Meurthe et Moselle
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Le château de Lunéville serait-il à vendre ?

Un collectif intitulé « Lunéville, un château pour tous » s’indigne de la construction d’un hôtel de luxe dans les anciens appartements ducaux. Jack Lang, ancien ministre de la Culture s’en émeut auprès du président du Conseil départemental. Une pétition circule.

Château de Lunéville, côté Parc (Photo YR)
Château de Lunéville, côté Parc (Photo YR)

Voici le communiqué de presse du collectif intitulé « Vide château »

« Une « grande braderie » est en cours au Château de Lunéville, propriété du Département de Meurthe-et-Moselle. Tout doit disparaître avant… l’installation d’un complexe hôtelier !

Qu’est devenue l’émotion soulevée en 2003 après l’incendie ravageur de ce palais, tout près de Nancy capitale des ducs de l’Etat indépendant de Lorraine, où s’illustra la circulation européenne des idées des Lumières au 18ème siècle ? La caution apportée par des personnalités prestigieuses : l’archiduc Otto de Habsbourg-Lorraine, Élisabeth Badinter, le recteur Christian Forestier…et bien d’autres ? La mobilisation populaire, celle des mécènes, celle de l’argent public par la Région et l’État, autour des regrettés Michel Dinet Président du Département et Michel Closse Maire de Lunéville ? 50 millions € de travaux réalisés pour l’extraordinaire restitution du cœur du château, une somme d’études scientifiques aux meilleurs niveaux agréés, des programmes pertinents et financièrement réalistes mis en œuvre par des groupes de compétences : treize ans d’un effort collectif considérable, justifié parce qu’il liait le contenant à son contenu, l’utilité du monument bien public à la générosité sociale et culturelle d’un programme d’intérêt général. Où en est-on aujourd’hui ?

Lettre de Jack Lang au président du Conseil départementale de Meurthe-et-Moselle

Un business plan fantaisiste

Voici ce que révèlent les derniers documents sur les choix du nouveau président du Département, avant leur annonce aux publics tenus à l’écart. Le château de Lunéville devra être confié à l’exploitation privée d’un complexe : hôtel de 50 chambres dans les appartements ducaux, restaurant et salles de séminaires ; une emprise de deux tiers des surfaces augmentée de la suppression de la gratuité d’accès aux Jardins pour s’ajuster à la jouissance privilégiée d’un château-hôtel.
A l’appui : un « business plan » doublement falsifié par des investissements sous-estimés éludant soigneusement qui seraient les investisseurs privés à hauteur des sommes requises, et par des recettes surévaluées ignorant la concurrence existante des offres régionales.
La potion magique du partenariat public-privé n’est utile que si on sait à quoi on veut le faire servir ; quel serait le bénéfice pour le plus grand nombre si des groupes financiers versatiles s’offraient la plus grosse part du site sauvé par l’effort collectif ? Une telle « étude » bâclée rejoint celles vendues depuis des décennies par des faiseurs de « prêt à porter » pour habiller le patrimoine, dont les recettes éculées se sont le plus souvent soldées par des échecs, acculant nombres de collectivités dans des impasses.

Inconséquence, incohérence, désinvolture

Comment en est-on arrivé là ? En quelques mots.
Inconséquence : au motif de difficultés budgétaires pour servir d’autres priorités certes respectables, le désinvestissement a été décidé en faisant table rase des programmes engagés. On a cru pouvoir se décharger du site plus rapidement en le vidant de son sens pour pouvoir le transférer à la Région Grand-Est. Mais en présentant un contenant coûteux sans contenu fort, le château n’a séduit personne et n’a reçu qu’une fin de non recevoir !
Incohérence : l’achat de la moitié des surfaces du château – encore sinistrées – au ministère de la Défense a eu pour conséquence le départ de l’État. Ce copropriétaire majeur qui avait assuré sa part en rétablissant « le clos et le couvert » a donc reçu 10 € pour ne plus avoir la charge de près de 40 millions € de de travaux de restauration intérieure, et sans nouvelle contrepartie pour le château !
Désinvolture : qui conduit, en seule issue à l’organisation du vide et aux réticences financières de la Région, à de s’en remettre, isolé, aux fantasmes de privatisation.
Le plus grave est que la caution donnée à ce mauvais produit achève de décrédibiliser l’avenir du palais de Lunéville. Déjà des programmes permanents ont été évacués du site en déchirant les conventions qui impliquaient des institutions : formations et projet de développement avec le Conservatoire national des Arts et Métiers (CNAM fondé en 1794 par l’abbé Grégoire natif du lunévillois), Institut d’histoire culturelle européenne avec l’Université de Lorraine. Coopérations abandonnées, capitaux provisionnés dilués, ressources humaines dispersées, « tout ça pour ça » s’interloquent donc les contribuables.

