Florian Besson, Université de Lorraine
Ma thèse, soutenue en décembre 2017, portait sur les États latins d’Orient et l’aristocratie latine qui s’y installa puis y naquit. Les croisades mobilisent une énorme bibliographie et j’ai lu, pour cette thèse, plusieurs centaines de titres : livres, articles, actes de colloques, etc. Au milieu de cet océan d’ouvrages, de nombreuses pépites surnagent, et je fais un effort pour n’en citer que quatre :
Jonathan Riley-Smith, The Oxford Illustrated History of the Crusades
C’est un peu triste, mais la meilleure « somme » sur les croisades est, de loin, en langue anglaise. A la pointe de l’actualité de la recherche, magnifiquement illustré, ce livre permet d’entrer en Orient latin par la grande porte.
Hélène Débax, La Féodalité languedocienne (XIᵉ-XIIᵉ siècles). Serments, hommages et fiefs dans le Languedoc des Trencavel
C’est à mes yeux l’un des meilleurs ouvrages sur la société féodale, à la fois très complet et en même temps très accessible. L’auteure sait nous faire rentrer dans une société seigneuriale peu connue, assez spécifique qui plus est – dans le Languedoc, pour ne donner qu’un exemple, les nobles s’identifient comme « fils de leur mère », alors que la norme en Occident médiéval est de s’identifier par rapport au père – et dont on découvre avec fascination les rites, les pratiques, les contradictions.
Jean Flori, Chroniqueurs et propagandistes, Introduction critique aux sources de la première croisade
La meilleure introduction à ces fabuleuses chroniques de la première croisade, par lesquelles j’ai découvert mon sujet il y a de ça, déjà, quelques années. Racontée par plus d’une dizaine de chroniqueurs occidentaux, la première croisade est rien de moins que l’évènement le mieux documenté de toute la période médiévale. Ces chroniqueurs rédigent des textes souvent magnifiques, parfois mis au service d’intérêts politiques que l’auteur s’emploie à déceler. Jean Flori, disparu il y a peu, allie – dans ce livre comme dans tous ses autres ouvrages – une grande rigueur intellectuelle et une finesse du style qui rend la lecture très agréable.
Isabelle Ortega, Les Lignages nobiliaires dans la Morée Latine, XIIIᵉ-XVᵉ siècle : permanences et mutations
C’est un livre dont il est impossible de faire le tour tant il est riche, dense, bourré de remarques passionnantes et de véritables découvertes, au sens le plus fort du terme. En outre l’auteure a clairement le sens de la formule, définissant par exemple la société féodale « comme un système de redistribution continue de la propriété, ou plutôt comme un droit temporaire au contrôle et à l’exploitation d’une terre dont le souverain est le pivot » (p. 420). Même si c’est de la recherche à son plus haut niveau – et à son plus lourd, pourrait-on dire, car le livre fait 704 pages… –, l’ouvrage reste accessible, notamment parce qu’il peut se lire « par chapitres ».
Et aussi…
En ce moment, je lis moins de livres liés à ma thèse. Ayant (un tout petit peu) plus de temps libre, j’en profite pour lire de grands classiques qui m’avaient échappé, par exemple Montaillou, village occitan d’Emmanuel Le Roy Ladurie, qui est absolument génial. On comprend pourquoi il est devenu un tel best-seller ! À partir des registres d’une enquête de l’Inquisition, l’auteur y restitue l’ensemble de la vie d’un village : relations familiales, tensions entre les classes sociales, croyances religieuses, pratiques sexuelles… Le début, sur le rapport de l’homme à son environnement, est tout simplement admirable. Et à vrai dire on n’a absolument pas l’impression qu’il date de 1975, tant il n’a pas vieilli.
Je relis également des livres qui m’ont marqué, notamment le superbe Roi Arthur. Un mythe contemporain de William Blanc, qui explore toutes les réécritures de la légende arthurienne. Il réussit le tour de force d’être à la fois incroyablement érudit et extrêmement accessible.
Bonnes lectures !
Florian Besson, Docteur en histoire médiévale de l’Université Paris-Sorbonne et ATER à l’Université de Lorraine (Metz), Université de Lorraine
La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.