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Gaz de couche en Moselle : C’est toujours non pour quatre associations !

Les associations Amis de la Terre France, APEL57, Lorraine Nature Environnement et le Collectif de Défense des Bassins Miniers Lorrains saisissent la justice pour obtenir l’annulation du décret d’autorisation d’exploitation de cet hydrocarbure non conventionnel.

Gaz de couche : rassemblement à Metz
Gaz de couche : rassemblement à Metz

Le 18 décembre 2023, l’État a dû octroyer un permis d’exploitation de gaz de couche dans l’Est de la France.
Après plusieurs années de silence dues à l’instruction de la demande de concession, la saga du gaz de couche (1) en Moselle ne cesse de rebondir depuis quelques mois :

  • Après plusieurs années d’interpellation de la société civile et d’élus locaux, le ministère de la Transition énergétique avait enfin refusé, via un arrêté le 26 avril dernier, d’accorder le permis d’exploitation, arguant de l’incapacité technique de l’entreprise La Française de l’Énergie (LFDE) à extraire ce gaz (2).
  • L’entreprise avait alors saisi le Tribunal administratif de Strasbourg, lequel a annulé l’arrêté du ministre fin juillet, et ordonné à l’État d’accorder cette concession dans un délai de trois mois (3).
  • L’État a fait appel du jugement, mais ce recours n’étant pas suspensif, il a été contraint de publier le décret d’autorisation d’exploitation le 24 novembre 2023.

Risques de dommages irréversibles

Aujourd’hui, les Amis de la Terre France, APEL 57 (4), Lorraine Nature Environnement et le Collectif de Défense des Bassins Miniers Lorrains (5), qui alertent depuis plusieurs années sur les risques des gaz de couche, ont décidé d’attaquer le décret d’autorisation d’exploitation en justice, mais aussi de soutenir l’appel de l’État via une intervention volontaire.
Ces actions judiciaires font suite à plusieurs années de mobilisation de la société civile et des élus locaux au vu des risques de dommages irréversibles pour l’environnement et le climat que revêt ce projet de gaz de couche. En 2017, le lobbying de la société LFDE lui avait permis d’obtenir une exclusion des gaz de couche de l’interdiction d’exploration et exploitation des hydrocarbures non conventionnels dans la loi Hulot.

Des gaz à effet de serre

Alors que le permis octroyé englobe 40 communes de Moselle et impliquerait le forage de 400 puits sur un périmètre de 191 km², les associations réitèrent leurs alertes :

  • l’exploitation de gaz de couche est fortement émettrice de gaz à effet de serre, et a un impact considérable sur l’artificialisation des sols et sur la ressource en eau ;
  • il n’y a aucune étude d’impact sur l’eau potable, et les sols du bassin minier sont déjà éprouvés par l’histoire minière et la remontée de la nappe phréatique ;
  • alors que la technique habituelle d’exploitation des gaz de couche est la fracturation hydraulique, interdite en France, l’entreprise n’a pas démontré ses capacités techniques via des techniques alternatives (faibles quantités de gaz extrait lors de la phase d’exploration, problèmes techniques multiples rencontrés sur les puits…) : il n’y a aucune garantie réelle sur les conditions de cette exploitation.

Permis jugé déraisonnable

Selon le Collectif de Défense des Bassins Miniers Lorrains, « Il y a quelques mois, nous nous réjouissions que le gouvernement ait enfin entendu nos alertes en décidant de refuser ce permis d’exploitation de gaz de couche. Il est très inquiétant de voir que la justice ait contraint l’État à accorder un permis jugé déraisonnable par des services qui en ont étudié la teneur pendant des années ».
Pour Juliette Renaud, des Amis de la Terre France, « La question que pose aujourd’hui cette affaire est cruciale : alors que la crise climatique s’emballe, l’État français a-t-il le pouvoir de dire non aux entreprises gazières et pétrolières ? Cela fait des années que la Française de l’Énergie s’acharne sur ce projet alors qu’aucune des techniques d’extraction qu’elle a testées ne s’est révélée sûre pour l’environnement ni à même d’extraire ce gaz de façon rentable. En attendant, les impacts environnementaux et climatiques sont bien réels, et l’exploitation du gaz de couche doit donc être évitée à tout prix ».
Selon Marieke Stein, de l’APEL57, « Alors que la France s’était engagée à sortir progressivement de l’exploitation des hydrocarbures, et que les effets du dérèglement climatique sont de plus en plus palpables dans de nombreuses régions, ce projet d’hydrocarbures est à rebours complet de l’histoire et des préconisations des scientifiques ».
Via ce recours contre le décret d’autorisation, et l’intervention volontaire devant la Cour d’Appel en soutien de l’État, nos associations espèrent que la justice fera le choix de l’intérêt collectif et de la préservation des biens communs, en annulant le décret d’autorisation d’exploitation de gaz de couche de charbon.

Notes :
(1) Le gaz de couche se trouve dans les couches de charbon vierges de toute activité minière, il est fortement émetteur en méthane, un gaz à effet de serre plus nocif que le CO2. Son exploitation a des impacts environnementaux multiples et bien documentés par de nombreux rapports indépendants, scientifiques et techniques. Contamination de l’eau, émissions de gaz à effet de serre, réduction de la fertilité des sols, dégradation de l’attractivité du territoire, ne sont que quelques-uns des impacts néfastes prévisibles détaillés dans la synthèse sur les gaz de houille de l’INERIS et du BRGM et le rapport 2016 de la Commission Européenne Environmental and Sustainability Assessment of Current and Prospective Status of Coalbed Methane Production and use in the European Union.
(2) Voir le communiqué de presse des associations saluant le refus de la demande de concession.
(3) La décision du tribunal administratif de Strasbourg est disponible ici.
(4) L’Association pour la Préservation de l’Environnement Local en Moselle (APEL57) œuvre depuis 2015 à développer une expertise citoyenne sur le gaz de couche de charbon et ses conséquences, notamment environnementales.
(5) Depuis 1997, le Collectif de Défense des Bassins Miniers Lorrains s’est donné pour mission d’informer, d’alerter, de soutenir et d’agir en direction des sinistrés et des habitants des communes minières de Lorraine.

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