Deux heures et demie durant, Marine Le Pen et Emmanuel Macron se sont affrontés devant les caméras à coups d’invectives et de petites phrases assassines. Un reality-show sans grand intérêt pour la démocratie.
Débat un peu brouillon, parfois cafouilleux et souvent inaudible. Voilà la première impression que laisse ce face à face entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron à trois jours du second tour de la présidentielle.
Les deux débatteurs, plutôt indisciplinés, n’ont que rarement été rappelés à l’ordre par les deux arbitres du jour, manifestement trop effacés, Nathalie Saint-Cricq et Christophe Jakubyszyn, chefs du service politique de France2 et TF1.
D’emblée, Marine Le Pen attaque son adversaire : « Monsieur Macron est le candidat de la mondialisation sauvage, de la guerre de tous contre tous (…) tout cela piloté par Monsieur Hollande qui est à la manœuvre de la manière la plus claire qui soit. »
Réponse du berger à la bergère : « Vous portez l’esprit de défaite, moi je porte l’esprit de conquête. »
La candidate du FN évoque le passé du conseiller du président Hollande à l’Elysée puis de ministre de l’Economie, parle de la vente de SRF puis d’Alstom, s’embrouille dans ses notes. Macron en tire un petit avantage.
Joutes verbales
Le débat tourne vite à la foire d’empoigne. Macron demande : « Comment financerez-vous votre programme ? » Le Pen : L’UE, c’est 9 milliards, l’immigration 15 Milliards, la fraude sociale contre laquelle vous n’avez rien fait…. »
Macron conteste les chiffres.
Les 35 heures ? « Je veux que les négociations aient lieu par branche, assure la candidate du FN. M. Macron par entreprise, c’est fratricide, cela engendrera une concurrence déloyale ».
Macron aborde la question de Whirlpool : « Pendant que vous faisiez votre numéro avec les caméras, j’étais avec l’intersyndicale. Ils ont bien compris que vous ne proposiez rien. Je vais me battre pour la reprise du site industriel… Jamais je n’ai fait ce que vous avez fait : profiter de la détresse des gens ».
On parle des impôts, du pouvoir d’achat, de la GPA (gestation pour autrui) sujets qui donnent lieu à des joutes verbales plutôt qu’à des explications claires pour les auditeurs/électeurs.
11.000 fichés S
Vient la question sur l’immigration et le terrorisme. Emmanuel Macron explique que la déchéance de nationalité, prévue dans le programme de Marine Le Pen ne sert à rien : « La déchéance …ça ne résout rien au problème. Les terroristes sont des gens qui se suicident, la déchéance de nationalité brandie par Mme Le Pen, vous pensez que ça les fait trembler ? «
Marine Le Pen rétorque : « Arriver à laisser sur le territoire 11.000 fichés S pour fondamentalisme, c’est une véritable honte. »
On passe à l’école. « Elle a été saccagée par les socialistes, assure Marine Le Pen. Je veux qu’à l’université, ce soit le mérite et non pas un tirage au sort. Je souhaite que la laïcité s’applique. »
Macron : « Mon projet est de concentrer les moyens sur l’école primaire. Il y a 20% des élèves qui ne savent pas lire au CM2, qu’on va retrouver dans les jeunes qui sortent sur système à 18 ans sans emploi ni formation. La mère des batailles c’est l’école primaire. »
Assauts répétés
Les deux candidats évoquent encore la politique étrangère, la baisse du nombre de parlementaires… L’un et l’autre parle en même temps. On entend des invectives. Macron : « vous racontez n’importe quoi ». Le Pen : « Ne jouez pas avec moi à l’élève et au professeur ».
L’Europe ? Un dialogue de sourd entre les deux candidats. « La France sera dirigée par une femme, ce sera moi ou Mme Merkel » lance la candidate du FN.
Le dialogue est décidément impossible. Au terme de 2 heures 30 d’émission, d’assauts polémiques, de surenchères, d’approximations et de tentatives répétées de déstabilisation de son concurrent, Marine Le Pen semble bien avoir perdu le match face à un adversaire qui est parvenu à ne pas se départir de son calme.
Mais au bout du bout, les auditeurs sont restés sur le faim. Et forcément déçus par ce triste spectacle.
M.G.