56,9% des eaux françaises ne sont en bon état écologique, révèle le dernier rapport du WWF ‘’Pour des Rivières Vivantes’’. De nombreuses espèces de poissons et d’oiseaux, comme la truite des rivières ou le grèbe huppé, sont en déclin.
Le WWF France tire la sonnette d’alarme sur les menaces qui pèsent sur un écosystème en danger et pourtant inestimable. Nos rivières sont en danger. « Les rivières françaises remplissent des fonctions fondamentales au niveau physique et écologique, explique le WWF France. Elles ont en effet un rôle d’épuration naturelle et servent d’habitat à de nombreuses espèces de poissons et d’oiseaux. Ce sont aussi des corridors écologiques. Pourtant, malgré leur rôle essentiel, près de 56,9 % des eaux françaises ne sont pas en bon état écologique, comme l’indiquent les données produites par les agences de l’eau. »
Les ravages de l’agriculture intensive
En effet, les rivières ont été malmenées par les activités humaines depuis des décennies et particulièrement par l’agriculture intensive. L’intensification des pratiques agricoles a participé de manière forte à recalibrer les rivières en les approfondissant et en les élargissant, à arracher les haies incluant les ripisylves (perte de 43% entre 75-85 et 2006).
Le drainage des terres qui l’a accompagné a aussi contribué à la disparition de près de la moitié des zones humides entre 1960 et 1990. Or, les politiques de restauration des rivières mises en place depuis plusieurs années et les dépenses importantes accompagnant cette réorientation n’ont malheureusement pas suffit à ce jour à contrebalancer l’ensemble des atteintes à l’environnement.
500 milliards d’euros en 20 ans
« Ce sont près de 500 milliards d’euros qui ont été dépenses depuis 20 ans pour en assurer la préservation : cela signifie que malgré tous ces efforts, l’état écologique des rivières ne progresse pas comme nous pourrions nous y attendre » regrette Yann Laurans, Directeur des programmes du WWF France.
Il ajoute « Les pressions exercées par l’homme sur cet écosystème, notamment pour continuer à nourrir un système agricole productiviste, mettent aujourd’hui en danger certaines espèces comme la truite des rivières. Depuis des années, le WWF se mobilise pour enrayer ce déclin, notamment grâce à des programmes de préservation des zones humides. Mais nous avons aussi besoin de mobiliser les pouvoirs publics : seule la mise en place d’une politique de l’eau ambitieuse permettra de préserver cette ressource indispensable.”
Les rivières ne sont pas qu’un simple décor bucolique
Les cours d’eau (ou rivières) remplissent des fonctions essentielles dont nous dépendons pour notre bien-être :
- la fonction hydraulique (quantité et qualité de l’eau) : régulation des crues, amélioration de la
qualité d’eau par auto-épuration, recharges des nappes - la fonction écologique : habitat (abris et caches) d’espèces terrestres et aquatiques, source de nourriture et zone de reproduction, couloir de migration (continuité écologique).
- la fonction paysagère : contribution à la qualité des paysages, zone de détente.
Pour continuer à assurer ces fonctions écologiques essentielles, les rivières et autres ruisseaux doivent être maintenus dans un bon « état écologique ».
Hélas, pour la majorité d’entre eux, c’est loin d’être le cas !
La politique de l’eau menée en France depuis l’après-guerre a conduit à la dégradation de nos rivières :
- obstacles aux écoulements (ouvrages, barrages, seuils) ;
- dégradation de la morphologie des cours d’eau (endiguements, dragage, canalisation…) ;
- dysfonctionnements hydrologiques (prélèvements excessifs) ;
- apports diffus de pesticides, de phosphates et de nitrates (agriculture et aquaculture) ;
- rejets ponctuels de micropolluants (industries et assainissement) ;
- pressions biologiques (prolifération d’espèces exotiques envahissantes).
Les politiques consistant à canaliser les rivières pour contenir et évacuer l’eau, ont appauvri leur biodiversité, contribué à asphyxier certaines nappes et asséché les paysages.
En application des lois européennes, la France a mis aux normes ses systèmes d’assainissement urbains et
industriels et n’utilise plus de pesticides en ville depuis 2017. Mais cela s’est fait avec vingt ans de retard sur le calendrier réglementaire.
Le recours aux pesticides n’a pas baissé dans l’agriculture : les indicateurs d’évolution des usages des produits phytosanitaires sont au même niveau qu’en 2009, bien loin de l’objectif de réduction de 50% fixé depuis plus d’une décennie par le Grenelle de l’environnement. Les agences de l’eau ont mis en œuvre des programmes pertinents de restauration de la continuité des cours d’eau. Mais ces projets rencontrent des oppositions systématiques et leur rythme de réalisation est bien insuffisant pour que leur effet se constate sur la situation écologique des petits cours d’eau.