Après la fin de la première guerre mondiale furent érigés plus de 36.000 monuments à la gloire des soldats morts pour la France. Quelques-uns se veulent pacifistes, comme à Gentioux-Pigerolles (Creuse).
Il y a cent un ans, le 11 novembre 1918, prenait fin le premier conflit mondial mettant un terme à une épouvantable boucherie : environ 9 millions de morts et 8 millions d’invalides. En France, on dénombre 1,4 million de morts et 3 millions de blessés sur une population de 40 millions d’habitants. Les dégâts matériels sont immenses : on ne compte pas les villages rayés de carte, les villes défigurées, les moments détruits.
Il faut rendre hommage aux valeureux soldats, souvent bien trop jeunes pour mourir. Entre 1918 et 1926, furent érigés 36.000 Monuments aux Morts sur lesquels fut gravé le nom des ‘’morts pour la France’’.
Rappelons que le premier exemple français de monument sur lequel a été gravé le nom des combattants est celui de la Porte Désilles, à Nancy, érigé en 1784 pour commémorer l’indépendance des Etats-Unis et glorifier le sacrifice des Nancéiens à la bataille de Yorktown.
Pacifistes de tous les pays
Les Monuments aux Morts construits après 1918 sont de style très différent, selon la région et selon la couleur politique de la municipalité d’alors.
Dans les trois départements d’Alsace et de Moselle où les soldats sont morts sous l’uniforme allemand, il est inscrit « A nos morts » et non « Morts pour la France ».
Dans les communes où les élus sont nettement à droite, le monument aux morts sera surmonté d’une statue de soldat portant un fusil et une couronne de laurier symbolisant la victoire sur l’ennemi.
Dans les communes plus à gauche, on préfère marquer la tristesse et le deuil et bannir la guerre. Un exemple de Monument aux Morts pacifiste se trouve à Gentioux-Pigerolles, dans la Creuse.
La chanson de Craonne
Les deux communes de Gentioux et de Pigerolles ont fusionné en 1972. Elles conservent les deux Monuments aux Morts. L’un, à Pigerolles, ressemble à beaucoup d’autres. L’autre, à Gentioux, est sans doute le plus connu des monuments aux morts pacifistes. Il fait l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le 9 février 1990.
« Plutôt qu’un Poilu, j’ai voulu traduire un cri du cœur, expliquera M. Duburgt, conseiller municipal et ébéniste dont le projet fut retenu par le conseil municipal. J’ai donc dessiné un orphelin en tenue d’écolier montrant du doigt cette inscription gravée dans la pierre et qui était alors sur toutes les lèvres : Maudite soit la guerre. » 63 noms sont gravés sur une plaque de marbre dont celui des 58 victimes de la guerre 1914-18, plusieurs familles ayant perdu deux ou trois enfants.
Chaque 11 novembre, les militants des associations et de différents partis politiques viennent se recueillir au pied du monument de Gentilloux. Certains entonnent la chanson de Craonne (un chant antimilitariste interdit par le commandement militaire français pendant la guerre 14-18).
Puis, ils vont déposer une gerbe de fleurs sur la tombe de Félix Baudy, fusillé pour l’exemple en 1915, enterré dans la commune voisine de Royère-de-Vassivière (Creuse). Sur sa sépulture, une plaque sur laquelle on peut lire : « Maudite soit la guerre, Maudits soient ses bourreaux. Baudy n’est pas un lâche mais un Martyr ».
Le Monument aux Morts de Gentioux-Pigerolles est devenu le symbole du pacifisme et du refus de la guerre.
De toutes les guerres.