Alors que les députés vont examiner ce jeudi, dans le cadre du projet de loi « Sapin 2 », un amendement officialisant explicitement le droit à la résiliation annuelle pour l’assurance emprunteur des crédits immobiliers, l’UFC–Que Choisir les appelle à résister au lobbying des établissements bancaires et à adopter cette mesure favorable à tous les emprunteurs, y compris aux malades.
Le marché de l’assurance emprunteur : une concurrence entravée, des marges élevées
Malgré les avancées contenues dans les lois Lagarde et Hamon, la concurrence sur le marché de l’assurance emprunteur peine à se matérialiser. Si les consommateurs peuvent, en théorie, désormais souscrire une assurance différente de celle qui leur a été proposée par leur banque, ou en changer jusqu’à un an après sa souscription, les acteurs du marché ont multiplié les prétextes pour rendre ineffectifs ces droits (manœuvres dilatoires, non-compatibilité des garanties proposées). Faut-il à ce propos rappeler que ces pratiques ont abouti à une saisine de l’ACPR par l’UFC–Que Choisir ?
Ces entraves à la concurrence se traduisent dans les chiffres. La part de marché des assurances alternatives (c’est-à-dire autres que celles proposées par les banques) oscille entre 15 % et 20 %, soit une situation inchangée par rapport à 2009. De quoi entretenir les plantureuses marges du secteur, estimées par l’Inspection générale des finances à 50 % d’un chiffre d’affaires de 6,1 milliards d’euros.
Face à cette situation bloquée, une reformulation explicite dans la Loi du droit à la résiliation annuelle de l’assurance emprunteur est la solution pour faire sauter les verrous mis par les banques à l’exercice d’une vraie concurrence, et offrir un gain de pouvoir d’achat pour tous les emprunteurs (plusieurs milliers d’euros par assuré emprunteur).
La résiliation annuelle, un impératif pour rendre effectif le droit à l’oubli pour les anciens malades
Bénéfique pour la communauté des consommateurs, la résiliation annuelle le sera particulièrement pour les personnes malades. En effet, la possibilité de changer d’assurance en cours de crédit permettra à davantage d’emprunteurs de profiter du droit à l’oubli voté en début d’année dans la loi Santé. Celui-ci permet, pour les anciens malades de certaines pathologies comme le cancer, de ne plus avoir à déclarer à son assureur une maladie guérie, passé un certain délai. Pour un emprunteur qui devient éligible au droit à l’oubli en cours de prêt, la résiliation annuelle lui permettra de ne plus payer les surprimes liées à sa maladie passée (qui peuvent atteindre 300 % de la prime de base).
Par ailleurs, l’idée avancée que la mutualisation reculerait quand la concurrence avance ne résiste pas à l’analyse. Rappelons tout d’abord que tous les assureurs, y compris les banques, proposent des couvertures dont la prime varie en fonction de l’âge et de l’état de santé. En outre, les marges sur les personnes présentant un risque aggravé de santé sont elles aussi très élevées, estimées à 60 % par l’UFC – Que Choisir. Enfin, les assureurs alternatifs, qui couvrent 15 à 20 % du marché, représentent 43 % des dossiers d’emprunt de personnes malades, selon le cabinet d’actuaires BAO. Preuve que les nouveaux entrants ne rechignent pas à couvrir les risques de santé.
Décidée à rendre effective la concurrence sur le marché de l’assurance emprunteur au bénéfice de tous les consommateurs, l’UFC-Que Choisir, mobilisée de longue date sur le sujet, demande aux députés d’officialiser explicitement, dans le projet de loi « Sapin 2 », le droit des souscripteurs à la résiliation annuelle des assurances emprunteurs des crédits immobiliers.