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Lettre du mois de décembre 2022 d’Aurore Kepler à Gaïa

Notre planète Terre, Gaïa chez les Grecs, considérée comme un être vivant, correspond régulièrement avec une autre planète de l’univers, Aurore Kepler 452 B dans la constellation du Cygne. Gilles Voydeville nous fait découvrir cette magnifique correspondance interstellaire.

Dr Gilles Voydeville
Dr Gilles Voydeville (DR)

Lettre du mois de la Glaçure des eaux serpentines sur Kepler

Ma chère Gaïa

Je te remercie pour ta lettre du mois des Brumes Laiteuses. Tu es toujours perturbée par l’ours de l’Oural qui a pris la place de ton petit virus dans tes préoccupations quotidiennes. Tu aurais pu le considérer comme un régulateur de ta pollution qui par son action, supprime et supprimera quelques centaines de milliers de Charmants. Peut-être encore plus s’il persiste dans son délire hallucinogène de faire éclore un nouveau champignon géant. Mais tu n’aimes pas la guerre dont la brutalité ne donne à personne le temps de s’habituer à ses funestes conséquences et dont la violence est source de multiples souffrances. Tout finira, même nous. Mais en attendant, la jouissance de moments de sérénité, l’indolence et la lente accoutumance à l’idée de la disparition finale peuvent autoriser une forme de bonheur.

De toutes les manières, la loi de la vie c’est d’affronter une succession de dangers et d’en triompher puis de disparaître. « Dura Lex, sed Lex ».

Il est dommage que cet ours qui vient d’être déclaré « terroriste » par tes états d’Europe, n’éprouve pas la fascination que le terroriste éprouve pour sa propre disparition. C’est parce qu’il n’en est pas un. Il ne se confronte pas à sa fin.

C’est un criminel de guerre, point.

J’ai réfléchi au comportement de celui qui massacre en se sacrifiant : il est tout simplement fasciné par la volupté de défier la grande faucheuse. Il la provoque doublement, en s’en moquant puis en agissant comme elle, mais avant qu’elle n’ait décidé de le faire. Pour tes Charmants comme pour mes Ovoïdes, la mort appartient au cycle de la vie et ne doit être ni à redouter ni à apprécier. Mes Ovoïdes vont d’eux même au batteur quand leur heure est venue.

Tes Charmants vont au mouroir avec résignation.

La mort n’est pas à craindre car elle ne navre plus celui qu’elle concerne car il n’en a plus conscience. Alors que décider de sa propre mort par une action violente au service d’une cause, héroïse son auteur. Cette mort le magnifie et le range dans une élite à laquelle peu de gens accèdent car peu osent se suicider. Elle le délie de ses obligations quotidiennes, du respect des mœurs et des conventions, elle le libère de ses angoisses de décrépitude et bizarrement de sa crainte de la finitude, car il la recherche. Le passage à l’acte, instant difficile et redouté, est facilité par la croyance en un au-delà meilleur et c’est pourquoi ton terroriste est souvent religieux ou qu’il le devient pour se donner du courage. Car l’acte en lui-même est plutôt rebutant, effrayant, sanglant et s’il s’éternise, réputé douloureux. Il nécessite d’être guidé, épaulé par la croyance en une survie paradisiaque de l’âme qui chez certains des tes croyants est plutôt la concrétisation de leurs fantasmes terrestres.

Il est cependant plus facile à accomplir en pressant sur un bouton qu’en découpant son prochain au sabre pour finir en se fouraillant le plexus…

Il y aura toujours des terroristes qui, sous un prétexte quelconque, sacrifieront les autres pour justifier leur mort qui doit être d’autant plus glorieuse que leur vie a été ordinaire.

L’ours lui tue sans se sacrifier, il cherche à entrer dans l’histoire comme un grand conquérant sans oser affronter le geste autodestructeur du terroriste : il est plus lâche que les illuminés, il le masque sous l’agitation d’une virilité de guignol. Il est le fourbe qui envoie ses congénères au casse-pipe. Le terroriste a le courage d’en finir avec lui-même, ce qui débarrasse une fois pour toute les autres de son existence.

Rêver d’égaler Pierre le Grand, la Grande Catherine ou Ivan le Terrible est d’un autre temps.

Poursuivre la quête d’un Rodion Romanovitch Raskolnikov, alors que son créateur, ton Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski, voulait illustrer les dangers d’une mésinterprétation des signes du destin, montre les complexes dont cet apparatchik est la victime.

Changeons de sujet car nous lui faisons toutes deux trop d’honneur en lui consacrant le temps de nos réflexions. Ton annonce d’une neuvième vague de dissémination orchestrée par ton petit chéri le virus couronné de diadème doit te réjouir. Il est vraiment résilient et ne s’avoue jamais vaincu. Et il lance ses assauts sans se préoccuper des saisons, des cycles ou des éléments extérieurs.

Non, il est fidèle à sa maxime : « Toujours prêt, toujours vaillant, jamais lassé, jamais rassasié ».

