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Oscaro.com : 120 salariés sur le carreau mais pas de plan social.

EXCLUSIF– Le leader de la vente de pièces automobile sur Internet pourrait-il partir à la casse ? Ou comment les méthodes américaines se jouent des lois françaises.

Oscaro.com (photo DR/Crotta)

Les salariés d’Oscaro.com sont inquiets. Si certains ont réussi à conserver leur poste, d’autres ont fait les frais de méthodes radicales de leur employeur.  Environ 120 départs sur 600 employés mais sans plan social.
Lancée en 2003, la société Oscaro.com est renommée pour la vente de pièces automobiles neuves à bas prix. Mais à l’été dernier, elle connait quelques difficultés de trésorerie. Certains clients ont parfois du mal à se faire rembourser et s’en plaignent sur les réseaux sociaux. Mauvais pour l’image de marque.
S’estimant victime d’une campagne de dénigrement, le fondateur de la marque, Pierre Noel Luiggi est alors contraint de céder une partie de ses parts au groupe PHE – qui gère entre autres la marque AD- mais surtout filiale de Bain Capital, un fonds d’investissement américain qui brasse des milliards.

Le vaccin BCG

Pour tenter de soigner Oscaro, Bain décide de réinjecter plus de 26 millions d’euros et surtout d’inoculer un vaccin : le BCG, le Boston Consulting Group un énorme groupe de consulting. Une dizaine de spécialistes débarquent au siège Boulevard Hausmann. Sous la houlette de Philippe Nobile nommé manager de transition ils prennent les rênes de chaque département, scannent le malade et font l’état des lieux. Commence alors une grosse opération de nettoyage.
L’ambiance dans l’entreprise se plombe assez vite. Dans une lettre à la direction que nous nous sommes procurée un cadre exprime son désarroi. Il avoue s’être mis aux antidépresseurs et dénonce : « un rabaissement constant par les équipes de consultants en place, la rétention d’informations, l’exclusion des processus de recrutement de postes susceptibles d’intégrer mes périmètres, la « politique » omniprésente qui privilégie la flatterie aux actions (et qui) sont en train de me consumer et je ne peux endurer plus longtemps ce harcèlement moral. » Ambiance.

Vers la sortie

Plus grave. Ce ménage au sein de la société est à la limite de la légalité. En contradiction en tout cas avec le droit du travail. En l’espace de quelques mois près de 120 personnes sur un effectif de 600 seront dirigés vers la sortie. Parfois sans discernement : le service marketing essentiel pour une entreprise de commerce électronique est ainsi décimé, s’étonnent les salariés.
« Trois quarts des départs le sont à l’initiative des salariés. Il y a eu beaucoup de fins de contrat et des démissions » claironne Jan Loning. Mais le nouveau patron d’Oscaro.com oublie de préciser que c’est surtout par le biais de ruptures conventionnelles et de licenciements transactionnels que s’est organisée cette hémorragie.
Comment l’inspection du travail chargée de surveiller les procédures a-t-elle pu ne rien voir et accepter autant de départs sans mettre le holà ? Nous l’avons sollicitée, en vain.

PSE obligatoire

Car tout cela ressemble à s’y méprendre à un plan social qui ne veut pas dire son nom. La loi est pourtant claire : au-dessus de 10 départs en un mois – jusqu’à trois mois – un PSE est obligatoire (art L1233-61 du code du travail).
Le BCG, qui n’a pas souhaité répondre à nos questions – a choisi de passer outre : cela lui aurait pris beaucoup trop de temps en négociation avec les représentants syndicaux et l’inspection du travail.
Si la nouvelle direction affirme vouloir relancer la société -elle se vante d’une trentaine de recrutements- le principal actionnaire qui lui non plus n’a pas souhaité s’exprimer, n’a pas fait part publiquement de ses intentions. Une vente par exemple ?
Tailler dans les effectifs pour présenter un bilan séduisant et un EBITDA rutilant à un éventuel repreneur pour une vente ?
Dans tous les cas cela s’appelle « habiller la mariée. »

Frédéric Crotta

A qui appartient oscaro.com?  »Photo DR Crotta)

A qui appartient Oscaro ?

Oscaro.com, l’une des pépites françaises du e-commerce a été fondée par Pierre-Noel Luiggi. Ce patron corse dont on avait annoncé le départ est finalement resté après le rachat en novembre dernier. Il détient encore 15% de cette société désormais passée sous la coupe d’Auto Distribution qui se définit comme « le n°1 de la pièce auto ». Auto Distribution est une marque parmi d’autres de Parts Holding Europe (PHE) leader de la distribution indépendante de pièces détachées pour Véhicules Légers et Poids Lourds en Europe de l’Ouest, présent en France, en Belgique, aux Pays-Bas, au Luxembourg et en Italie.
Le propriétaire d’Auto Distribution est un fonds d’investissement américain Bain Capital. Basée à Boston cette société dont les actifs s’élèvent à environ 100 milliards de dollars a été créée par deux hommes : le premier, Mitt Romney, un ancien missionnaire mormon fut l’ancien adversaire de Barack Obama à la présidentielle de 2012. L’autre, Bill Bain, a été entre autres vice-président du… Boston Consulting Group.

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