Après des centaines de recours déposés dans les tribunaux administratifs appuyés par une QPC (Question Prioritaire de Constitutionnalité), l’association 50 Millions d’électeurs attaque au Conseil d’État l’élection du 15 mars 2020. Explications…
« Nous l’affirmons et le démontrons : la Loi d’urgence du 23 mars qui « sanctuarise » les résultats du premier tour de l’élection municipale du 15 mars est contraire à notre Constitution, assure l’association 50 Millions d’électeurs. Aussi, pour que cela puisse être tranché, il faut qu’au moins une de nos QPC arrive jusqu’au Conseil constitutionnel… et le parcours est parsemé de portes à peine entrouvertes. »
Dans un entretien avec le Figaro le 17 avril, le Président du Conseil constitutionnel, Laurent Fabius semblait regretter que les Neuf Sages du Palais-Royal, n’aient pas été encore saisis de la conformité à la Constitution de différentes dispositions de la loi du 23 mars 2020, et estimait qu’il « semble assez probable que le Conseil Constitutionnel soit saisi de ces questions par la voie de la QPC ».
Première étape : le tribunal administratif
« Première possibilité pour tenter d’atteindre le Conseil constitutionnel, déposer une QPC au tribunal administratif en appui d’un recours contre une élection, poursuit l’association 50 millions d’électeurs. C’est ce qu’elle a fait dans un premier temps en proposant aux milliers de maires et candidats qui la suive des modèles de recours et de QPC. Des recours et QPC ont été ainsi déposés dans de très nombreux tribunaux, partout en France et Outre-Mer.
Il faudra ensuite que chaque tribunal estime s’il lui semble pertinent de transmettre la QPC au Conseil d’État, qui statuera ensuite sur la pertinence de la transmettre au Conseil constitutionnel.
Deuxième étape : le Conseil d’État
Mercredi 6 mai, 50 millions d’électeurs a déposé directement au Conseil d’État deux nouveaux recours, tous les deux assortis d’une QPC (fichiers joints à télécharger). Ces recours attaquent non plus les élections, mais le décret du 17 mars et l’ordonnance du 1er avril qui reportent et organisent le second tour.
Ces deux actes étant pris en application de dispositions de la loi d’urgence du 23 mars, il a donc été possible d’appuyer les requêtes avec des Questions Prioritaires de Constitutionnalité pour attaquer également la loi du 23 mars.
Le Conseil d’État peut-il faire barrage ?
« Nous ne pouvons pas y croire ! s’insurge l’association. Dans cette affaire, le Conseil d’État est à la fois juge et partie puisqu’il a validé en amont la rédaction de la Loi du 23 mars avant qu’elle ne soit proposée au Parlement. Empêcher la transmission de nos QPC au Conseil constitutionnel aurait des répercussions telles que cela ne pourrait qu’engendrer une crise de nos institutions. Nous n’aurions alors d’autre moyen que de saisir la Cour Européenne des Droits de l’Homme. »
En effet, dans un avis rendu le 18 mars, le Conseil d’État affirme que « Malgré le début de la crise sanitaire, ces opérations se sont, de manière générale, déroulées dans des conditions satisfaisantes » et se contredit 2 lignes plus bas « Mais, dans le contexte de la crise sanitaire aigüe qui sévit depuis quelques jours, il reporte le second tour de ces élections ». « Début de crise » le 15 mars, mais « crise aiguë depuis quelques jours » le 18 ? « Conditions satisfaisantes » ? Assurément non ! »
« De quelque manière que les QPC arrivent, elles peuvent effectivement se heurter au dernier rempart qui les sépare des Sages. Gageons que le Conseil d’État saura ouvrir la porte pour permettre au gardien de notre Constitution d’examiner enfin cette loi qu’aucune des personnes habilitées à le saisir avant sa promulgation n’a souhaité – ni osé ! – lui soumettre. »
QPC contre le décret du 17 mars