Malgré l’euphorie boursière et l’accord commercial sino-américain, l’économie française continue de s’enfoncer dans la récession avec un nombre alarmant de faillites d’entreprises en mars 2025, constate l’économiste Marc Touati.

En mars 2025, la Banque de France a révélé des chiffres préoccupants concernant les défaillances d’entreprises, atteignant un niveau record de 66 379 entreprises en difficultés, soit 3,8% au-dessus du précédent sommet d’avril 2015. Cette situation économique dramatique s’inscrit dans un contexte mondial de ralentissement, mais la France semble particulièrement touchée.
Nombre record de faillites d’entreprises
Hors micro-entreprises, la situation est encore plus alarmante avec 5 520 défaillances en mars 2025, représentant une augmentation de 14,4% par rapport au pic de septembre 2009. La hausse des défaillances depuis janvier 2020 est vertigineuse : +33% pour l’ensemble des entreprises, mais +129,3% si l’on exclut les micro-entreprises.
Tous les types d’entreprises sont touchés : les TPE affichent une hausse de 126% des défaillances, les petites entreprises (10-99 salariés) +141%, les moyennes entreprises +120%, et même les ETI et grandes entreprises connaissent une augmentation de 137%.
Les secteurs les plus affectés
Le secteur de la construction est le plus durement touché avec près de 15 000 entreprises en difficulté, soit une hausse de 38% par rapport à janvier 2020. Le commerce et la réparation automobile suivent avec 14 000 défaillances, tandis que l’hébergement et la restauration enregistrent 8 820 défaillances (+35%). Le secteur industriel n’est pas épargné avec une augmentation de 29% des défaillances, remettant en question la politique de réindustrialisation annoncée.
Un contexte économique mondial fragile
La situation économique mondiale montre également des signes de faiblesse. L’indice des directeurs d’achat mondial calculé par JP Morgan est tombé à 50,8, à la limite entre croissance et récession. Les États-Unis connaissent un fort ralentissement (50,6), tandis que la zone euro se maintient difficilement (50,4).
La France, avec un indice à 47,8, se classe parmi les derniers pays, devant seulement le Canada (41,7). Cette position de « lanterne rouge » de l’économie mondiale s’accompagne d’un déficit commercial américain record (117,4 milliards de dollars sur 12 mois) et d’un excédent commercial chinois équivalent (116,4 milliards de dollars).
Les marchés boursiers en rebond malgré les risques
Paradoxalement, les marchés boursiers ont connu un rebond spectaculaire suite à l’accord temporaire sur les droits de douane entre les États-Unis et la Chine. Le CAC 40 a repris 14,4% entre le 9 avril et le 12 mai, après une chute de 16,3% entre le 6 mars et le 9 avril. Le Standard & Poor’s 500 américain a quant à lui progressé de 17,3% après une baisse de 12,1%.
Cependant, cette euphorie boursière masque une situation économique préoccupante, avec des valorisations très élevées (PER de 34 pour Microsoft, 33 pour Apple, et jusqu’à 166 pour Tesla) qui font craindre une bulle spéculative similaire à celles de 1929 ou de 2007.
Des perspectives incertaines
L’avenir économique reste incertain pour plusieurs raisons : une croissance mondiale faible prévue autour de 2,5% en 2025, une guerre commerciale qui n’est pas totalement résolue, des prix du pétrole en hausse, des taux d’intérêt qui resteront élevés, et une dette publique française qui continue d’augmenter.
S’ajoutent à ces facteurs les risques bancaires liés aux défaillances d’entreprises, la possibilité d’une crise politique et sociale en France avec d’éventuelles élections législatives anticipées, et les tensions géopolitiques persistantes.
Dans ce contexte de forte volatilité, la prudence reste de mise pour les investisseurs, malgré l’euphorie temporaire des marchés boursiers.