Alors que l’Occident inflige de lourdes sanctions économiques à la Russie, la France et l’Europe paient le prix de la soumission à l’Amérique. Les jours qui viennent seront difficiles pour les Français.
RTE, le réseau de transport d’électricité, l’a annoncé le 18 novembre 2022 : il y a bien un risque de coupures d’électricité dès le mois de janvier 2023 si l’hiver est rigoureux. Elles seront temporaires et programmées, tempère Thomas Veyrenc, directeur exécutif, en charge du pôle Stratégie, Prospective et Évaluation de RTE.
La présidente de la Commission de régulation de l’énergie, Emmanuelle Wargon, confirme « qu’il faudra être vigilant en janvier, surtout si les températures descendent trop. » En principe, il n’y aura pas de black-out, c’est-à-dire une grande panne, comme en 1978, mais des délestages, donc des coupures ciblées, à certaines heures et dans certaines zones géographiques. Les hôpitaux et les prisons ne seront pas impactés, on comprend pourquoi. Les Français seront informés de la situation en temps et en heure par le site et l’application Ecowatt.
Le rationnement de l’électricité
Comment en est-on arrivé là ? La première raison, c’est la guerre en Ukraine qui a fait exploser le prix du gaz. Même si la France n’est pas la plus grosse consommatrice de gaz russe (environ 20%) certains pays d’Europe sont tributaires de Gazprom, parfois à hauteur de 50, 60 ou 80% comme c’est le cas en Allemagne.
Or, une partie de l’électricité que nous vendait l’Allemagne était produite par des centrales à gaz. D’où le rationnement de l’électricité dans toute l’Europe. Et le retour au charbon, comme à Carling, en Moselle, avec la centrale Émile-Huchet.
L’embargo décidé par les occidentaux sur le gaz et le pétrole provenant de Russie a eu pour autre effet, mécaniquement, de faire exploser le prix de l’énergie dans des proportions très inquiétantes. Au point de mettre en péril les économies européennes. C’est l’effet boomerang de décisions absurdes prises par l’Amérique que les pays de l’OTAN ont suivies aveuglément. Et, pour faire bonne mesure, le sabotage du gazoduc Nord Stream II, le 27 septembre 2022, prive les pays européens de gaz pour de nombreuses années.
Le parc nucléaire français délabré
Une autre raison de la pénurie d’électricité en France tient au délabrement de notre parc nucléaire.
« En France, l’électricité a représenté 24,5 % de l’énergie finale en 2021. Les centrales nucléaires ayant fourni 69 % de l’électricité, comme en 2020, elles ont couvert 17 % de l’énergie finale en 2021 » écrit le rapport 2022 sur l’état de l’industrie nucléaire.
Il y a un an, un contrôle de routine dans la centrale nucléaire de la Vienne a permis de détecter un problème de corrosion sur des tuyaux pouvant déclencher un problème de sûreté. La centrale a été fermée. Pourtant, dans les jours suivants, le même problème est apparu sur deux autres centrales. Puis trois, quatre, cinq… Ce sont actuellement 12 centrales qui sont à l’arrêt pour les mêmes raisons de corrosion. À cela, s’ajoutent aux travaux habituels de maintenance de sorte que, désormais, la moitié de nos 56 réacteurs est à l’arrêt.
La situation est dramatique pour l’Europe et donc pour la France. Le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bezieux se dit très inquiet et redoute un « risque de faillites massives liées à la crise de l’énergie ».
Tout bénef pour les États-Unis
Les États-Unis, qui portent une lourde responsabilité dans la décision des sanctions prises contre la Russie, a tout à gagner de notre malheur. D’abord, la lointaine Amérique ne risque pas grand-chose des missiles que la Russie et l’Ukraine se balancent depuis le 24 février 2022. (La grande majorité des Américains ne sait pas où se trouve l’Ukraine). Mais surtout, elle s’enrichit honteusement en nous vendant du gaz naturel liquéfié à des prix exorbitants.
La France est devenue le plus gros acheteur au monde de GNL américain. Ce que dénonçait il y a peu le ministre de l’Économie Bruno Le Maire : « Le conflit en Ukraine ne doit pas se solder par une domination économique américaine et un affaiblissement de l’UE. Nous ne pouvons pas accepter que notre partenaire américain vende son GNL 4 fois le prix auquel il le vend à ses industriels. »
Ajoutons à cela manque de terminaux méthaniers en France : on en a que 4 et ce n’est apparemment pas suffisant. D’où la décision d’en créer en urgence un cinquième au Havre. Mais le projet a soulevé une grosse polémique qui risque de faire capoter le projet.
Ces tarifs insensés du GNL ont pour conséquences d’aggraver la crise économique en Europe, de faire grimper le prix des matières premières, des denrées alimentaires, de l’inflation… Si le froid s’installe cet hiver, le risque est grand que les entreprises ferment les unes après les autres, du petit boulanger de village qui ne pourra plus payer l’électricité de son four à pain jusqu’aux grosses usines métallurgiques grosses consommatrices d’électricité… Les ménages ne pourront ni se chauffer ni se nourrir correctement. La réaction des Français serait alors terrible pour ses dirigeants.
Il est temps de comprendre que l’Europe et en particulier la France doivent se détacher de l’influence américaine qui mène une guerre économique permanente contre toute la planète et pour seul et unique profit.
L’ignorer relève de l’ignorance la plus crasse. Ou de l’hypocrisie criminelle.
Les sanctions de l’UE contre la Russie
"Il n’y aura pas de black-out, assure Emmanuelle Wargon. Le pire qui peut se produire, ce sont des coupures ciblées". Elle est "très convaincue que le premier jour ‘éco watt rouge’, tout le monde prendra ça au sérieux et les comportements changeront". pic.twitter.com/ikZG0NdzdO
— franceinfo (@franceinfo) November 19, 2022