Naomi Kawase signe un film touchant sur l’image et la perception.
« Un groupe d’écoliers traverse la rue, d’autres vont au travail ou à l’école, un travailleur flâne portable à la main, un conducteur impatient… », Misako décrit une banale scène de rue. Un entrainement quotidien pour son métier d’audio-descriptrice, elle raconte les films à ceux qui ne peuvent pas les voir, les non-voyants.
Misako, incarnée par la très jolie Ayame Misaki, est l’un des personnages principaux du film de Naomi Kawase, « Vers la lumière » (sortie le 10 janvier), présenté en compétition au Festival de Cannes l’an dernier. Un beau film, touchant, dans lequel la cinéaste japonaise (qui avait tourné « Les délices de Tokyo », un régal), évoque le cinéma, et surtout sa perception lorsqu’on est privé d’un sens, la vue, et donc privé de ses images.
Parmi les conseillers chargés de donner leur avis sur l’audio-description de Misako, un grand photographe, Nakamori (Masatoshi Nagase), qui devient progressivement aveugle. D’abord brutal avec la jeune fille, il va lui permettre de mieux accomplir sa tâche, de mieux faire sentir, ressentir, le film projeté. Ce film raconte les liens qui se tissent entre « un homme qui perd la lumière et une femme qui la poursuit ». A lui, il manque l’image, puisque tout s’efface, petit à petit, jusqu’à le priver de son métier. A elle, il manque parfois les mots, afin de mieux faire « voir », percevoir une sensation, une émotion.
C’est avec une grande douceur que Naomi Kawase évoque ce drame, jouant avec les ombres, l’invisible, les éclats de lumière. Mais si « la lumière est le cinéma », dit-elle, sa belle image est aussi magnifiée par la splendide mélodie composée par Ibrahim Maalouf.
Patrick TARDIT
« Vers la lumière », un film de Naomi Kawase (sortie le 10 janvier).