Hugh Jackman mène la danse dans un spectaculaire Barnum sur grand écran. Chapeau !
Faire du spectacle avec une légende du spectacle, créer un divertissement populaire avec l’inventeur du show-business, c’est ce que fait Hollywood avec le film de Michael Gracey, « The Greatest Showman » (sortie le 24 janvier), dans lequel Hugh Jackman incarne Phileas Taylor Barnum (1810-1891). Un patronyme désormais entré dans le langage courant, un synonyme de cirque.
Et quel cirque, que cette comédie musicale qui se déroule au XIXème siècle, avec des chansons pop-rock du XXIème, écrites par le duo d’auteurs-compositeurs Ben Pasek et Justin Paul (auteurs des paroles de “La La Land” de Damien Chazelle). Le tube à venir « This is me » (« C’est moi ») est à la fois une affirmation de son identité et une revendication de sa différence, chanté par une femme à barbe, une des « attractions vivantes » avec un nain, un géant, un homme-chien, des frères siamois, un tatoué, des trapézistes noirs…
Des créatures abandonnées, rejetées
Des « curiosités », des phénomènes de foire embauchés par Barnum pour faire des entrées dans son Museum new-yorkais, qui sera détruit par un incendie. Avide de reconnaissance sociale, il recherche le sensationnel, l’insolite, et pousse dans la lumière ces créatures abandonnées, rejetées, par la société. Des « Freaks », des monstres, que Tod Browning avait autrefois humanisés dans un superbe film.
Si la morale de l’histoire est la richesse de la différence, c’est bien le show qui domine ce film aux séquences musicales spectaculaires. Hugh Jackman y mène la danse, bien entouré par Michelle Williams en Mme Barnum, Rebecca Ferguson l’élégante diva à la voix d’or Jenny Lind, Zac Efron qui ne peut que tomber amoureux de la virevoltante trapéziste aux cheveux roses, jouée par Zendaya. A l’exemple de Barnum, ce film déploie tous les artifices du spectacle (lumière, musique, costumes, décors…) pour éblouir le spectateur, qui veut sortir de la salle avec le sourire.
Patrick TARDIT
« The Greatest Showman », un film de Michael Gracey (sortie le 24 janvier).
Hugh Jackman : « J’ai grandi avec les comédies musicales »
« Bonjour, ça va ? », dit en français Hugh Jackman, en entrant dans une suite du Bristol, à Paris. Face à une dizaine de journalistes, « l’homme le plus sexy du monde » est aussi le plus cool. « The Greatest Showman », ce n’est pas Barnum, mais lui, l’acteur australien, qui joue la comédie, chante, danse…
En introduction de la cérémonie des Oscars, en 2009, il avait fait un vrai numéro comme au bon vieux temps des « musicals » hollywoodiens, smoking et haut-de-forme sur la tête. Une tenue qu’il retrouve en Monsieur Loyal du Barnum Circus. « J’ai grandi en aimant les comédies musicales, Fred Astaire, Gene Kelly, Singing in the rain… tous ces films », dit-il, « Larry Mark, alors producteur des Oscars et de ce film, m’avait demandé pourquoi on ne ferait pas un musical, j’aime les comédies musicales, mais Hollywood ne les aimait plus ».
« Barnum a inventé le merchandising »
« Je voulais vraiment faire une vraie comédie musicale depuis des années », assure la star, qui a notamment monté un one-man-show musical à Broadway, et incarné Jean Valjean dans une version musicale des « Misérables ». Inventeur du spectacle moderne, du cirque à trois pistes (trois fois plus de spectateurs), de la formule « The show must go on !» (« Le spectacle continue »), P.T. Barnum était un sujet « parfait pour un musical » : « C’est un personnage plus grand que nature, plein de rêves et d’imagination, et voir un tel personnage chanter, danser, cela aide », estime Hugh Jackman, « Son but était de faire payer les gens, aujourd’hui et demain, de leur donner une raison de revenir, il était constamment dans le mouvement, à la recherche du changement, il a inventé le merchandising ».
« En tant que showman, ce que j’admire chez P.T. Barnum c’est l’instinct, il savait ce que le public voulait, il a été critiqué pour avoir exploité ces gens aux physiques différents, mais il a fait faillite plusieurs fois, c’est Tom Pouce, qui vivait chez lui, qui l’a aidé financièrement. Son style n’est pas le mien, mais j’aime ce qui est authentique chez lui », ajoute l’acteur.
Hugh Jackman est célébrissime pour son incarnation de « Wolverine », cette créature poilue aux longues griffes, un des X-Men, des mutants justement rejetés à cause de leur différence, comme les « freaks » du Barnum Circus. « Je n‘avais pas conscience de ce lien lors du tournage, mais je m’en suis rendu compte après, c’est exactement la même chose. Ce sont des personnages différents, qui sont discriminés, si ce n’est que là c’est une histoire vraie. Je n’imagine pas Barnum et Wolverine boire un verre dans un bar, mais ce sont tous les deux des combattants », dit l’acteur.
Chacun à leur façon, les deux personnages ont nécessité une intense préparation physique. « S’entraîner pour Wolverine était douloureux et ennuyeux, mais danser c’est fun », sourit Jackman, « Gene Kelly exigeait huit semaines de répétitions, je ne suis pas Gene Kelly alors j’en ai demandé dix. Le plus effrayant pour moi, si jamais on se loupe, c’est que je ne ferais plus jamais de musical, avec mon nom en grand sur l’affiche de The Greatest Showman, en cas d’échec, c’est fini ».
« Quand on va au cinéma, c’est pour ouvrir son cœur »
Lors de l’avant-première au Gaumont Capucines, l’acteur a rendu hommage aux exploitants de cinéma, et évoqué le rachat de la 21th Century Fox (producteur et distributeur du film) par Disney. « Il y a un vrai défi aujourd’hui, avec Netflix, le streaming, la réalité virtuelle, ce sont des obstacles plus grands qu’à l’époque l’invention de la télé, on a souvent dit que le cinéma était fini, aujourd’hui il faut donner au public des raisons d’aller au cinéma », précisait-il le lendemain matin.
« De mon point de vue, quand on va au cinéma, dans les musées, au théâtre, qu’on lit des livres, c’est pour ouvrir son cœur, on veut rire, on veut pleurer, on veut ressentir qu’on est humain, que la vie peut changer. Quand je vais au cinéma ou au théâtre, je veux d’abord être surpris et touché, si on peut faire les deux c’est parfait », estime Hugh Jackman. A la fin de « The Greatest Showman », s’affiche une fameuse phrase de Barnum : « L’art le plus noble est de rendre heureux ». « C’est ce qu’il a défendu pendant toute sa vie, alors qu’à l’époque le plaisir était associé au péché, à la damnation, la dégradation à jamais de l’Amérique. Barnum est un de ceux qui ont fait l’Amérique moderne, où votre talent, l’imagination, le travail, sont récompensés », dit l’acteur.
Patrick TARDIT