Le Conseil d’État suspend la décision ministérielle interdisant de sanctionner la chasse illégale des oies cendrées jusqu’au 12 février 2017.
Le 25 janvier 2017, Ségolène Royal, ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer a ordonné à la police de la chasse de ne pas verbaliser les chasseurs tirant les oies cendrées jusqu’au 12 février 2017. Le juge des référés du Conseil d’État estime que le ministre ne peut pas ordonner aux services de la police de la chasse de ne jamais sanctionner un acte de chasse illégal. Il suspend donc la décision : la chasse illégale des oies cendrées peut de nouveau être sanctionnée.
En vertu d’un arrêté du 19 janvier 2009, la chasse aux oies est fermée le 31 janvier de chaque année. Cependant, par une décision du 25 janvier 2017, la ministre de l’Environnement, de l’énergie et de la mer a ordonné à la police de la chasse de ne pas verbaliser les chasseurs tirant les oies cendrées jusqu’au 12 février 2017. La Ligue de protection des oiseaux a demandé au juge des référés du Conseil d’État de suspendre l’exécution de cette décision.
La procédure du référé-suspension, régie par l’article L. 521-1 du code de justice administrative, permet en effet d’obtenir dans un bref délai la suspension d’un acte administratif en attendant que le juge se prononce définitivement sur sa légalité lorsque deux conditions sont simultanément réunies : il faut qu’il y ait une situation d’urgence justifiant la suspension et qu’il y ait un doute sérieux sur la légalité de la décision administrative contestée.
Le juge a estimé que, bien qu’un nombre réduit d’oiseaux seraient probablement chassés durant les jours restant jusqu’au 12 février, la décision ministérielle interdisant la sanction d’actes de chasse illégaux, sans que soit avancé un motif d’intérêt général justifiant cette mesure, créait une situation d’urgence du fait notamment des prélèvements d’oies pouvant être opérés et des troubles créés pour l’ensemble de la faune en zone humide.
D’autre part, le juge des référés a estimé que l’argumentation tirée d’une méconnaissance de l’interdiction de chasser les oies cendrées après le 31 janvier créait un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée.
Il a donc suspendu l’exécution de la décision ministérielle : la police de la chasse peut de nouveau sanctionner, selon le droit commun, des actes illégaux de chasse d’oies cendrées.
LA LPO OBTIENT LA SUSPENSION
DU BRACONNAGE DES OIES
On se souvient de l’émotion suscitée par les déclarations de la Ministre Ségolène Royal devant l’Assemblée Nationale le 25 janvier déclarant qu’elle ne prendrait pas d’arrêté pour prolonger la chasse aux oies après le 31 janvier, reconnaissant que ce serait illégal. Et que, par conséquent, elle donnerait des consignes orales pour ne pas verbaliser les contrevenants. Saisi en urgence par la LPO, le Conseil d’État suspend cette décision inique.
Résultat : voilà une semaine que les coups de feu résonnent dans les marais après la fermeture de la chasse. Assurés d’impunité, des chasseurs-braconniers s’en donnent à cœur joie. Qui sait combien d’oies cendrées et autres canards, limicoles, etc… auront été victimes de cette « complicité bienveillante » ?
Pourtant la science, le droit et la justice sont sans interprétation possible.
La science, ce sont les études les plus sérieuses qui témoignent des dates du début de la migration. Y compris celle conduite par l’ONCFS en charge par ailleurs… de faire respecter le droit avec la police de la nature. On comprend mieux l’insistance des responsables cynégétiques majoritaires au CA de cet établissement public de ne pas fusionner avec la toute nouvelle Agence française de la biodiversité. Et jusqu’à refuser de travailler en bonne intelligence avec elle (Cf.motion contre la mutualisation votée le 11 janvier).
Le droit, c’est la directive européenne sur les oiseaux, traduite en droit français qui dit logiquement qu’on ne chasse pas les oiseaux qui ont commencé leur migration vers leur lieu de reproduction. Le droit européen a été rappelé à la Ministre Ségolène Royal par le Commissaire Européen Karmenu Vella le 13 mars 2015.
La justice enfin, ce sont les décisions constantes du Conseil d’État qui, depuis 20 ans, casse les choix ministériels de prolonger la chasse aux oies cendrées après le 31 janvier. Avec cynisme, les différents ministres prennent des arrêtés en méconnaissance totale avec la jurisprudence, sachant que leur arrêté inique ne sera cassé qu’après la période de braconnage.
Suivant l’annonce ministérielle, les agents de l’ONCFS ont reçu des consignes pour ne plus aller dans les marais depuis 31 janvier et ce jusqu’au 12 février afin d’éviter d’avoir… à faire leur travail ! En conséquence, les actions les plus élémentaires de surveillance contre la propagation de la grippe aviaire sont stoppées. Du reste, les chasseurs-braconniers amènent des oies domestiques dans les marais comme appelants, en contact avec les oiseaux sauvages.
« … la décision ministérielle interdisant la sanction d’actes de chasse illégaux, sans que soit avancé un motif d’intérêt général justifiant cette mesure, crée une situation d’urgence du fait notamment des prélèvements d’oies pouvant être opérés et des troubles créés pour l’ensemble de la faune en zone humide… l’argumentation tirée d’une méconnaissance de l’interdiction de chasser les oies cendrées après le 31 janvier crée un doute sérieux sur la légalité de la décision contestée ». En conséquence l’exécution de la décision ministérielle est suspendue : la police de la chasse peut de nouveau sanctionner, selon le droit commun, des actes illégaux de chasse d’oies cendrées.
La LPO a déjà écrit à la Ministre Ségolène Royal pour lui demander de donner des consignes claires afin que la police de la nature se déploie rapidement pour faire stopper les actes de braconnage dès aujourd’hui. Il est temps que les migrateurs puissent reprendre leur route sans risquer un coup de fusil.
Par ailleurs, Allain Bougrain Dubourg dépose plainte au nom de la LPO devant la Cour de Justice de la République aujourd’hui mardi 7 février.