Quel avenir pour le château ? Les élus du Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle en décideront ce lundi 3 février. Mais le collectif « Un château pour tous » dénonce déjà « l’absurdité » des projets.
Décidément, le château de Lunéville donne bien des soucis au Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle. Le projet d’installation d’un complexe hôtelier de luxe dans la partie noble du château avait soulevé une vague d’indignation, en novembre dernier, et provoqué -notamment- l’intervention de l’ancien ministre de la Culture, Jack Lang, auprès du président du Département, Mathieu Klein. Exit donc, l’hôtel de luxe.
Ce lundi, 3 février 2020, les Conseillers départementaux sont convoqués au château pour une session extraordinaire. Au menu : « Le projet de développement du château de Lunéville » (voir ci-dessous). Après un rappel historique des actions menées depuis le terrible incendie de 2003 et des dépenses à la charge du Département entre 2003 et 2017, le projet de délibération liste « les activités culturelles et patrimoniales du Château de Lunéville depuis 2017 » et rappelle « la philosophie de l’offre culturelle ».
En 2020, « le château continuera à proposer une offre culturelle riche, variée et exigeante, dans l’esprit de la programmation des deux années passées » précise le texte.
Nouveau projet en trois actes
Vient ensuite le nouveau projet de développement pour le site. On lit : « Le comité de pilotage, qui s’est réuni le 24 février 2018, a permis d’engager l’étude de pré-programmation pour la préfiguration du projet du château de Lunéville. Sur un montant de 114.840 € TTC, la répartition financière qui a été validée par les partenaires pour cette étude est la suivante :
Département de Meurthe-et-Moselle 40% (45 936 €)
Région Grand Est 12% (13 781 €)
Etat (DRAC) 12% (13 781 €)
Ville Lunéville 8% (9 187 €)
CCTLB 8% (9 187 €)
Caisse des Dépôts 20% (22 968 €)
Le projet de délibération annonce ensuite l’avenir en trois actes :
« Acte 1 – A partir de 2020 : l’objectif est de lancer et réussir l’événement festival autour du fil rouge « l’art du geste et le geste de l’art » en 2021, avec un engagement financier dès 2020. Le fil rouge a été choisi en lien avec l’histoire du château et du territoire lunévillois, mais qui permet aussi de mettre en valeur les savoir-faire passés et présents dans le Grand Est, dans l’air du temps et potentiellement créateur d’activités nouvelles et dans lequel les associations présentes au château pourront se retrouver…
Ce fil rouge s’incarnera dans un festival (expositions, conférences, résidences…), préparé par une direction artistique qui sera recrutée dès 2020, sur la base d’un marché de prestations intellectuelles.
Restauration des cours d’honneur
Le festival sera reconduit en 2022. Le coût estimé est de l’ordre de 1,95 M€ TTC par festival avec une participation attendue de 127 900 € pour le Département en 2020.
(…) « Parallèlement, des premiers travaux seront enclenchés, principalement pour donner une nouvelle image de l’entrée du château avec la restauration des cours d’honneur et des communs » Coût estimé 2,3 M€.
« La seconde opération concernera la restauration du corps central (galerie) ainsi que la salle des Trophées (…) Coût de cette opération est estimé à 5,7 M€ TTC. »
Acte 2 – A partir de 2024 : l’objectif est de développer le projet culturel dans son volet historique, patrimonial et contemporain et y associer les premiers services avec boutique et restauration.
(…) Les travaux concernant la restauration et l’aménagement des espaces liés au parcours de visite du projet culturel (expositions et musée) seront lancés. Le coût est estimé à environ 38 M€ TTC.
Acte 3 – A partir de 2025 : l’objectif est de développer les activités économiques sur le site, location d’espaces, d’ateliers, formation, hébergement, restauration, etc. qui s’avéreront opportunes. (…)Le coût est estimé à environ 83 M€ TTC.
Ce projet de délibération a d’ores et déjà fait l’objet d’une levée de boucliers de la part du Collectif « Lunéville un chateau pour tous » que nous publions dans son intégralité.
Communiqué du Collectif citoyen « Lunéville, un château pour tous ».
« Château de Lunéville : après le complexe hôtelier de luxe, le festival de l’absurde est ouvert ! »
« Décliné en trois actes, ce projet élaboré au terme d’une étude déjà facturée 114.500 € aux contribuables du département, est amputé du volet contesté de l’implantation d’un complexe hôtelier de luxe dans les appartements ducaux. Notre action a assurément contribué à ce retrait. Nous nous en réjouissons car l’économie locale, à commencer par le secteur de la restauration et de l’hôtellerie, souffre déjà assez de la baisse d’activité du château depuis 3 ans.
Pour pallier ce manque, les élus auront à se prononcer sur la création d’un festival des métiers d’art (au moins le 365ème en France…) d’un coût annuel estimé à près de deux millions d’euros (1,95 M€) avec un hypothétique et sommaire plan de financement engageant l’État et les collectivités sur 3 ans. Aucun détail si ce n’est le recrutement d’une direction artistique courant 2020.
2,3 millions d’euros
Le festival de l’absurde se poursuit avec la programmation des travaux de restauration qui commenceraient dès 2020 avec les cours du château. Coût estimé : 2,3 M€ d’euros. Chronique d’une gabegie financière annoncée : les cours restaurées seront sans aucun doute complètement à refaire quand démarreront les travaux de restauration des façades et toitures des communs nord et sud ainsi que de la charpente du corps central proche de l’état de péril.
Ce calendrier à l’envers pour des travaux estimés à 83 millions d’euros est soumis au vote des élus départementaux sans aucun plan de financement ni projet culturel et économique sérieux à la hauteur du site et de son environnement social et économique.
Pourtant le département dispose d’études sérieuses, notamment sur les jardins – dont le début de la restauration est repoussé à 2030 – mais qui fera l’objet d’une étude diagnostic dès cette année (montant non communiqué).
« Déjà vus »
Faisant table rase du passé et des engagements de l’assemblée départementale en 2009 et 2012 sur des projets fédérateurs (délibérations votées à l’unanimité) l’exécutif du département renie non seulement ses propres engagements mais aussi ceux conclus avec de précieux partenaires dont le CNAM, l’Université de Lorraine et le réseau international des jardins de lumières ou d’experts reconnus.
Loin de renforcer l’identité et l’ancrage territorial du château, le département persiste dans des projets hors sol et « déjà vus », aux coûts non maîtrisés mais assurément budgétivores. Et il se prive du bon sens et de l’expertise de nombreux contributeurs rétribués ou bénévoles qui œuvrent et ont œuvré depuis plus de vingt ans pour que le château soit porté par un projet s’inscrivant dans une vision à long terme. Nous croyons à l’intelligence collective. Le temps est donc venu d’engager une véritable concertation. »