Pendant l’ouverture de la saison de chasse, les découvertes de rapaces criblés de plomb se multiplient, alors que ces espèces sont strictement protégées, constate la Ligue de protection des oiseaux.
Le 6 novembre 2021, un Epervier d’Europe a été la cible d’un tir au fusil dans l’Hérault. Sauvé par une vétérinaire, il restera toutefois paralysé. Quelques jours plus tard, un Faucon crécerelle a été retrouvé dans des circonstances similaires dans le Vaucluse. Le mois dernier, deux autres éperviers ainsi que 2 autres faucons crécerelles avaient été découverts morts en région PACA. En septembre, c’était un Aigle royal en Ardèche, une Buse variable dans le Gard, un Circaète Jean Le Blanc, etc. En octobre 2020, un rarissime Gypaète barbu avait été abattu dans les Cévennes. Cette liste macabre est, hélas! déjà longue et pourtant très loin d’être exhaustive : ces victimes ne constituent que la partie visible de l’iceberg tant la probabilité de retrouver les animaux tués est très faible.
Des tirs plus fréquents en période de chasse
Au cours des 3 dernières années, 87% des 109 rapaces plombés pris en charge par les 7 centres de soins gérés par la LPO ont été reçus entre début septembre et fin février, soit entre les dates d’ouverture et de fermeture générales de la chasse en France. Bien qu’il ne s’agisse pas d’actes de chasse à proprement parler, les rapaces étant en effet intégralement protégés depuis 1976, les munitions et les armes utilisées sont bien les mêmes. Erreurs d’identification ou malveillance délibérée, les tirs sur les rapaces sont beaucoup plus fréquents quand la chasse est ouverte.
Des plaintes de la LPO
Leurs auteurs sont rarement identifiés et en dépit de nombreuses plaintes de la LPO, la majorité des affaires est classée sans suite. Quand jugement il y a, les peines prononcées sont le plus souvent clémentes et peu dissuasives, alors que le nombre de rapaces abattus reste quasi constant, année après année. La destruction d’une espèce protégée est pourtant passible de 3 ans d’emprisonnement et de 150.000 € d’amende.
La LPO en appelle une nouvelle fois aux dirigeants cynégétiques afin qu’ils fassent le nécessaire auprès de leurs adhérents et cessent de nier leur responsabilité dans la multiplication de ces actes. Elle demande également un renforcement des moyens d’investigation de la police de la nature de l’Office Français de la Biodiversité (OFB), ainsi que la formation des juges sur ce sujet.
Des années de protection mises en péril
Il y a toujours eu des croyances et des préjugés entourant les rapaces, longtemps considérés comme des espèces « nuisibles » s’attaquant au gibier ou aux troupeaux, voire aux enfants. Victimes de tirs et d’empoisonnement, plusieurs d’entre elles ont ainsi failli disparaître de France il y a un siècle. Grâce aux importants efforts déployés en termes de conservation et de sensibilisation, leurs populations sont aujourd’hui en meilleure santé, mais demeurent vulnérables, menacées par les intoxications aux pesticides utilisés par l’agriculture intensive, la réduction de leurs habitats causée par l’artificialisation des espaces naturels, ainsi que par le développement des infrastructures linéaires de transport et d’énergie (lignes électriques, parcs éoliens, réseau routier).
Pour Allain Bougrain Dubourg, président de la LPO « Prédateurs ou charognards, ces majestueux oiseaux sont essentiels à l’équilibre des écosystèmes. Il est crucial de se battre pour les préserver. Et cela passe évidemment par empêcher que des voyous leur tirent dessus, tout en sanctionnant lourdement les contrevenants. »