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La France en colère

Ce ne sont pas seulement les Gilets jaunes qui manifestent ce samedi à Paris. Ce sont tous les Français qui n’acceptent plus les décisions prises sans concertation par un président jupitérien. Tout ou tard, ça va péter.

Gilets jaunes à Paris : des incidents dès le début (capture Euronews)
Gilets jaunes à Paris le 24 novembre 2018 : des incidents dès le début (capture Euronews)

« Nous sommes des gilets jaunes parce que nos comptes sont en rouge. » Cette boutade de Paul Marra, porte-parole des Gilets jaunes de Marseille, en dit assez sur les raisons de la colère des citoyens de la France d’en bas, ces laissés pour compte de la société. Depuis des années ils sont superbement ignorés par la classe politique et ses dirigeants qui, désormais, gèrent le pays comme on gère une start-up. A coups de chiffres, de dette, de ratios et de performances économiques, sans se soucier des hommes et des femmes qui participent aux résultats.
Certes, ce n’est pas nouveau. Mais le phénomène s’est accentué avec l’arrivée de Macron, jeune banquier d’affaires qui ne raisonne qu’en termes de rentabilité. Spécialiste des opérations de fusions-acquisitions chez Rothschild, le brillant jeune homme, nous disait-on, a piloté avec brio le rachat par Nestlé de la branche nutrition infantile de l’entreprise Pfizer (9 milliards d’euros), le mettant à l’abri du besoin jusqu’à la fin de ses jours.

Une OPA inamicale

Grand bien lui fasse. Mais que peut comprendre ce riche banquier d’affaires devenu président de la République, aux souffrances d’une partie de la population qui gagne moins de 1.000 euros par mois ? Ce président qui a grillé toutes les étapes traditionnelles du parcours politique, qui n’a jamais été parlementaire, ni maire, ni conseiller départemental, qui a fait une OPA inamicale sur l’entreprise France, au printemps 2017 avec ses potes de l’ENA ? Peut-il entendre ces dix millions de Français qui ont du mal à joindre les deux bouts, à finir les fins de mois, à payer le loyer, à donner le minimum à leurs enfants ? Peut-il seulement l’imaginer ?
On en doute si l’on en croit ses mots inutilement blessants distillés ici ou là et qui en disent plus long que de grands discours : « les gens de rien… les illettrés… le pognon de dingue pour les minima sociaux »…
Un bon banquier, peut-être. Un mauvais président, assurément.

Sourd et aveugle

Car il fallait être sourd et aveugle pour ne pas entendre et ne pas voir venir cette énorme colère portée par une lame de fond. La preuve, 8 Français sur 10 soutiennent le mouvement des Gilets jaunes selon un sondage Odoxa pour le Figaro du 23 novembre 2018.
Il s’agit d’un mouvement de colère, sain pour la démocratie, une révolte contre les élites qui remet en cause, soit dit en passant, la légitimité du pouvoir issu des urnes du printemps 2017.
Celle du président, bien sûr, mais aussi celle du gouvernement Philippe dont les principaux ministres sont des « bleus », sans background politique, sans expérience du terrain. Mais aussi celle des députés de la République en marche (LREM), des novices, des ‘’incapables majeurs ‘’politiquement parlant, et considérés comme les godillots ou des moutons de Panurge.

Gilets jaunes et gilets Noirs

Rejet des élites, rejet du président, rejet du discours politique qui ne s’est jamais intéressé à eux. Voilà ce qu’exprime cette révolte jaune. Alors, évidemment, il n’est pas question maintenant qu’on les prenne pour des gens responsables. « Ce n’est pas au gouvernement de nous dire où nous devons manifester » a lancé Priscillia Ludosky, l’une des porte-parole des Gilets jaunes. Elle refuse qu’on parque la manif au Champ-de-Mars. « Ce sera certainement autour de l’Elysée car c’est un site symbolique représentant l’Etat » dit-elle.

Trop tard !

Cette détermination et ces incertitudes inquiètent Castaner, ministre de l’Intérieur. Mais aussi tout l’exécutif. Car les Gilets jaunes pourraient être rejoints par les Gilets noirs, ces professionnels de la castagne des fins de manifestation. Et cela pourrait faire du vilain.
Quoi qu’il en soit, le mouvement citoyen des Gilets jaunes continuera de pourrir la vie du président et du gouvernement dans les jours et les semaines qui viennent. Et ce n’est pas le discours du président Macron, mardi 27 novembre 2018, qui éteindra l’incendie. Quel que soit le message. Il est trop tard.
Ce que veulent les Gilets jaunes ? Certes, une amélioration de leur pouvoir d’achat. Mais surtout, ils veulent faire plier Macron, déboulonner la statue de Jupiter, le faire tomber de l’Olympe et le ramener à la réalité du monde. A défaut de lui couper la tête.
Après le Black Friday, le Black Saturday ?

Emilien Lacombe

« Macron, démission »

Les Gilets jaunes rencontrés sur les Champs Elysées à Paris ce samedi expriment tous le même souhait : le départ de Macron.

Gilets-jaunes-manif-paris-24-nov-18- (photo Madeleine Proust)
Gilets-jaunes-manif-paris-24-nov-18- (photo Madeleine Proust)

« Nous ne sommes pas des casseurs. Nous sommes-là parce que nous en avons marre, marre de ne pas être entendus, marre d’être pris pour des cons. On va continuer, demain et les jours suivants. »
Comme ce gilet jaune qui se trouve sur les Champs Elysée, ils sont nombreux à manifester, parce qu’ils n’en peuvent plus de ne pas pouvoir vivre décemment, marre des impôts et taxes qui ne sont plus supportables.
«  Nous sommes en colère pour que nos enfants ne vivent pas la galère qui est la nôtre, explique une dame venue de Bretagne. On ne veut pas qu’ils aient une vie misérable à cause de ces gens de l’Elysée et de Matignon ».

« Macron dégage »

Tous les Gilets jaunes qui défilent dans les rues de Paris, semblent vouloir la même chose : la démission du président de la République. De nombreuses pancartes portent l’inscription « Macron, démission » ou « Macron dégage ». Ils n’acceptent pas son intransigeance, sa façon de parler au peuple. Ils sont nombreux, ces Gilets jaunes que nous avons rencontrés à ne plus accepter les décisions de président de la République et de son gouvernement.
Le bras de fer est loin d’être terminé.

Madeleine Proust (à Paris)

 

Gilets jaunes, manif à Paris le 24 novembre 2018 (photo Madeleine Proust)
Gilets jaunes, manif à Paris le 24 novembre 2018 (photo Madeleine Proust)
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