La plainte contre X déposée au parquet de Mulhouse par l’association anti-corruption AC!! met en lumière une affaire délicate impliquant Pascal Sommerhalter, maire de Mooslargue (68) et notaire de profession, accusé de prise illégale d’intérêts dans l’acquisition d’une parcelle forestière.

Une acquisition suspecte en plein cœur de la forêt
L’affaire concerne une parcelle forestière de moins de 25 ares, située dans la commune de Mooslargue dans le Haut-Rhin. Pascal Sommerhalter, qui cumule les casquettes de maire depuis 2014 et de notaire, aurait acquis en août 2024 cette parcelle boisée dans des conditions juridiquement douteuses.
Le problème réside dans le non-respect du droit de préemption forestier. Cette parcelle, contiguë à une propriété communale, aurait dû faire l’objet d’une notification préalable à la commune, qui disposait d’un droit de préemption prioritaire selon l’article L331-22 du Code forestier.
Un processus administratif inversé
Les faits révèlent une chronologie troublante. Alors que Pascal Sommerhalter, en tant que notaire, transmet bien une déclaration d’intention d’aliéner (DIA) à la SAFER le 2 avril 2024, il omet d’informer la commune qu’il dirige. La vente est finalisée le 5 août 2024, et ce n’est que le 10 décembre suivant qu’il inscrit à l’ordre du jour du conseil municipal une délibération sur la renonciation au droit de préemption, alors que la transaction est déjà bouclée.
Cette présentation « manifestement trompeuse » selon la plainte déposée par l’association Anti-Corruption AC !! masque le fait accompli et prive la commune de son droit légitime de préemption.
Des liens familiaux compliquent l’affaire
L’affaire prend une dimension supplémentaire avec l’implication d’un conseiller municipal et fils des vendeurs originaux de la parcelle. Ce dernier participe aux débats et au vote sans révéler sa situation personnelle, ajoutant une couche de complexité aux conflits d’intérêts présumés.
Plus troublant encore, l’enquête révèle qu’une situation similaire s’était déjà produite en 2015, lorsque le même Pascal Sommerhalter avait acquis une autre parcelle contiguë au domaine communal, sans qu’aucune trace n’apparaisse dans les procès-verbaux municipaux.
Les enjeux juridiques de la prise illégale d’intérêts
La plainte s’appuie sur l’article 432-12 du Code pénal, qui réprime la prise illégale d’intérêts. Cette infraction, passible de cinq ans d’emprisonnement et 500 000 euros d’amende, vise les élus qui conservent un intérêt personnel dans une opération relevant de leur mandat.
La jurisprudence est claire : peu importe que l’élu ait cherché un gain personnel ou que son intérêt soit contradictoire avec l’intérêt général. L’infraction est constituée dès lors qu’il y a cumul entre fonction publique et intérêt privé, même indirect.
Une commune aux pratiques contrastées
L’ironie de l’affaire réside dans le contraste des pratiques municipales. Moins d’un an auparavant, en décembre 2023, le même conseil municipal avait décidé à l’unanimité d’exercer son droit de préemption sur une parcelle forestière similaire, « considérant que la commune souhaite constituer une réserve foncière en forêt ». Cette décision antérieure souligne d’autant plus l’irrégularité de la procédure de 2024.
Ce dossier, désormais entre les mains du parquet de Mulhouse, illustre les zones grises du cumul des mandats et fonctions, particulièrement sensibles dans les petites communes rurales où les mêmes personnes peuvent occuper plusieurs positions influentes simultanément.
Nous avons adressé un mail à M. Sommerhalter, maire de Mooslargue et par ailleurs notaire, pour lui demander son avis sur cette ténébreuse affaire. C’était le 4 juin 2025. A ce jour, il ne nous a toujours pas répondu, ni par mail ni par téléphone. Nous lui donnerons volontiers la parole dès qu’il souhaitera s’exprimer dans nos colonnes.
PV du conseil municipal 12 décembre 2024
LivreFoncier section 4 parcelle 95_Mooslargue
2025