Sur l’année écoulée, de mars 2020 à mars 2021, l’excès de mortalité dans le Grand Est a atteint 18,2 % par rapport aux cinq années précédentes (Insee).
Dans le Grand Est, 62 400 décès ont été enregistrés entre le 1er mars 2020 et le 28 février 2021, contre 52 800 décès en moyenne par an pour les cinq années précédentes (2015 à 2019), soit un excès de 18,2 %, ce qui place la région en troisième position derrière l’Île-de-France (+ 22,5 %) et Auvergne-Rhône-Alpes (+ 20,1 %).
Deux périodes de surmortalité importante
Il existe deux périodes de surmortalité importante : une première vague très intense sur moins de dix semaines, au printemps 2020, avec un pic enregistrant 2,2 fois plus de décès que lors des semaines correspondantes de la période de référence, et une deuxième vague, débutant mi-octobre, moins haute mais plus longue (figure 1a).
Durant la première période de surmortalité, entre le 2 mars et le 10 mai 2020 (semaines 10 à 19), l’excès de mortalité a été de 48,7 %, soit 5 100 décès supplémentaires ; durant la deuxième période, entre le 12 octobre 2020 et le 28 février 2021 (semaines 42 à 8), il a été de 19,0 %, soit 4 100 décès supplémentaires. Dans la région, cette deuxième période est d’un niveau équivalent à celle de la France métropolitaine, contrairement à celle du printemps 2020.
Le Haut-Rhin, la Meuse et les Vosges, davantage touchés
Cet excès de mortalité est variable selon les départements de la région. Ainsi, de mars 2020 à mars 2021, il est supérieur de 26 % à la moyenne quinquennale dans le Haut-Rhin, de 16 à 21 % dans les départements lorrains, dans le Bas-Rhin et en Haute-Marne, et de 11 à 13 % dans les autres départements champenois (figure 1b).
C’est dans le Haut-Rhin que la surmortalité atteint le niveau le plus élevé : 2,5 fois plus de décès en mars 2020 que la moyenne des cinq années précédentes, et jusqu’à 4 fois plus au cours de la semaine 13 (23-29 mars) ; en revanche, l’intensité de surmortalité est beaucoup plus faible durant la deuxième période dans ce département.
Dans les Vosges, l’excès de mortalité dépasse les 60 % pendant plusieurs mois : en mars et avril, puis en décembre 2020. Le fait que les personnes âgées de 75 ans et plus vivent un peu plus souvent en maisons de retraite y a sans doute contribué ; celles-ci sont classées parmi les collectivités les plus à risque de transmission et de diffusion du Sars-CoV-2 par Santé publique France (12 % des 75 ans et plus résidant dans les Vosges vivent en communauté, contre 11 % pour le Grand Est et 10 % pour la France métropolitaine). La part des décès en établissement pour personnes âgées (EPA) entre mars 2020 et mars 2021 y est également un peu plus élevée que la moyenne régionale (19 % contre 16 %).
Aucune surmortalité en dehors du Covid
Dans les autres départements, l’évolution de la surmortalité durant ces périodes se distingue assez peu du reste de l’année. Cependant, dans les départements peu peuplés, les courbes doivent être interprétées avec précaution, en raison d’un effet « petit nombre » : un faible nombre de décès hebdomadaires sur 2015-2019 peut expliquer de fortes fluctuations en 2020 ou 2021.
En dehors de ces deux périodes, aucune surmortalité n’est observée, sauf localement lors de la canicule du mois d’août 2020, pendant les semaines 31 et 33 (celles du 27 juillet et du 10 août), avec à chaque fois 15 % de décès supplémentaires dans la région, bien visibles dans les EPA. Cela a particulièrement touché la Meurthe-et-Moselle et la Meuse, mais c’est sans commune mesure avec l’excès dans les Hauts-de-France (+ 47 % d’excès de mortalité en semaine 33).
De nombreux décès de personnes âgées, à l’hôpital ou en clinique
C’est dans les EPA que l’on observe les plus fortes surmortalités : 96 % et 15 % pendant les première et deuxième vagues, soit 40 % sur toute la période. Les décès à domicile et à l’hôpital ont augmenté respectivement de 23 % et 12 % sur les douze mois par rapport à la moyenne quinquennale 2015-2019.
Les décès excédentaires concernent les 80 ans ou plus. C’est cette classe d’âges qui a payé le plus lourd tribut durant l’épidémie de coronavirus ; elle représente les deux tiers de l’excès de mortalité, le dernier tiers se rapportant aux 70-79 ans, les autres tranches d’âges ayant été peu ou pas touchées.
La surmortalité concerne un peu plus les hommes : 4 à 5 points d’écart entre hommes et femmes, quelle que soit la vague. Cette surmortalité masculine est encore plus importante à partir de 70 ans
Une surmortalité dans les communes densément peuplées
Dans la région Grand Est, au printemps 2020, l’excès de mortalité s’avère d’autant plus important que la commune est dense. En effet, la surmortalité est de 60 % dans les communes densément peuplées et de 15 % dans celles qui sont très peu denses. Il en est de même en Île-de-France (91 % et 13 %) ou en Bourgogne-Franche-Comté (51 % et 7 %). Ce n’est en revanche plus le cas lors de la deuxième vague : dans laquelle l’excès de mortalité n’a pas atteint les niveaux du printemps. En effet, dans le Grand Est, ce sont les communes les plus denses qui présentent alors le taux le plus faible (19 %) et les communes de densité intermédiaire qui ont le taux le plus élevé (24 %).
La mortalité due au Covid-19 toujours présente pendant l’hiver
Un excédent de mortalité apparaît en janvier et février 2021, alors que ces mois connaissent généralement un surcroît de décès pour les personnes âgées de 80 ans et plus. Ce dernier peut être assez important certaines années, comme ce fut le cas durant l’hiver 2016-2017. Les infections respiratoires aiguës dues aux pneumonies, grippes et autres virus sont en effet plus fréquentes de décembre à mars, d’où une surmortalité de 20 à 35 % durant cette période, par rapport aux mois d’été comptant le moins de décès (juin et septembre). Cependant, les décès dus au Covid existent toujours, ce qui supposerait une moindre présence des autres infections respiratoires cette année. Le nombre de décès semble décroître à partir de fin février 2021, comme c’est habituellement le cas.