J’ai appris que ton oncle Xi faisait par ailleurs les frais de la ténacité de ce microscopique allié. Je sais depuis longtemps que cet oncle onctueux et matois gouverne ses provinces d’une main de fer dont les doigts sont des barreaux assez puissants pour enfermer des millions d’opposants. Malgré la puissance incommensurable du grand parti de l’oncle Xi, qu’un si petit être puisse le faire vaciller sur ses fondements est une nouvelle rafraîchissante, divertissante et tout simplement réjouissante. Je pense que si la jeunesse du pays de l’oncle Xi prend conscience de sa force, malgré les risques, elle défiera le pouvoir d’autant plus qu’elle ne connaît pas le traitement sanglant de la révolte précédente qui a été nié et dissimulé. L’oncle au masque de cire a une politique zéro Covid, mais c’est une politique prétentieuse car comment supprimer les virus qui sont les plus nombreux habitants de ton globe et sans doute les plus anciens car parmi les premiers organismes à s’y être développés.
J’ai le sentiment qu’un haut responsable de la Santé du Peuple Chinois va bientôt nous faire une déclaration monocorde sous les traits figés d’une marionnette du pouvoir.

Il rebaptisera ton petit chéri pour changer de politique sans désavouer la précédente.

Ceci permettra une reprise des activités industrielles et commerciales malgré la présence du dernier mutant de Sars-Cov 2. J’en imagine le nom de baptême : Activ-1. Oui Activ-1, le gentil virus qui va permettre la reprise de toutes les pollutions de Charmant. La politique Zéro Covid va pouvoir laisser sa place à la nouvelle : Total Activ dont la promotion va faire des délices de communication :

« Travaillez ensemble sans crainte car le parti a dominé la nature et la dangerosité d’Activ-1 s’est évanouie. »

« Respirez avec bonheur cet air nouveau qui stimule les décideurs autant qu’il libère les travailleurs. »
« Ne craignez pas ce variant véniel et sachez que les morts à venir ne seront que la conséquence des aléas de la vie… »

A ce sujet, la polémique concernant l’origine de ton petit virus Sars-Cov 2 n’est toujours pas éteinte. Comme tu me l’avais conté, sachant que d’une part personne n’a jamais trouvé d’animal infecté sur les marchés de Wuhan, sachant que d’autre part il se tient quotidiennement des milliers de marchés d’animaux vivants dans tout le pays et ce sans foyer de propagation, enfin en apprenant l’existence à Wuhan de trois laboratoires manipulant les virus de chauve-souris, on peut raisonnablement tirer la conclusion que tout ceci ressemble à un accident de laboratoire.

Si l’on rajoute l’exceptionnel équipement de ce virus possédant un site du clivage de la furine – qualité introuvable chez les virus naturels – qui avait fait l’objet en 2018 d’un projet de recherche, finalement retoqué, promis aux laboratoires de Wuhan, on peut avoir de forts doutes sur l’origine naturelle de cette acquisition. Il faut savoir que – afin de ne pas se faire subventionner pour des projets qui s’avéreront sans avenir – les projets présentés par les équipes scientifiques pour recevoir des bourses cachent très souvent des études déjà en cours.

Charmant aime les risques.

Il continue à cultiver des virus hautement mortels pour sa race, soi-disant pour prévenir de nouvelles épidémies résultant de mutation, alors qu’il n’en a jusqu’à présent tiré aucun bénéfice. Et que si, ma chère Gaïa, vous êtes confrontés à un accident de laboratoire qui a fait cinq millions de morts et peut-être un milliard de victimes, cela fait lourd payer la petite satisfaction d’un virologue d’avoir créé avant ses collègues de paillasse un délicieux et microscopique Alien. Ce créateur doit n’avoir qu’un regret, celui de ne pas avoir pu lui laisser son nom en obtenant le titre de giga serial killer ; et de ne pas jouir de la renommée de ses égaux qui ont fait flores sur ta planète dans un registre plus martial : Adolf, Joseph, Mao, Pol et tant d’autres.

Ma chérie, comme cette pandémie fut pour toi une aubaine contre ta pollution, je conçois que tu aies encouragé ces apprentis sorciers.

Ils ne ressemblent pas aux teenagers rouquins et chevelus survolant les salles gothiques du château de Poudlard, mais bien à des Batwoman et des Batman qui, dans leurs cloches transparentes en surpression, décident au ras du sol de l’avenir de milliards de tes Charmants dont ils n’ont surement rien à faire. Tout ceci se passe comme tu me l’avais décrit au début de la Covid, dans des laboratoires dits de haute sécurité P4 qui truffent ton monde de places-fortes impénétrables, murées de verre opaque, sécurisées par d’innombrables SAS, tout ceci pour la procréation de mutants létaux qui eux attendent patiemment une sortie non programmée mais inéluctable.
Voici donc ton paysage viral bien redessiné, avec un premier plan édifiant, suivi de repères attrayants encore proches pour guider l’œil, puis d’autres s’estompant dans le lointain, pour emmener l’observateur scientifique comme le spectateur d’une toile de maître vers les profondeurs d’un horizon qui a le mérite d’être incertain, dangereux pour Charmant et certainement bénéfique pour ton surpeuplement. Une vie sans enjeux n’est pas une activité faite pour Charmant.

