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« Megalopolis », à la démesure de Coppola

Tous les chemins mènent à la New Rome dans le film du « maestro », une dinguerie cinématographique. « Une fable » politico-sociétale, fresque chaotique et folle épopée de science-fiction.

« J’ai beaucoup de très bons souvenirs personnels ici », avait confié Francis Ford Coppola, au Festival de Deauville.

Avant la projection en avant-première de son dernier film, « Megalopolis » (sortie le 25 septembre), le public du Festival du Cinéma Américain de Deauville avait réservé une véritable ovation à Francis Ford Coppola, le cinéaste mythique de « Apocalypse Now », « Le Parrain », « Conversation secrète », « Dracula », « Cotton Club »… qui, ému, évoquait sa liaison naissante en Normandie avec Eleanor, devenue ensuite son épouse et collaboratrice, disparue au printemps, et à qui le film est dédié.

C’est un cinéma de jeunot qu’a tourné le « maestro », vieux monsieur (85 ans) qui se déplace avec une canne ; une dinguerie cinématographique, un tourbillon psychédélique, comme on aimerait qu’en réalisent de jeunes cinéastes. Sélectionné en compétition au Festival de Cannes, « Megalopolis » est « le projet d’une vie ». Imaginé il y quatre décennies, le film avait failli se faire en 2001 mais avait été abandonné après les attentats du 11 septembre à New York. Pour le relancer il y a quelques années, Coppola a vendu une partie de son vignoble californien de la Napa Valley, afin de financer cet ambitieux projet aux 120 millions de dollars.

Le rêve d’un nouveau monde

C’est avec « la précieuse collaboration » de son fils Roman, que Francis Ford Coppola a tourné cet opéra foisonnant.

Tous les chemins y mènent à la New Rome, capitale d’une république américaine du futur, qui ressemble fort à la Rome antique en pleine décadence. La ville est en faillite, dirigée par le maire Franklyn Cicero (Giancarlo Esposito), intrigant, réactionnaire et corrompu, défenseur d’une caste de privilégiés. Jusqu’alors frivole et fêtarde, sa jolie fille Julia (Nathalie Emmanuel) va tomber amoureuse du meilleur ennemi de son paternel, César Catilina (Adam Driver). Un architecte et scientifique génial, un créateur idéaliste qui a le pouvoir d’arrêter le temps, un bâtisseur visionnaire, qui rêve d’un nouveau monde, d’une nouvelle société. Une utopie, alors que le peuple est en souffrance, se laissant convaincre par la propagande d’un populiste ambitieux, Clodio.

« Megalopolis » est « une fable » politico-sociétale, une fresque chaotique et une folle épopée de science-fiction, qu’a tourné Coppola, avec « la précieuse collaboration » de son fils Roman, et un casting prestigieux jusque dans les seconds rôles (Dustin Hoffman, John Voight, Shia LaBeouf, Laurence Fishburne, Jason Schwartzman…).

Un univers rétrofuturiste

Et il y a en effet quelque chose d’un peu mégalo, de démesuré, dans cet opéra pompeux et foisonnant, où il y a de quoi se perdre, dans la profusion de personnages et un scénario touffu. Mais toute « l’illusion » du cinéma nous plonge dans un univers à l’esthétique rétrofuturiste, une « réalité poétique » imaginée par le concepteur visuel Dean Sherriff, charger de dessiner les visions de Coppola.

C’est une œuvre d’une inventivité débridée, tel cet happening lors de la projection à Deauville : lors d’une séquence de conférence de presse, comme sorti du film un acteur entre sur la scène avec un micro, joue en « live » devant le public un journaliste qui pose une question, à laquelle César/Driver répond à l’écran !

Francis Ford Coppola assure que « Megalopolis », film empli de philosophie, de mythologie, d’histoire et d’architecture, est un « film très optimiste », comme s’il conservait malgré tout un espoir en l’humanité… et dans le cinéma.

Patrick TARDIT

« Megalopolis », un film de Francis Ford Coppola (sortie le 25 septembre).

Adam Driver joue un architecte et scientifique génial, un créateur idéaliste qui a le pouvoir d’arrêter le temps (Courtesy of Lionsgate).
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