Le chef d’Etat-major des Armées était en désaccord avec le président de la République depuis l’annonce d’économies demandées au ministère de la Défense. Il est remplacé par le général François Lecointre.
Emmanuel Macron lui avait montré la porte. Le général cinq étoiles Pierre de Villiers, chef d’état-major des Armées, n’avait plus d’autre choix que de démissionner. C’est chose faite depuis ce matin.
Le général a adressé un long communiqué à l’AFP dans lequel il explique : « … Dans les circonstances actuelles, je considère ne plus être en mesure d’assurer la pérennité du modèle d’armée auquel je crois pour garantir la protection de la France et des Français, aujourd’hui et demain, et soutenir les ambitions de notre pays. Par conséquent j’ai pris mes responsabilités en présentant ce jour, ma démission au président de la République qui l’a acceptée. » Il termine : « Je reste indéfectiblement attaché à mon pays et à ses armées. Ce qui m’importera, jusqu’à mon dernier souffle, c’est le succès des armes de la France. »
Recadrage
La crise entre le président de la République et le chef d’état-major des Armées couvait depuis plusieurs jours. Depuis le 11 juillet 2017, exactement, quand le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin, annonce des coupes budgétaires importantes pour tous les ministères dont 850 millions d’euros d’économies pour la Défense.
Dès le lendemain, le général de Villiers fait part officiellement de sa désapprobation devant la commission de la Défense à l’Assemblée. Il lâche : « je ne me laisserai pas baiser comme ça. »
Nous sommes à la veille de la fête Nationale. Le président de la République fait un discours traditionnel devant les armées, hôtel de Brienne. Il en profite pour recadrer violemment le général de Villiers.
« Ces derniers jours ont été marqués par de nombreux débats sur le sujet du budget de la Défense. Je considère qu’il n’est pas digne d’étaler ainsi certains débats sur la place publique. J’ai pris des engagements. Je suis votre chef. Les engagements que je prends devant nos concitoyens et devant les Armées, je sais les tenir… »
Le lendemain, Emmanuel Macron est aux côtés du général de Villiers pour descendre les Champs-Elysées dans un command Car. Mais rien n’est réglé.
Confiance
Sur son compte Facebook, le même 14 juillet, le chef d’état-major des Armées écrit « une lettre » intitulée « Confiance » qui se termine ainsi : « Je terminerai par une recommandation. Parce que la confiance expose, il faut de la lucidité. Méfiez-vous de la confiance aveugle ; qu’on vous l’accorde ou que vous l’accordiez. Elle est marquée du sceau de la facilité. Parce que tout le monde a ses insuffisances, personne ne mérite d’être aveuglément suivi. La confiance est une vertu vivante. Elle a besoin de gages. Elle doit être nourrie jour après jour, pour faire naître l’obéissance active, là où l’adhésion l’emporte sur la contrainte… Fraternellement,
Général d’armée Pierre de Villiers ».
Réponse du berger à la bergère
Fini ? Pas encore. Le 16 juillet, Macron répond dans le JDD. « Si quelque chose oppose le chef d’état-major des armées au président de la République, le chef d’état-major des armées change… » Le président rappelle que le général de Villiers a toute sa confiance a condition de « savoir quelle est la chaîne hiérarchique et comment elle fonctionne, dans la République comme dans l’armée ».
La porte est donc ouverte pour le départ du chef d’état-major des Armées. Pierre de Villers la prendra ce 19 juillet.
Mais cette crise ouverte entre le président et le général ouvre aussi la porte à une crise politique majeure. L’attitude du jeune et nouveau président de la République qui veut faire preuve d’autorité fait montre plutôt d’autoritarisme. C’est-à-dire de faiblesse. Il déstabilise non seulement les militaires mais tous les corps d’Etat.
On n’a pas fini de lui reprocher ses postures qui deviennent peu à peu des impostures.
Le général Pierre de Villiers a été remplacé, ce matin en conseil des ministres par le général François Lecointre, issu de l’armée de terre.
Marcel GAY