Je pense à la nature des êtres qui peuplent nos planètes.

Même dans les races dominantes, la plupart sont bons, tant chez mes Ovoïdes que chez tes charmants petits humanoïdes. Tout ceci a permis le développement d’une civilisation avancée dont la progression a toujours été retardée par l’existence de plus mauvaises personnes qui cherchent à se servir des autres au lieu de rendre service à la majorité.

La dangerosité des mauvaises personnes, viciées du tréfond de leur âme jusqu’aux poils de leur couenne, est consubstantielle à leur existence. On espère toujours que le Mal qui les ronge est une imperfection qui finira par disparaître. Et quand ces personnes trouvent le moyen de mener une bonne action, elles séduisent et leur dangerosité s’aggrave du fait de la naïveté des observateurs qui veulent toujours croire que le Mal leur a été extirpé par le temps et la raison. Alors que le Mal est une force brutale qui est ancrée au fond des êtres qu’il possède et qui doit être écrasé par le Bien qui doit se faire violence pour en arriver là. C’est à ce moment-là que le Bien est déchiré : car il devient soumis à deux impératifs qui s’opposent catégoriquement, qui se contredisent absolument. Mais le Bien sera soumis au Mal tant qu’il ne se sera pas résolu à le trancher dans le vif. L’apparition d’une violence dans le Bien le meurtrit, mais elle est nécessaire à sa pérennité. Elle est longue à germer mais ce sera la clé de son succès. Tant que cette violence bénéfique n’aura pas supplanté la morale du Bien, le Mal survivra. Le paradoxe est que la survivance du Bien proviendra de sa violence et non de sa douceur.

Et que cette violence sera doublement exercée : d’abord contre la morale en son sein, puis contre le Mal soi-même.

Revenons à la belle action issue d’une mauvaise personne. Pourquoi une belle pensée, un beau raisonnement, un beau geste peuvent-ils naître dans un cerveau englué dans le Mal ? Eh bien je pense qu’à force de penser de façon intéressée, un cerveau ne distingue plus le Bien du Mal. Et je me suis aperçue que le chemin vertueux d’un raisonnement est parfois le plus efficace pour obtenir un avantage. Si fait qu’on croit ces personnes adoucies et devenues raisonnables. Alors qu’elles ne sont qu’en train d’évaluer les différents chemins pour gagner plus et plus vite.

Pour illustrer mon propos, je vais te rappeler le comportement de l’un de tes dirigeants dont tu m’avais vanté tantôt la subite conversion à la droite raison. Le renard en question, rusé comme Goupil, roux et changeant comme la lune, s’était opposé au passage des navires de guerre de l’ours au travers des détroits qu’il contrôle. Chacun de tes peuples charmants y avait vu une attitude pacifique augmentée d’une œuvre diplomatique quand il avait fait lever le blocus des ports ukrainiens pour livrer du blé à l’Afrique affamée. Ton monde charmant y vit une transformation qui refusait la guerre et combattait la famine.

Sa stature en fut auréolée d’une aura messianique.

Il chemina quelques temps sur des chemins jonchés de rameaux d’oliviers tombés du bec des colombes de la paix. Tes observateurs le crurent converti à la vertu. Il s’en trouva fort avantagé car de nombreux dirigeants lui firent grâce des quelques entorses concomitantes, pensant que le chemin de la raison peut être plus sinueux pour celui qui n’a jamais connu la droite ligne que pour un autre qui n’a pas hérité des mêmes vices. Mais tout ceci n’était que manœuvre et dissimulation. Le roux renard avait besoin d’un peu de temps et de camouflage pour aller piéger ses proies. Son attitude pacifique lui permit, tu t’en souviens cette fois-là, de ne pas entendre les cris des pygargues orfraies poussés par l’Occident alors qu’il envahissait une tranche frontalière de Syrie peuplée de ses meilleurs ennemis les Kurdes.

Je ne sais comment il va gérer la prochaine élection présidentielle, mais tu me diras comment il va se débarrasser de son challenger…

Ma chère Gaïa, je t’admire car je sais tes ellipses régulières alors que tu subis de si fortes secousses. J’en suis toujours étonnée. Je te parle assez peu de mes populations qui se contentent de tourner en silence, mais c’est pour mieux me préoccuper de tes problèmes.
Je t’envoie mille baisers qui seront portés par les vents cosmiques et un jour très lointain viendront caresser les couches nuageuses de ton atmosphère embaumée par la légèreté de ces zéphyrs et la grâce de leurs tourbillons.

Ton Aurore

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