La droite est empêtrée dans l’incroyable affaire Fillon. Elle réfléchit à un plan B. La gauche réformiste fait valoir « un droit de retrait » pour ne pas soutenir Hamon. A deux mois et demi de la présidentielle, la confusion est à son comble.
Commentaire. Après un quinquennat Hollande sans grand relief, on s’acheminait doucement vers l’alternance. La droite allait succéder à la gauche, presque naturellement. On commençait à distribuer les postes. Mais voilà, la politique réserve parfois de belles surprises.
Il y a eu les primaires. Le leader de droite, Nicolas Sarkozy, ancien président de la République, a été éliminé au premier tour. Son challenger, Alain Juppé, éliminé au second tour par un François Fillon sur lequel on n’aurait pas parié un euro quelques mois plus tôt.
L’ancien Premier ministre, brillamment élu, se préparait au combat final. En défenseur des droits et de la morale. On se souvient : « Ceux qui ne respectent pas les lois de la République ne devraient pas pouvoir se présenter devant les électeurs. Il ne sert à rien de parler d’autorité quand on n’est pas soi-même irréprochable. Qui imagine le général de Gaulle mis en examen ? »
Et puis, il y a eu les révélations du Canard Enchaîné, le 25 janvier 2017. François Fillon, le candidat intègre, honnête, incorruptible, probe, droit, irréprochable, celui-là même qui, depuis son fief de Sablé-sur-Sarthe se plaçait dans l’ombre du général de Gaulle pour stigmatiser la corruption, le voilà victime d’une bombe à fragmentation.
L’ancien député, l’ancien sénateur qu’il a été, aurait payé son épouse, Pénélope, pour… rester à la maison. Et son pote Marc Ladreit de Lacharrière, le propriétaire de la Revue des Deux Mondes, l’aurait payée 5.000 € brut pour un emploi tout aussi fictif. Le Canard du 1er février 2017 précise que Pénélope Fillon aurait touché au cours de ces années de dur labeur plus de 900.000 euros ! On apprend aussi par le journal satirique que deux enfants du couple auraient été rémunérés, eux aussi, comme attachés parlementaires quand ils étaient étudiants ! 84.000 euros.
La démocratie, chez les Fillon, ressemble à une petite entreprise familiale qui ne connaissait pas la crise. Cela fait désordre quand on se place délibérément dans le camp des honnêtes gens contre les voyous de la politique.
Du coup, la droite est complètement paniquée. Si François Fillon ne peut pas être mis en examen sans le vote de l’Assemblée pour lever son immunité parlementaire, rien ne s’oppose à ce que son épouse le soit. Les conséquences politiques seraient les mêmes. Catastrophiques.
Qui pour remplacer Fillon dans la course à l’Elysée ? Peut-être François Baroin, le maire de Troyes ?
PS : la fracture
A gauche, ce n’est pas mieux. Le parti socialiste est en pleine décomposition. On se garde bien, d’ailleurs, de commenter les déboires de Fillon. Les tripatouillages sur les chiffres de la participation du premier tour de la primaire, ne permettent pas de fanfaronner.
D’autant que le PS a d’autres chats à fouetter. Il s’agit avant tout d’éviter l’éclatement du parti entre deux visions antagonistes et irréconciliables de l’économie, du travail, bref, de la politique. Au point que les réformistes fidèles à Manuel Valls, refusent désormais de soutenir le programme trop à gauche de Benoît Hamon. Une vingtaine de députés ont fait valoir leur « droit de retrait » de la campagne visant à soutenir Benoît Hamon. Ils refusent d’apporter leur soutien à un candidat qui promet d’abroger la loi Travail, qui prône l’instauration d’un 49.3 citoyen, qui plaide pour l’instauration d’un revenu universel…Et, surtout, qui refuse d’assumer le bilan du quinquennat !
Beaucoup lorgnent du côté d’Emmanuel Macron qui se dit « ni de droite, ni de gauche » même si son programme reste encore flou. Cette désertion serait fatale au parti socialiste. D’autant que la frange plus à gauche du PS pourrait être séduite à son tour par le programme de Jean-Luc Mélenchon. Le candidat de « la France insoumise » est donné en quatrième position dans les sondages. Avant Benoît Hamon.
Le coup de balai
Dans ce bordel ambiant, les honnêtes citoyens ont de quoi être déboussolés. Quelle image peuvent-ils avoir de la politique quand les élus les plus cupides se servent de leur mandat pour s’enrichir et enrichir leur famille ? Quand ils trichent sur le nombre de militants, les veilles de congrès ? Quand ils bourrent les urnes ? Quand ils placent leur argent dans les paradis fiscaux ? Quand ils font des lois pour se mettre à l’abri des foudres de la Justice ? Quand ils servent les intérêts des puissants en contrepartie de petits et de gros avantages ? Bref, quand ils oublient l’intérêt général ?
De nombreux Français, déçus par les élus, préfèrent ne plus aller voter. D’autres font le choix de l’extrême droite, même s’il n’y a rien de mieux à en attendre. Mais beaucoup attendent avec gourmandise ce moment propice où ils pourront enfin donner un grand coup de balai sur tous ces professionnels de la politique qui sont en place depuis 10, 20, 30 ans et plus. Pour leur plus grand profit. Pour notre plus grande misère !
Un coup de balai ou un coup de pied au c… Ah! qu’est ce que ça ferait du bien à la démocratie !
Marcel GAY