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« Le gouvernement a choisi l’affrontement »

Les annonces du Premier ministre sur la réforme des retraites n’a pas convaincu les syndicats. Bernard Aubin, secrétaire général du syndicat de cheminots First analyse ici les principaux points de l’intervention du Premier ministre.

Bernard Aubin, secrétaire géénral du syndicat First (Twitter)

« Le temps est venu de construire un système universel des retraites », « Nous proposons un pacte pour les nouvelles générations »
Et un système universel de salaires, des conditions de travail identiques pour tous, le même type de logement pour tous, les même vacances pour tous, les mêmes médias pour tous… A quand la prochaine étape ? Nous voilà de retour sous un régime communiste, impulsé par des libéraux. Le monde à l’envers. Entrevoir ainsi isolément l’avenir des régimes de retraites et des régimes spéciaux sans tenir compte globalement des compensations du travail sous toutes leurs formes repose dur un schéma intellectuel délibérément fallacieux.

« La France n’a pas fait le choix du chacun pour soi », « La France d’aujourd’hui veut être une France de solidarité (…) Je ne veux pas de cette rhétorique guerrière, je ne veux pas de ce rapport de force ».
Le rapport de force est le résultat de l’obstination du Gouvernement à mener à terme une réforme qui, sur le fond, n’a reposé sur aucune concertation. Les 22 réunions d’échanges avec les partenaires sociaux n’avaient pour finalité que de traiter des mesures d’accompagnement d’une réforme contestée dans ses grandes lignes. Dans ces conditions, aucune négociation ne peut aboutir. Les syndicats ont toute légitimité à s’opposer aux reculs sociaux qui sont ainsi envisagés.

« Cette réforme ne doit pas être une bataille », « Il n’y aura ni vainqueur, ni vaincu (…) Je le dis aux Français qui s’interrogent sur notre projet, nous sommes peut-être en désaccord sur certains points, mais l’ambition d’universalité portée par le gouvernement. ‘’
Non, dans le conflit actuel, il y aura un perdant et un gagnant. En s’interdisant toute marge de manœuvre sur le fond même de sa réforme, le Gouvernement a délibérément choisi l’affrontement. Il joue son va-tout. Les syndicats aussi. Ce sera soit démission, soit une avalanche de reculs sociaux sans précédent. Malheur au perdant !

« Le système sera le même pour tous les Français (…) Ce sera un système en points et non en trimestre ».
Il s’agit là d’un recul structurel sans précédent. Dans les pays où la retraite par point a été mise en place, les pensions ont baissé à l’âge de départ équivalent. Personne n’est dupe. C’est bêtement mathématique.

« La valeur du point sera fixée par les partenaires sociaux et ne baissera jamais », « Nous mettons fin aux régimes spéciaux avec calme et détermination », « La réforme touchera également la totalité des politiques, des élus, des ministres ».
Qu’attendre de la parole donnée par des responsables politiques qui ont trahi pour accéder au pouvoir ? La seule manière de garantir les niveaux de pension des retraités dans le temps, c’est de maintenir le système en place ! Que les élus soient touchés de la même manière ne légitime en rien une démarche fondamentalement rétrograde pour tous. Le nivellement des droits vers le bas, même pour les politiques, reste un principe qui se doit d’être combattu, sauf à en devenir tous les victimes. C’est justement le but.

« Le temps du système universel est venu, celui des régimes spéciaux s’achève »
Alain Juppé avait tenu les mêmes propos en 95. La balle est désormais dans le camp des salariés. S’ils poursuivent et amplifient leur mobilisation, ils ont tout à gagner. Sinon, ils ont tout perdu. Leurs pensions, mais aussi tous les autres acquis sociaux qui ne manqueront pas de disparaître les uns après les autres.

« La pension minimale sera de 1.000 euros net par mois pour une carrière normale au Smic », « Les femmes seront les grandes gagnantes du système universel. Aujourd’hui, leurs pensions sont inférieures de moitié à celles des hommes (…) Nous accorderons des points supplémentaires pour chaque enfant. Il sera accordé à la mère. »
Des dispositifs en faveur des mères ont été supprimés lors des dernières réformes… Sans doute aussi pour des raisons d’équité ? Attention à ce type d’annonce qui dissimule souvent des conditions d’accès très restrictives !

« Une majoration de 5% par enfant sera accordée aux mères dès le 1er enfant », « Il s’agit d’un progrès majeur. 80 000 femmes sont contraintes d’attendre 67 ans pour liquider leur retraite car elles n’ont pas assez travaillé »
Avec une retraite calculée sur l’ensemble de la carrière, cet « avantage » ne compensera sans doute pas les pertes occasionnées par le nouveau mode de calcul. De qui se moque-t-on ?

« Jusqu’à 120.000 euros annuels, tout le monde cotisera », « Plus de solidarité, c’est faire contribuer les plus hauts revenus »
Il est normal que tout le monde cotise ! Et au-delà de 120 000 euros, certains ne cotiseraient plus ?

« La gouvernance du système sera confiée aux partenaires sociaux ».
Oui, avec l’épée de Damoclès d’un Gouvernement qui légiférera à la première occasion.
Il « n’y a pas d’agenda caché ». C’est une « transformation respectueuse des intérêts de chacun »
Sans doute, comme toutes les réformes menées jusqu’à présent ! Le sens du mot « respect » n’est pas le même pour tous. Pour certains, ce « respect » est synonyme de mépris…

« Nous garantirons l’âge minimal de départ à la retraite à 62 ans. C’est un principe de liberté auquel nous voulons rester fidèles », « La responsabilité, c’est certes travailler un peu plus, mais c’est aussi entendre les organisations syndicales qui nous demandent de protéger ceux qui ne peuvent pas travailler plus », « La seule solution est de travailler un peu plus longtemps »
Avec l’instauration de l’âge pivot, les futurs pensionnés seront soumis à double peine. Un calcul de la retraite qui débouchera mathématiquement sur une pension inférieure. Une seconde réduction du montant si le salarié désire partir à l’âge minimal de départ !

« Ceux qui ont travaillé tôt pourront partir deux ans avant les autres ». « Les personnes qui exercent des « métiers usants » pourront partir eux aussi deux ans avant les autres.
Des promesses sur la reconnaissance de la pénibilité ont accompagné toutes les réformes menées jusqu’à présent, pour ne jamais déboucher sur une réelle réduction du nombre de trimestres travaillés pour accéder au taux plein de pension…

« Je suis favorable à l’idée de déplafonner les droits liés à la pénibilité pour se former ou terminer sa carrière à temps partiel », « La transition entre les 42 anciens régimes et le nouveau système est un défi considérable et je comprends qu’il puisse inquiéter. »
La suppression des Régimes Spéciaux est effectivement un défi personnel que s’est lancé le Président de la République. Non pas pour « sauver » les retraites, encore moins pour plus d’équité. Ce challenge, il se l’est avant tout imposé pour nourrir son ego surdimensionné, et pouvoir afficher qu’il a réussi où les autres ont échoué. Et tant pis si la France est secouée de tous les côtés ! Lamentable !

« Une fois lancé, le système à points sera simple et pratique »
Simple, rapide, rétrograde, calamiteux, pervers… Pratique aussi pour nourrir grassement les organismes privés… par ceux qui pourront se les payer !

« Pour les personnes qui sont dans la vie active, nous ne changerons rien pour ceux qui sont nés avant 1975 »
Et on casse tout pour les générations à venir ! Sacré conception du progrès social !

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