Une série d’intrusions et de survols non identifiés secoue l’Europe depuis septembre 2025, ravivant les tensions entre l’Alliance atlantique et Moscou. Mais l’attribution de ces incidents soulève de nombreuses questions. Mais les drones suspects ont subitement disparu…

Des violations répétées de l’espace aérien européen
L’Europe de l’Est connaît depuis la mi-septembre une multiplication inquiétante d’incidents aériens. Le 19 septembre, trois chasseurs MiG-31 russes armés ont pénétré l’espace aérien estonien pendant plus de dix minutes avant d’être interceptés. Cet événement a poussé Tallinn (capitale de l’Estonie) à invoquer l’article 4 du traité de Washington, déclenchant des consultations d’urgence entre membres de l’Alliance.
Cette intrusion s’inscrit dans une série de provocations touchant plusieurs pays du flanc oriental : Lettonie, Lituanie, Finlande, Norvège, Roumanie et Pologne, cette dernière ayant subi une intrusion massive de drones moins de deux semaines auparavant.
Le Conseil de l’Atlantique Nord a dénoncé une « violation dangereuse » et « irresponsable ». Mark Rutte, secrétaire général de l’OTAN, a averti : « La Russie porte l’entière responsabilité de ces agissements, qui risquent de conduire à une escalade et mettent des vies en danger. »
Mais sur quoi fonde-t-il sa menace ?
L’opération Eastern Sentry en réponse
Face à cette situation, l’Alliance a lancé le 12 septembre l’opération Eastern Sentry, visant à renforcer sa posture défensive sur le flanc est avec un déploiement accru de moyens aériens pour la défense antimissile et la surveillance. L’OTAN a réaffirmé son attachement à l’article 5 du traité, stipulant qu’une attaque contre un membre constitue une attaque contre tous.
Une campagne hybride multiforme
Au-delà des violations aériennes directes, l’OTAN accuse Moscou de mener une campagne d’interférences GPS. Plus de 700 incidents ont été recensés en Suède depuis fin août, avec des perturbations notables dans les États baltes et en mer Noire. Le 22 septembre, des drones suspects ont survolé l’aéroport de Copenhague, obligeant le Danemark à suspendre tous les vols. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a dénoncé sur X « une violation de l’espace aérien danois par la Russie ».
Une vague européenne de survols de drones
Fin septembre et début octobre, plusieurs pays européens ont été confrontés à une multiplication de survols de drones. En Allemagne, plusieurs aéroports, dont celui de Munich ont dû être fermés brièvement, entraînant des annulations massives de vols et poussant le gouvernement à créer une unité spécialisée de défense anti-drone.
La Scandinavie a également été touchée, avec des suspensions temporaires d’aéroports à Copenhague, Aalborg et Oslo. En France, la base militaire de Mourmelon-le-Grand a été survolée les 21 et 22 septembre. La Belgique et la Lituanie ont signalé des incidents similaires.
Des précédents embarrassants
Plusieurs « incidents » attribués initialement à Moscou se sont révélés faux. L’affaire concernant l’avion d’Ursula von der Leyen s’est avérée être une fake news. Une attaque sur la Pologne par un prétendu missile russe, dénoncée à l’ONU avec images à l’appui, concernait en réalité un missile polonais, probablement détourné par le brouillage GPS.
L’enquête allemande sur le sabotage du gazoduc North Stream, longtemps attribué à la Russie par les pays occidentaux, a récemment interpellé les auteurs présumés : c’était un coup des Ukrainiens.
L’énigme de l’attribution
Face à ces incidents répétés, plusieurs hypothèses sont envisagées : tests de capacités de détection, attaques hybrides, espionnage, actes de malveillance par des groupes non étatiques, voire simples confusions. Les experts soulignent la difficulté d’attribuer formellement ces survols sans preuve technique solide.
Les autorités européennes renforcent leurs systèmes de détection avec des radars spécialisés, capteurs acoustiques et caméras infrarouges. Sur le plan juridique, plusieurs gouvernements travaillent à clarifier les règles d’engagement pour neutraliser les drones intrus.
Qui a intérêt à cette escalade ?
La question centrale demeure : quel intérêt aurait la Russie à mener des attaques frontales contre l’OTAN alors qu’elle est déjà engagée sur le front ukrainien ? S’engager sur deux fronts simultanément paraît peu stratégique. Le Kremlin a démenti tout envoi de drone sur les pays européens.
En revanche, l’Ukraine s’est spécialisée ces derniers mois dans la fabrication et l’utilisation de drones et de missiles. Elle est en passe de devenir la « Silicon Valley » de la Défense grâce à la start-up Fire Point, capable d’envoyer ses engins à plusieurs milliers de kilomètres. Titiller l’OTAN en laissant croire qu’il s’agit de manœuvres russes pourrait pousser les Occidentaux à entrer directement dans le conflit russo-ukrainien.
Dans ce contexte de guerre de l’information, la prudence s’impose face aux raccourcis hâtifs, aux accusations sans fondement et aux mensonges inhérents à tout conflit.