L’enjeu est de taille dans ce pays aux liens étroits avec la France et dans lequel plus des trois quarts de la population a moins de 35 ans. Scrutin, dans quatre mois!
Les forces en présence
L’élection d’un nouveau chef d’État en Cote d’ivoire arrive à grands pas. Le 31 octobre prochain, les électeurs de ce pays de 26 millions d’habitants vont se rendre aux urnes pour choisir un nouveau Président. Le scrutin est le même qu’en France : majoritaire à deux tours pour un mandat d’une durée de 5 ans.
Qui pour succéder à Ouattara ?
Après 10 années au pouvoir Allassane Ouattara a annoncé qu’il ne se représenterait pas. Mais en mars dernier l’actuel président, formé aux États-Unis et soutenu par la France, désigne tout de même son poulain. C’est l’actuel Premier ministre Amadou Gon Coulibaly qui défendra les couleurs du parti majoritaire le Rassemblement des Houphouétistes pour la démocratie (RHPD).
A la tête du gouvernement depuis 2017, Coulibaly est un ancien conseiller technique de Ouattara. Les deux hommes se sont rencontrés dans les années 1990 et ne se sont plus jamais quittés. L’actuel premier ministre, qui vient tout juste de rentrer dans son pays après un long séjour médical à Paris, devrait bénéficier des réseaux mais surtout suivre pas à pas la politique conduite par le Président sortant.
Ennemi de son ami
Face à lui : la grande inconnue.
En octobre 2019, un autre homme politique de premier plan, Guillaume Soro, rend publique sa candidature. Mais depuis, il a le plus grand mal à mener campagne et doit surmonter de lourds obstacles.
Il faut dire que le torchon brule entre les anciens compagnons de route. Soro, 48 ans, qui fut un ancien chef rebelle, était très proche d’Alassane Ouattara. Il l’a même aidé à prendre et conforter son pouvoir en 2010. Soro fut son Premier ministre jusqu’en 2012 avant de prendre la Présidence de l’Assemblée Nationale.
Mais depuis la confiance s’est brisée. Les amis d’hier sont aujourd’hui ennemis.
En novembre dernier, Guillaume Soro, qui vit en France, annonce son retour en Côte d’ivoire. Et c’est là que tout bascule.
Le 23 décembre dernier alors que son jet vient de décoller à destination d’Abidjan, Soro est informé qu’un mandat d’arrêt international est lancé contre lui. Motif officiel : « tentative d’atteinte à l’autorité de l’État et à l’intégrité du territoire national ».
L’avion change son plan de vol, atterrit au Ghana et repart quelques heures plus tard à destination de la France. Hasard du calendrier : le mandat est délivré 2 jours seulement après la visite officielle d’Emmanuel Macron à Abidjan.
Six mois plus tard, un tribunal condamne le même Soro à 20 de prison pour une affaire de détournement de fonds publics qui remonte à 2007.
Le Retour des « vieux » ?
Il devrait se décider d’un jour à l’autre. Henri Konan Bédié, 86 ans, pourrait se représenter. Celui que l’on surnomme le « Sphinx de Daoukro » vient d’accepter d’être candidat à l’investiture de son parti le PDCI-RDA. Il avait été élu Président de Côte d’Ivoire de 1993 à 1999 avant de laisser la place à un certain Laurent Bagbo.
Ce dernier n’a pas dit son dernier mot. Acquitté par la Cour Pénale Internationale en janvier 2019, qui le jugeait pour « crimes contre l’humanité », assigné à résidence en Belgique, Laurent Bagbo 75 ans, pourrait tenter de revenir au premier plan. Une alliance a d’ailleurs été signée l’an passé avec Konan Bedie. Mais tout comme Guillaume Soro, il devra participer à une course d’obstacles. Même si la CPI a accepté d’alléger son contrôle judiciaire, Laurent Bagbo doit désormais faire face à la justice de son pays. Il vient d’être condamné à 20 ans de réclusion pour le « braquage » de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest pendant la crise de 2010-2011.
Frédéric Crotta