdent depuis deux ans et demi au gré des affaires qui gangrènent la vie politique de notre beau pays.
Dernier changement en date pour cause de sextape, le candidat d’Emmanuel Macron à la mairie de Paris. Piégé ou pas piégé dans une affaire de vidéos et de messages à connotation sexuelle, Benjamin Griveaux a préféré jeter l’éponge par crainte de nouvelles révélations qui viendraient ternir encore davantage son image personnelle, celle de sa famille et celle de son camp politique.
Combat de femmes
Exit Benjamin Griveaux, bonjour Agnès Buzyn. Il a fallu 48 heures au parti présidentiel pour trouver le bon candidat. Et ce fut une candidate. Il est vrai que l’ex-ministre de la Santé présente toutes les qualités professionnelles et politiques pour affronter deux autres Egéries de la vie politique parisienne : Anne Hidalgo à gauche et Rachida Dati à droite. On s’oriente par conséquent vers un combat entre femmes de caractères, notamment au second tour. Un avenir plein de suspense.
Contrairement au Premier ministre, Edouard Philippe, qui conserve son poste pour aller ferrailler au Havre et au ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, qui reste à Bercy tout en allant tenter sa chance à Tourcoing, Agnès Buzin a quitté son ministère de la Santé, en laissant à d’autres le soin de gérer de gros dossiers bien chauds : la crise de l’hôpital public, la réforme des retraites, l’épidémie de coronavirus…
Il a donc fallu, dans l’urgence encore une fois, trouver un remplaçant sur le banc de touche. C’est Olivier Véran qui fait son entrée sur le terrain. Jusqu’alors député (LREM) de l’Isère, ce médecin neurologue est issu du sérail et connaît bien, dit-on, les dossiers difficiles qu’il va devoir gérer. On verra.
Delevoye, Ferrand, Bayrou…
Cela devient une habitude en Macronie de changer les titulaires par des remplaçants. Le 16 décembre dernier, le Haut-commissaire à la Réforme des retraites (auprès de la ministre de la Santé, justement) Jean-Paul Delevoye a été obligé de démissionner après les « oublis » fâcheux dans sa déclaration d’intérêts à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Il avait « oublié » de signaler treize de ses mandats, dont certains étaient rémunérés. Jean-Paul Delevoye a été remplacé au débotté par le député LREM Laurent Pietraszewski.
Une habitude, on vous dit. Car la liste est longue des départs inattendus et des démissions forcées depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Elysée en mai 2017.
Cela a commencé avec Richard Ferrand, ministre de la Cohésion des Territoires. Un mois et deux jours après sa nomination, il est contraint de démissionner, en juin 2017 après les révélations dans la presse sur un conflit d’intérêts présumé lorsqu’il présidait les Mutuelles de Bretagne. Après un temps de purgatoire, Richard Ferrand succèdera à de Rugy au perchoir de l’Assemblée.
Deux jours après la démission de Ferrand, c’est François Bayrou, Garde des sceaux, ministre de la Justice qui démissionne le 21 juin 2017. Il est menacé d’une mise en examen dans l’affaire des emplois fictifs présumés du MoDEm. Ce sera fait quelques semaines plus tard.
… Sarnez, Loiseau, Fessel….
Même punition pour la ministre chargée des Affaires européennes, Marielle de Sarnez, et Sylvie Goulard, ministre des Armées, prises dans la même nasse. Les remplaçants s’appellent Nicole Belloubet (Justice) Florence Parly (Défense) Nathalie Loiseau (affaires européennes) laquelle sera remplacée à son tour par Amélie de Montchanin après sa contre-performance aux européennes de 2019.
Nicolas Hulot fut ministre de la Transition écologique. Mais le 28 août 2018 il jette l’éponge, sans prévenir le président de la République, estimant que les lobbies ont trop d’influence à l’Elysée.
Il est remplacé, dans l’urgence toujours, par François de Rugy, alors président de l’Assemblée nationale. Mais à son tour, celui-ci doit démissionner, après les révélations de son train de vie fastueux lorsqu’il était au perchoir de l’Assemblée. Une indigestion de homards, sans doute. Il a été remplacé par Elisabeth Borne.
Et les autres
On les aurait presque oubliés. Il y eut aussi Laura Fessel, ministre des Sports, démissionnaire « pour raisons personnelles » sans doute liées à la situation fiscale de son époux. Elle a été remplacée par une vraie sportive, Roxana Maracineaunu, ex-championne du monde de natation.
Il y eut encore le départ inattendu de Gérard Collomb, ministre de l’Intérieur et poids lourd du gouvernement qui, en octobre 2018, a préféré quitter la place Beauvau pour reprendre sa mairie de Lyon. Il a été remplacé par Christophe Castaner.
Le départ de Gérard Collomb provoque un mini-remaniement. Françoise Nyssen est remplacée par Franck Riester à la Culture, Stéphane Travert quitte le ministère de l’Agriculture au profit de Didier Guillaume, le ministre de la Cohésion des territoires Jacques Mézard laisse son portefeuille à Jacqueline Gourault, et enfin Delphine Gény-Stephann, la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Economie et des Finances est remplacée par Agnès Pannier Runacher.
Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement est remplacé par Sibeth Ndiaye et Mounir Mahjoubi, secrétaire d’Etat chargé du numérique est remplacé par Cédric O. Griveaux et Mahjoubi voulaient tenter leur chance à la mairie de Paris. Mauvais calcul.
Combien de départs et de remplacements ? Beaucoup et sans doute beaucoup trop en moins de trois ans. A ce rythme, il n’y aura bientôt plus de remplaçants sur le banc de touche. Et plus grand monde pour remplacer les remplaçants.