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Réforme de la SNCF (5)

C’est une analyse longue et sans concession à laquelle se livre ici Bernard Aubin, secrétaire général du syndicat des cheminots First. Il décortique les tenants et les aboutissants de la réforme de la SNCF.

SNCF: La situation très préoccupante selon le synducat FiRST (DR)
SNCF: La situation très préoccupante selon le synducat FiRST (DR)

 

Appuis et oppositions
Le décor planté, venons-en aux éléments susceptibles de soutenir la réforme de la SNCF. Côté décideurs politiques, hormis quelques petits partis qui défendent courageusement les cheminots, députés et autres décideurs partagent en grande majorité des convictions de Droite libérale… Le libéralisme, c’est justement l’une des plus grandes causes des difficultés de la SNCF. Leur approche est toujours la même : il faut privatiser tous les services qui ne fonctionnent pas (ou qui ont été délibérément cassés) et ça ira mieux demain. Et si ça ne fonctionne toujours pas, c’est que l’on a pas été assez loin dans la même direction. Inutile, donc, d’attendre du soutien de ce côté.

Ensuite, pschitt

La position des syndicats d’accompagnement sera déterminante. Leur stratégie habituelle est connue. Jouer les gros bras tout d’abord et dénoncer, aux côtés des autres organisations, les aspects des réformes qu’ils jugent inacceptables. Puis menacer de faire grève, toujours aux côtés autres syndicats. Et parfois même aller jusqu’à la menace ultime : le dépôt d’un préavis…
Ensuite, pschittt… Pas d’appel à la grève, le retrait du préavis parce que « notre détermination a permis d’obtenir des garanties »… Et « grâce à notre action constructive, nous avons réussi à tout sauver sans un jour de grève »… Sauf que cette fois, il y aura du boulot… Pour la sauvegarde du Statut, du régime spécial, et du tiers du réseau, il faudra être particulièrement convaincant… Ou assumer clairement sa résignation, ce qui aurait le mérite d’être honnête et presque respectable.

Concernant l’opinion publique, des voix s’élèvent dès à présent pour sauver les voies, à savoir les 9000 km menacés. L’approche très perverse des rapports Spinetta et Duron n’aura pas non-plus échappé aux élus locaux. Bien sûr les rédacteurs ne recommandent en aucun cas de fermer des lignes… Uniquement de concentrer les investissements à venir sur les principaux nœuds ferroviaires. On connaît la suite.

Condamnation à mort

La sentence est donc prononcée au niveau national : condamnation à mort par étouffement du tiers du réseau. Mais, habiles, les rapporteurs transfèrent les missions de juge d’application des peines et de bourreaux aux Régions… dont les présidents sont enchantés d’assumer les conséquences de décisions nationales sur leurs électeurs. Aux élus de terrain de juger de la pertinence socio-économique des petites lignes, exclues des investissements nationaux, et de faire les bons choix, avec un portemonnaie vide. Heureusement, le Gouvernement a offert une hache au bourreau sous forme de décret. Il s’agit de la possibilité, pour les Régions, de prendre en charge les petites lignes… Notamment pour les transformer en sites propres pour de nouveau modes routiers de transports collectifs… ceux-là même qui ont été présentés lors des Assises Nationales de la Mobilité. La boucle est bouclée, mais à part cela, rien n’était écrit d’avance.
En attendant, ni les élus régionaux, ni les associations d’usagers n’apprécient la plaisanterie et sont d’ores et déjà montés au créneaux, après avoir étudié les impacts liés au rapport sur leur périmètres respectifs… Et souvent, ça décoiffe ! Le cadeau est pour le moins empoisonné !

Retournement de l’opinion

Parmi les opposants aux projets figurent aussi quatre syndicats de la SNCF qui appellent ou appelleront à coup sûr à la grève et à manifester le 22 mars. Au-delà de cette date, ils auront tout intérêt à éviter la multiplication de journées de grève isolées. Cette stratégie avait lourdement fragilisé les capacités de mobilisation des cheminots en 2014. En cas de déclenchement de conflits sur la durée, ils devront également intégrer le risque lié au retournement d’une opinion publique… que ne manquera pas d’alimenter le gouvernement. Un Gouvernement qui, au passage, prend le risque de cumuler les attaques contre les agents du public sur une même période…

(A suivre)

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