Les membres du conseil d’administration ont été prévenus : les salaires de septembre pourraient ne pas être payés. Inquiétant pour une association bénéficiant de l’agrément pour la formation des élus.
Gros malaise à l’Association nationale des élus locaux d’opposition (AELO) depuis que les 15 administrateurs de l’association ont reçu, en juillet dernier, une « alerte » sur la situation financière préoccupante de leur structure. Elle est signée par la trésorière, Claudette Guiraud, conseillère municipale de Saint-Cyprien (66). Le conseil d’administration apprend ainsi qu’il y a « de gros problèmes » et qu’il faut prendre rapidement « des mesures drastiques, car on va droit dans le mur ». En effet, fin septembre, les salaires pourraient ne pas être payés s’il n’y a pas une rentrée exceptionnelle d’argent.
Le président se fâche
Or, depuis le mois de juillet, il ne s’est pas passé grand-chose et il n’y a pas eu de rentrée d’argent frais. D’où une nouvelle alerte, le 11 septembre 2023. Et que croyez-vous qu’il arriva ? Le nouveau président de l’association depuis avril 2023, Jean-Paul Lefebvre, conseiller municipal de Noisy-le-Sec (93) s’est fâché tout rouge. Contre qui ? Contre celle qui avait cru bon d’alerter les administrateurs.
Dans un mail qui nous a été adressé, on peut lire ces fortes paroles :
« Bonjour Claudette,
Depuis la fin juin et ma dernière réunion de travail à Saleilles [NDLR- Siège de l’AELO], je constate une forte dégradation de ton comportement :
– mail abusivement alarmiste envoyé le 31 juillet aux administrateurs sans concertation préalable avec moi ;
– envoi d’un prévisionnel grossièrement erroné à l’Airdie de façon à saboter la demande de prêt ;
– absence totale de suivi de la facturation, de l’encaissement et de contrôle de l’activité du « responsable administratif et financier » alors qu’il s’agissait de ta responsabilité ;
– mauvaise gestion des inscriptions aux formations ;
– refus d’appliquer les directives de gestion résultant de la procédure Qualiopi
– poursuite de contacts alarmistes et dénigrants à mon égard auprès d’administrateurs ;
– absence de remise de tous les dossiers (papier et numérique) AELO de formation et de facturation que tu détiens chez toi ;
– non-respect des consignes formelles que j’ai données pour les opérations de gestion ;
– menaces et comportement inapproprié à l’égard des salariées du siège ;
– envoi d’un mail inadmissible ce jour aux administrateurs ;
– l’ensemble de ton comportement relève d’une attitude négative et destructrice de l’AELO. »
« Tu n’es pas trésorière en titre »
Le président poursuit : « La confiance entre le président et la trésorière sont indispensables.
Au surplus, tu n’es pas trésorière en titre, mais seulement administratrice ayant reçu une délégation de la précédente présidente, délégation que j’ai maintenue lors de ma prise de fonctions, car j’ai cru pouvoir te faire confiance.
Dans ces conditions et pour les motifs rappelés ci-dessus, j’ai décidé de te retirer toute délégation de gestion de l’AELO à compter de ce jour.
Je te demande de cesser toute intervention sur le compte bancaire de l’association à effet immédiat et de restituer la carte bancaire en ta possession.
Je regrette vivement d’être obligé de prendre cette décision mais ton attitude ne me laisse pas le choix dans l’intérêt de l’AELO.
Bien entendu, je suis obligé d’informer le conseil d’administration des dispositions précitées sauf si tu m’adresses ta démission avant 12h ce jour.
Avec mes salutations attentives. »
Signé : Jean-Paul Lefebvre
Des embauches, une démission
L’association AELO a été créée en 2010, notamment, par Clotilde Ripoull, conseillère municipale d’opposition de la ville de Perpignan de 2008 à 2014. Objet : « exercer au sein du conseil municipal un rôle de proposition, de contrôle et de contre-pouvoir, rôle essentiel pour le fonctionnement de la démocratie locale. »
Ses ressources financières sont composées de la cotisation des quelque 640 adhérents (environ 25.000 €) et de la formation des élus pour un chiffre d’affaires global de 240.000 €/an.
Les charges sont composées des salaires à verser aux quatre employés, plus les charges patronales, plus une indemnité annuelle de 10.000 € au président, plus ses frais de représentation.
Selon plusieurs administrateurs, c’est l’embauche de deux nouvelles salariées, en 2021 et 2022 -qui étaient sur la liste électorale de Clotilde Ripoull aux dernières municipales de Perpignan- qui aurait déséquilibré la comptabilité de l’association.
Si tous les administrateurs que nous avons appelés reconnaissent que la formation dispensée aux élus est « de qualité », une administratrice, Anne-Lise Auffrey, élue de Mesnil-Le-Roy (78) a démissionné « il y a quelques jours » alors qu’elle a été élue au conseil d’administration lors de l’AG de juin 2023. « J’avais des interrogations, je n’ai pas obtenu de réponse du président. J’ai préféré ne plus être associée aux décisions, tout en restant membre de l’association.
« Ce sont des informations confidentielles »
« Il s’agit d’informations confidentielles et internes à un organisme de droit privé qui est une association régie par la loi de 1901, nous répond Jean-Paul Lefebvre, conseiller municipal de Noisy-le-Sec (93), président de l’AELO depuis juin dernier. Toutes ces informations que Mme Guiraud a cru devoir vous divulguer le sont sous sa responsabilité [NDLR-Petite erreur, nos infos proviennent d’une source extérieure à l’association]. Moi, je ne ferai aucun commentaire, je ne confirmerai ni n’infirmerai aucune information à caractère confidentiel sur le fonctionnement interne d’une association de droit privé dont je suis le président. Je ne suis soumis à aucune obligation. »
Nous faisons observer au président que l’association reçoit des fonds publics. Réponse : « Certes, nous sommes soumis à des contrôles, des audits, notre agrément vient d’être renouvelé… Nous appliquons des règles de gestion interne parfaitement rigoureuses. Je n’ai pas de comptes à vous rendre. »
Affaire à suivre.