Un film d’horreur (« Chime ») et un polar (« Cloud ») tournés par le cinéaste japonais arrivent sur nos écrans. Avant un troisième film cet été (« La Voie du Serpent »). Les fans du maître vont apprécier.

Du genre prolifique, le cinéaste japonais Kioshi Kurosawa (« Kaïro », « Tokyo Sonata », « Shokuzai », « Vers l’autre rive », « Les Amants sacrifiés »…) a tourné trois films en un an. Le distributeur français Art House en a programmé deux en une semaine, « Chime » et « Cloud », en attendant la sortie cet été du troisième, « La Voie du Serpent » (13 août), qui a été tourné en France avec Damien Bonnard et Mathieu Amalric.
Connu pour être un « maître de l’angoisse », Kurosawa retourne au cinéma d’horreur avec le moyen-métrage « Chime » (sortie ce 28 mai, 45mn), sélectionné au Festival de Berlin. Et c’est dans le décor banal d’une école de cuisine qu’il installe une atmosphère inquiétante, angoissante, une menace latente, où un indispensable ustensile, un grand couteau de cuisine, devient une arme redoutable. Dans le cours du chef Matsuoka (Mutsuo Yoshioka), Tashiro, un élève bizarre et solitaire rend nerveux le prof, les autres apprentis, et les spectateurs eux-mêmes dans l’attente d’un événement quelconque. « Un peu étrange », Tashiro dit entendre un son obsédant, un carillon dans la tête, fait un sourire bizarre avant de s’enfoncer lui-même (ou pas !?) le fameux couteau.
Présenté au Festival de Reims
Une scène éprouvante qui met à mal la soi-disante zénitude de l’art de la cuisine. A la maison, l’épouse du chef Matsuoka a elle aussi un comportement curieux, quitte le dîner pour aller vider des sacs de cannettes vides. Le prof au fin palais, qui essaie par ailleurs de se faire embaucher dans un restaurant français, « Bistro en ville », va à son tour entendre un carillon. C’est calmement qu’il se mettra un petit pansement sur les doigts, après avoir trucidé une jeune élève.
Après l’horreur, un autre genre, le polar avec « Cloud » (sortie le 28 juin), présenté au Festival du Film Policier de Reims, où Kioshi Kurosawa a reçu un hommage et donné une leçon de cinéma. Cette fois, il est question des nouvelles technologies, de leurs usages et conséquences. Le discret Ryosuke Yoshii (Masaki Suda) refuse la promotion et le poste de manager proposés par son patron, et démissionne de son boulot répétitif à l’usine. Le jeune homme à tête de geek a « un plan », assure-t-il à sa copine, avec la promesse de changer de vie. Son truc, faire de la revente sur internet, acheter des produits invendus au prix le plus bas et les écouler en ligne le plus cher possible.
Magouilles et bonnes affaires

Après un coup à 6 millions de yens, avec des machines thérapeutiques « miraculeuses », l’acheteur froid et inflexible déménage dans une grande maison isolée, dans la montagne, embauche un jeune du coin pour l’aider. Guettant sur l’écran de son ordinateur les ventes s’afficher les unes après les autres, Yoshii fait de l’argent facile en achetant er revendant des machines à café, des sacs à main soi-disant « made in France », des figurines recherchées par les collectionneurs…
De bonnes affaires pour lui, des magouilles pour les autres, Yoshii ne s’est pas fait que des amis, il est recherché par des clients arnaqués, son ancien patron blessé, son ancien associé jaloux… qui lancent une véritable chasse à l’homme, le groupe vivant sa traque et sa mise à mort comme un jeu collectif. Fidèle à lui-même, après un massacre dans une usine désaffectée, le premier geste de Yoshii est de vérifier la courbe de ses ventes. « Cloud » est ainsi une métaphore de la société moderne et mercantile, une critique du capitalisme sauvage, qui ne peut générer que de la frustration et de la violence.
Patrick TARDIT
« Chime » (sortie le 28 mai) et « Cloud » (sortie le 28 juin), des films réalisés par Kioshi Kurosawa.