Le prix de la médiocrité

L’incurie s’augmente de la gabegie. On repart de zéro : les achats de nouvelles « études » gigognes s’additionnent au coût de la « direction de projets » : près de 500 000 € ont déjà rémunéré des médiocres brouillons superflus et sans ambitions ni culturelle ni économique. Depuis 4 ans de vide château, la prolongation de quelques animations ne maintient plus qu’une veilleuse au lieu des Lumières.

Pour un véritable avenir

Pourtant tout existe encore dans les réflexions et les acquis écartés pour réussir le « Château de Lunéville et des Lumières », au plus haut niveau d’un avenir unique et durable.
Indignez-vous ! Lunévillois à qui seront retirés les espaces du dynamisme économique et de la vie sociale, Lorrains qui perdront un site aussi moteur qu’emblématique.
Mobilisons-nous citoyens détenteurs des biens communs, pour les monuments qui doivent rester utiles à notre double responsabilité d’en faire les lieux ouverts à tous pour l’appropriation de l’Histoire par une culture vivante, et des accueils de l’Europe et du monde.
La volonté publique fait consensus, ne manque que son respect par la volonté politique. »

Collectif « Lunéville, un château pour tous »

Le Château de Lunéville en quelques repères

Chateau de Lunéville, côté cour (Photo YR)

Localisation :
– En région Grand-Est, centre-ville de Lunéville, ville de 20 000 habitants au sud de la Meurthe et Moselle (30 km au sud de Nancy, 120 km à l’ouest de Strasbourg, 50 km au nord-ouest de Saint-Dié des Vosges)

Histoire
– Edifié au début du 18ème siècle sous le règne de Léopold 1er, Duc de l’Etat indépendant de Lorraine. Architecte : Germain Boffrand.
– Résidence ducale de Stanislas Leszczynski, roi de Pologne, duc de Lorraine et gendre de Louis XV (Sa fille Marie Leszczynska, reine de France)
– Foyer des Lumières, Voltaire, Emilie du Châtelet, Montesquieu, Helvétius y séjournent.
– Le duché de Lorraine est rattaché à la France en 1766 à la mort de Stanislas. Le mobilier est dispersé, les folies du parc détruites dont le célèbre Rocher aux automates (88 automates mus par la force hydraulique) et la Table volante ornant les appartements ducaux (l’une des premières en Europe).
– Le château abrite ensuite des régiments de cavalerie dont les prestigieux Gendarmes Rouges, des régiments d’infanterie et un mess des officiers réputé.

1950 – 2000 :
– Dans les années 1950, Il est cédé en partie à la ville de Lunéville qui entretient son parc (19 ha) et les collections du musée. Les vastes bâtiments (22 000 m² de surfaces de planchers) abritent des services administratifs (Impôts, police, pompiers, associations)
– En l’an 2000, le département de Meurthe et Moselle reprend à sa charge l’ensemble de la propriété de la ville avec pour objectif de faire du château un moteur culturel, touristique, social et économique à l’échelle locale et régionale. Un projet de restauration est mis à l’étude.

