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« I feel good », merci l’abbé Pierre !

Chez les Grolandais Delépine et Kervern, Jean Dujardin joue un imbécile heureux qui a trop cru en saint Bernard Tapie.

Jean Dujardin dans un personnage qui n'a rien en poche et rien dans la tête.
Jean Dujardin dans un personnage qui n’a rien en poche et rien dans la tête.

C’est un homme en peignoir qui marche au bord d’une autoroute et qui parle tout seul. Fauché, forcément fauché, il ira comme ça jusque chez sa sœur, enfin dans la communauté Emmaüs que dirige sa sœur. Ces frère et sœur sont joués par Jean Dujardin et Yolande Moreau dans « I feel good », un film réalisé par Benoît Delépine et Gustave Kervern (actuellement en salles).

Rien dans les poches et surtout rien dans la tête, le frangin est un champion, champion du monde des glandeurs, du genre fâché avec le boulot, qui ne voit pas pourquoi il irait bosser lui-même quand on peut faire bosser les autres, un loser qui s’imagine winner, un imbécile heureux qui a trop cru en saint Bernard Tapie et trop lu les mémoires de Bill Gates, un bon à rien qui se rêve en riche patron. Dujardin, qui a l’habitude d’incarner des idiots magnifiques (« Brice de Nice », « OSS 117 »…), s’est fait une allure à la Dupontel (qui avait tourné avec les « Grolandais » Kervern-Delépine dans « Le Grand Soir ») pour incarner ce grand enfant qui a oublié de grandir.

Une part de rêve à ceux qui n’en ont plus

En Monique, Yolande Moreau semble chez elle dans le village Emmaüs de Lescar-Pau, qui a fourni un décor idéal à ce film, avec son architecture foutraque et colorée, ainsi que des acteurs et figurants en la personne des compagnons. Capable de vendre la Lune, et une part de rêve à ceux qui n’en ont plus, le minus qui se voit magnum va tester sur eux sa « nouvelle idée pour devenir riche ». Une belle idée d’ailleurs, puisque partant du principe que plus on est beau mieux on réussit dans cette société de l’apparence et de la consommation, il veut rendre les petites gens beaux. Et faire d’un ancien sdf un futur super vrp, grâce à de la chirurgie low-cost.

Dans la lignée de certains de leurs longs-métrages précédents (« Le Grand Soir », « Louise-Michel », « Mammuth »…), Kervern et Delépine font à nouveau « un film sur des cabossés ». Des très cabossés, même. Si leur cinéma est souvent bricolé, ils recyclent même l’idée du « recyclage », Emmaüs retape et revend ce que les gens ne veulent plus, le personnage de Dujardin imagine recycler ceux qui ont été rejetés par la société.

Le frère et la sœur avaient eu la chance d’avoir des parents communistes (désormais en cendres dans la Simca 1100 familiale), mais seule Monique a retenu les principes des cocos et de l’abbé Pierre, des trucs ringards comme l’entraide et la solidarité. Alors que égoïsme rime avec libéralisme et macronisme, « I feel good » nous fait croire un instant que l’utopie est plus forte que l’argent. Avec un ultime pied-de-nez : le beauf parvenu et friqué, exemple de la réussite financière et capitaliste, est interprété par Xavier Mathieu, l’emblématique leader syndical des Continental.

Patrick TARDIT

« I feel good », un film réalisé par Benoît Delépine et Gustave Kervern, avec Jean Dujardin et Yolande Moreau (actuellement en salles).

Les Grolandais Benoît Delépine et Gustave Kervern devant la figure de l'abbé Pierre, au village Emmaus de Lescar-Pau.
Les Grolandais Benoît Delépine et Gustave Kervern devant la figure de l’abbé Pierre, au village Emmaus de Lescar-Pau.
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