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« Nadia, Butterfly », une plongée dans le réel

Pascal Plante filme l’intimité d’une jeune nageuse qui arrête la compétition… aux Jeux Olympiques de Tokyo. Une fiction aux airs de documentaire.

Rarement les spectateurs sont entrés à ce point dans l’intimité d’une sportive en pleine compétition.

Tourné en 2019, « Nadia, Butterfly » était prêt en février 2020, et devait sortir l’été 2020, pendant les Jeux Olympiques de Tokyo, où il est censé se dérouler, racontant la toute dernière compétition d’une nageuse professionnelle avant une retraite bien méritée. Finalement, le film de Pascal Plante sortira bien durant les J.O. mais un an plus tard (le 4 août en France), les Jeux comme la sortie ayant été retardés à cause de la pandémie. Entre-temps, le cinéaste québécois aura eu le plaisir de voir son film figurer dans la sélection officielle de Cannes 2020, le festival qui n’a pas eu lieu.

Nadia est incarnée par Katerine Savard, au physique de nageuse, épaules larges et corps musclé (qui lui vaut d’ailleurs dans le film d’être dans la « hot list » des athlètes sélectionnées). Normal, Katerine Savard est une vraie championne, c’est « la Laure Manaudou québécoise », médaillée olympique à Rio, qui a participé « pour de vrai » aux Jeux de Tokyo et y a terminé sa carrière. Tout comme Nadia, qui a décidé d’arrêter la compétition, et effectue sa dernière course dans sa spécialité, la nage papillon (butterfly).

Car Nadia est lassée de l’entrainement non-stop, l’enchaînement des longueurs dans le bassin, les séances de muscu, l’échauffement, les protocoles, les régimes, la douleur, les sacrifices… Et tout cela depuis des années et des années, toutes ces années en monde fermé, assistée, une vie sous contrôle permanent. Elle doit reprendre ses études de médecine à la rentrée, et reprendre surtout le contrôle de sa vie ; le papillon veut voler de ses propres ailes, malgré les encouragements du coach et des coéquipières à continuer.

Un film sur l’amitié et les dernières fois

Dernière course, donc, un relais à quatre nageuses, et une médaille olympique la ligne franchie, mission accomplie pour Nadia, qui ne peut éviter un pincement au cœur et un dernier regard en quittant la piscine. Elle verse des larmes dans la cabine où elle se change, mais sourit pour la remise de la médaille. Le soir, pour une fois, elle accepte de sortir en boîte avec sa copine, de marcher sur de hauts talons, de boire de l’alcool, de faire la fête, et de céder aux avances d’un bel escrimeur libanais. Un lâcher prise total, comme jamais, et la gueule de bois qui va avec le lendemain.

Le réalisateur Pascal Plante a lui-même été nageur de haut-niveau, « artiste chez les sportifs », et a finalement choisi le cinéma plutôt que la natation. Présenté comme un « drame sportif », son film est une fiction aux airs de documentaire, notamment par l’emploi dans les rôles principaux de vraies nageuses. Comme Katerine Savard, sa meilleure amie Ariane Mainville et les autres relayeuses (toutes des championnes) n’avaient jamais fait de cinéma, et leur présence apporte une véracité précise au récit.

« Nadia, Butterfly » est ainsi une plongée dans le réel, le cinéaste tournant au plus près de ses personnages, avec des plans-séquence discrets. Rarement les spectateurs sont entrés à ce point dans l’intimité d’une sportive en pleine compétition, même créée pour le cinéma. Racontant d’abord le quotidien d’une nageuse professionnelle, c’est aussi un film sur la déprime de fin de carrière, sur l’amitié, et sur les dernières fois.

Patrick TARDIT

« Nadia, Butterfly », un film de Pascal Plante avec Katerine Savard (sortie le 4 août).

Nadia est incarnée par Katerine Savard, « la Laure Manaudou québécoise » ; vraie championne de natation, médaillée olympique à Rio, elle tient ici son premier rôle au cinéma.
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