La 17ᵉ chambre correctionnelle du tribunal de Paris a relaxé l’opposant thionvillois poursuivi en diffamation par Roger Schreiber, adjoint au maire de Thionville chargé de l’urbanisme et président du syndicat des transports urbains.
L’affaire est déjà ancienne et la décision du tribunal de Paris, du 25 octobre 2024, est passée inaperçue. Mais elle s’inscrit dans ce brouillard politico-économique qui enveloppe depuis longtemps la ville de Thionville et ses environs. Rappelons le contexte.
Refondre le plan de transport
Le réseau de transport du Thionvillois et de la Fensch est géré par le Syndicat Mixte Intercommunal des Transports Urbains de Thionville et de la Fensch, regroupant 35 communes. Ce SMiTU gérait directement depuis 2013 son réseau par l’intermédiaire d’une société publique (SPL) dénommée « Trans-Fensch ». En 2014, le SMiTU a lancé le projet d’un futur transport en commun en site propre (TCSP) inspiré du Mettis messin pour un coût de 120 millions d’euros et livrable en 2019.
En octobre 2017, Roger Schreiber, élu président du SMiTU, a lancé des études visant à refondre le plan de transport pour faire des économies devant permettre de financer deux ouvrages d’art sur la commune de Thionville. Le projet prévoyait la mise en service du bus à haut niveau de service (BHNS) rebaptisé Citezen. Le budget s’est alourdi de 80 M€ pour atteindre 200 M€ alors que les subventions plafonnaient à moins de 10%.
Le nouveau plan, mal pensé, a tourné à la catastrophe, provoquant une grave désorganisation générale des transports en communs sur le nord-mosellan. Au point que, sous la pression des usagers, Roger Schreiber a dû remettre en place l’ancien réseau.
Le dessous des cartes
C’est dans ce contexte que Yan Rutili a fondé le 3 octobre 2020 une association intitulée USAG ThiFensch dont il a été élu Président. À sa demande, fut créé un « comité des partenaires » de la gestion des transports. Or, ce comité n’a pas été consulté avant une réunion, le 23 novembre 2020, au cours de laquelle fut décidée la cession au privé du réseau public des transports. Il y avait quatre candidats. La société Kéolis a été préférée à la Transdev dans des conditions contestée par Yan Rutili.
D’où ses vidéos sur les réseaux sociaux au cours de laquelle il révèle les dessous de l’affaire. Il affirme : « Voici comment les élus du Syndicat des Transports Thionville-Fensch ont volontairement choisi de gaspiller 11 millions d’euros » en moins de 5 ans.
Rutili prend en compte 3,3 M€ relatifs au surcoût de Kéolis et 7,2 M€ relatifs à de la location de bus sur la durée de la délégation.
Il poursuit : « Keolis, dont la SNCF est l’actionnaire majoritaire, a été choisi pour gérer les bus alors qu’ils étaient 3,5 millions plus chers que leur concurrent Transdev. Or, des rencontres ont eu lieu entre le Maire de Thionville et le Président France de la SNCF peu de temps avant que Keolis obtienne le marché. Un mois après la privatisation des bus, ils tombaient curieusement d’accord sur la valeur des friches ferroviaires de la rive droite pour y construire un parking… »
Il ajoute : « On peut donc se demander si la SNCF n’a pas perçu une sorte de rétro-commission de 3,5 millions d’euros pour accepter de vendre les terrains servant au parking… »
Yan Rutili explique aussi que le marché public aurait été truqué. Les élus ayant voté non pas pour le moins cher (Transdev) mais pour celui que, selon Rutili, on voulait privilégier car, précise-t-il « les élus n’avaient pas les bonnes informations… Nous avons perdu 11 M€ en une heure de réunion ».
Le 2 octobre 2023 Roger Schreiber démissionnait du SMiTU, non sans avoir obtenu au préalable la protection fonctionnelle qui lui permettait de déposer une plainte en diffamation contre Yan Rutili, le 3 juin 2021, aux frais du contribuable.
Roger Schreiber n’est pas cité
« Ainsi, il ressort clairement des propos poursuivis que c’est le SMITU qui constitue la cible principale de la charge de Yan RUTILI, explique le tribunal dans son délibéré, le prévenu ayant recours, pour le reste, soit à des tournures impersonnelles n’impliquant personne en particulier, soit à une mise en cause collective des élus, ayant pris une décision unanime, sur le fondement d’informations jugées incomplètes. L’unique personne nommément citée est Pierre Cuny.»
Le tribunal souligne « Ainsi à aucun moment les propos poursuivis ne citent le nom de Roger Schreiber ou ne mettent en cause son action, ni en son nom propre, ni même à travers sa qualité alléguée de président du SMiTU. Ce dernier, syndicat mixte doté de la personnalité morale, ne se confond en tout état de cause pas avec la personne de son dirigeant supposé. Dès lors, les propos poursuivis ne sont pas diffamatoires à l’endroit de Rober Schreiber et Yan Rutili sera renvoyé des fins de la poursuite. »
Le tribunal a considéré que les propos tenus par Rutili étaient « purement descriptifs » et donc conformes à la réalité.
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