L’incendie du 2 janvier 2003 – un chantier patrimonial et culturel

Le 2 janvier 2003, un gigantesque incendie ravage tout le flanc sud du château dont les parties les plus nobles du château (chapelle, appartements ducaux)
Après l’émoi, commence un vaste programme de reconstruction et de restauration soutenu par une mobilisation populaire remarquable et avec le soutien de nombreuses personnalités et de la Fondation du Patrimoine. C’est un des plus grands chantiers européens de restauration. Maître d’œuvre : Pierre-Yves CAILLAULT, Architecte en chef des monuments historiques.
Une première tranche restaurée, comprenant la chapelle, est livrée en 2010. Le clos et le couvert est achevé en 2013.
Parallèlement, le département, sous l’impulsion de son président Michel Dinet, vote en 2009, à l’unanimité, le projet de développement culturel et touristique du Château des Lumières. C’est ce document qui va orienter la nature des aménagements nécessaires à son exploitation. S’ouvre alors une fructueuse période de réappropriation du château par les Lunévillois et les Lorrains. Une programmation de spectacles et d’événements affirme sa vocation de lieu d’échange et de rencontre, illustré notamment par la création du réseau international des Jardins de Lumières.
En 2012, l’assemblée départementale confirme les orientations prises et vote, une nouvelle fois à l’unanimité, un projet ambitieux de développement avec le CNAM. Celui-ci prévoit notamment l’ouverture de formations mais également le déploiement, dans les appartements ducaux, d’un espace voué à la mise en confrontation des idées des Lumières, du progrès scientifique, du contrat social aux questions posées par notre époque contemporaine.
En 2014, le décès accidentel de Michel Dinet, ralentit la poursuite de ces projets.
En 2018, le nouveau président du conseil départemental, Mathieu KLEIN, lance de nouvelles études et confie au cabinet Horwath « Leader du conseil en Hôtellerie, Tourisme et Loisirs » une étude mettant en perspective l’installation d’un hôtel de luxe dans les appartements ducaux.
La même année, le département de Meurthe et Moselle rachète à l’Etat sa propriété, comprenant les appartements ducaux.

Pétition

Une grande braderie est en cours au Château de Lunéville, propriété du département de Meurthe-et-Moselle. Tout doit disparaître avant… la construction d’un complexe hôtelier.

Qu’est devenu l’enthousiasme soulevé après l’incendie ravageur du château de Lunéville en 2003 ? La caution apportée par des personnalités prestigieuses telles que l’archiduc Otto de Habsbourg-Lorraine, Elisabeth Badinter, le recteur Christian Forestier et bien d’autres ? La mobilisation publique et populaire ? Celle des mécènes ? Et la mobilisation des fonds publics de la Région et de l’Etat qui ont permis l’extraordinaire restitution du cœur du château ? C’est grâce à cette mobilisation, pourtant, que 50 millions d’euros de travaux ont été réalisés, que des études et des projets pertinents furent élaborés.
Treize ans d’efforts !

L’appétit du privé

Qu’en reste-t-il ? Le château devrait être livré aux appétits du privé pour construire, dans les anciens appartements des ducs de Lorraine, un complexe hôtelier de luxe, comprenant 50 chambres, restaurant, salles de séminaires. Et les sublimes jardins seraient réservés à la clientèle fortunée ?
Le business plan, semble des plus fantaisistes. L’investissement frôle les 40 M€. Les recettes sont largement surévaluées dans une ville et une région où il existe suffisamment de lieux d’accueil. Bref, ce projet ressemble fort à ceux que l’on « vend » depuis des décennies aux collectivités par des faiseurs de ‘’prêt-à-porter’’ pour habiller le patrimoine et qui, pour beaucoup, se sont soldés par des échecs.

Le château des Lumières

Comment en est-on arrivé là ? Une mauvaise appréciation des enjeux ajoutés à des choix hasardeux comme l’achat pour 10 € de la moitié des surfaces – encore sinistrées – au ministère de la Défense. Avec pour conséquence le départ de l’Etat, ce copropriétaire majeur.
Dès lors, ne restait plus qu’à se tourner vers le privé en abandonnant tout ce qui a été fait depuis 2003 : capitaux provisionnés dilués, ressources humaines dispersées…
Le château des Lumières mérite mieux que ce funeste projet immobilier réservé à quelques riches voyageurs. C’est un lieu chargé d’Histoire : celle de Lunéville, de la Lorraine, de la France et même de l’Europe. Il est de notre responsabilité d’en faire un lieu de rencontres et d’échanges. Un édifice au rayonnement régional et international ouvert à tous.
Tout est en place pour réussir ce pari. Ne manque que la volonté politique.

NON à un complexe hôtelier dans les appartements ducaux

 Nom :  _________________________  Prénom : _______________Ville :  ___________                          

Qualité (facultatif) : ______________________    Signature :

Collectif « Lunéville, Château pour tous » – chateaupourtous@gmail.com

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